3 juillet 2021
Evangile du 3 juillet Luc BOUGE
Je ne sais pas vous, mais moi, je l'aime bien ce Thomas.
C'est vraiment quelqu'un de spécial. Les évangiles de Matthieu, Marc et Luc n'en parlent presque pas. Il est juste un nom au milieu de la liste des Douze. Ni dans les premiers, ni dans les derniers, juste dans la moyenne, 8e sur 12 (Mt 10, 3 ; Mc 3, 18 ; Lc 6, 15).
Par contre, Jean le mentionne dans plusieurs passages: la résurrection de Lazare (Jn 11, 16), le discours de Jésus au dernier repas (Jn 14, 5) ; et aujourd'hui, l'apparition de Jésus ressuscité : Jn 20, 24. Mais à chaque fois que Thomas ouvre la bouche, c'est pour dire quelque chose de déplacé. Au moment où Jésus est bouleversé par la mort de son ami Lazare et se prépare à partir pour aller auprès de lui, la seule chose qu'il trouve à dire c'est Allons-y, nous aussi, pour mourir avec lui ! Au moment où Jésus confie ses dernières paroles à ses disciples bouleversés par son départ, il dit : Seigneur, nous ne savons pas où tu vas. Comment pourrions-nous savoir le chemin ? Et dans le texte d'aujourd'hui où Jésus est apparu vivant à ses disciples, il affirme : Non, je ne croirai pas !
Jean souligne que Thomas est surnommé Didyme. La traduction précise que ce mot signifie "jumeau", mais il signifie en fait "double", ou même "dédoublé". Pour Jean, ce Thomas est ainsi l'exemple du disciple "dédoublé". Le disciple qui n'arrive pas à s'engager, qui reste toujours entre-deux. Une sorte de demi-disciple. Il écoute Jésus comme les autres, mais il ne comprend pas bien ce que Jésus attend de lui, ni ce que lui attend vraiment de Jésus. Les paroles de Jésus semblent glisser sur lui, comme s'il était verrouillé de l'intérieur, bien tranquille dans sa maison. Il est en quelque sorte la figure inversée du "disciple que Jésus aimait" que présente Jean, ce disciple qui rayonne de désir et de justesse.
Mais aujourd'hui, c'est Jésus qui prend l'initiative de rejoindre Thomas au-delà de toutes les portes verrouillées. C'est Jésus qui tend ses mains et son côté vers Thomas. C'est Jésus qui implore Thomas de sortir enfin de sa maison barricadée pour le toucher, lui Jésus.
Jésus s'avance vers Thomas, mais pas trop près, juste à portée de main. Et Jésus reste là, invitant Thomas à avancer à son tour la main vers Lui. Que s'est-il passé dans ce moment où Jésus et Thomas sont ainsi face à face, main à main ? J'aime à imaginer qu'il y a eu un grand silence, un silence rempli d'une infinie liberté de dire oui ou non.
Et Thomas choisit la vie (Dt 15, 30). Il prononce sa première vraie parole de disciple : Mon Seigneur et mon Dieu. Il a enfin accepté d'entrouvrir la porte verrouillée de son coeur pour que des flots d'amour et de respect envahissent sa maison intérieure si bien protégée.
Et Jésus l'accueille les bras grand ouverts: Tu as vu et tu crois. Oui, désormais toute la vie de Thomas sera pour Jésus.
Droits image: Temps Spirituel