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Témoignage. Guerre à Gaza : la population s'enfonce dans l'horreur

Témoignage. Guerre à Gaza : la population s'enfonce dans l'horreur

Un article rédigé par Maxime Cossé, Madeleine Vatel et Melchior Gormand - le 19 juin 2025 - Modifié le 23 juin 2025

Après dix-neuf mois de guerre dans la bande de Gaza, la situation humanitaire atteint un point catastrophique. Le nombre de morts ne cesse d’augmenter, l’accès à l’aide extérieure, à l’alimentation et au soin sont extrêmement limités. Les organisations non-gouvernementales accèdent très difficilement dans l’enclave. Quelle est la situation sur place ? Pourquoi les organisations internationales peinent-elles à arrêter la guerre ? Une émission Je pense donc j’agis présentée par Melchior Gormand et Madeleine Vatel.

© Pixabay © Pixabay

Ce qu'il faut retenir :

  • La situation se dégrade chaque jour un peu plus à Gaza : l'accès à l'eau potable, à la nourriture et au soin est insuffisante. Les ONG alarment les organismes internationaux.
  • Il faudra des années pour reconstruire les infrastructures civiles, comme les écoles, les universités, les hôpitaux qui ont été détruites en nombre.
  • En novembre 2024, la Cour pénale internationale (CPI) a émis un mandat d'arrêt contre Benjamin Netanyahou, le Premier ministre d'Israël, qui décide du sort de la Bande de Gaza.
  • C'est un juriste polonais, Raphael Lemkin, qui est à l'origine du concept de génocide.

55 000 Palestiniens sont morts dans la bande de Gaza depuis le 7 octobre 2023 selon des chiffres du ministère de la santé. Soit près de 3 % des deux millions d’habitants de Gaza, qui survit quotidiennement sous les bombardements.

Face à une situation chaque jour plus critique, les ONG essaient tant bien que mal de venir en aide aux populations sur place, malgré le délabrement des infrastructures et des bâtiments. Bloquée par l’armée israélienne aux portes de Gaza, l’aide humanitaire est absolument nécessaire, pour éviter l’état de famine.

Sur le terrain, une situation déshumanisante

“Cinq camions d’aide humanitaire en trois mois.” Amande Bazerolle, responsable des opérations d’urgence pour la Palestine à Médecins Sans Frontières, déplore une situation de blocus total de l’enclave depuis le mois de mai 2025. Elle dénonce cette aide en quantité infime qui est “instrumentalisée, militarisée, qui amène à des pertes civiles et des blessés tous les jours depuis qu’elle a été mise en place par les autorités israéliennes via la Gaza Humanitarian Foundation. Bien trop souvent, cela finit dans les bains de sang”. Si l’on parle aujourd’hui d’une situation d’insécurité alimentaire, “on se dirige vers une situation de famine, c’est quasiment la totalité de la population qui est en insécurité alimentaire”, estime-t-elle.

“Il n’y a pas d'électricité à Gaza, et il n’y a pas d’eau potable sans carburant”, reprend Amande Bazerolle. En effet, sur place, l’eau est rendue potable grâce à des unités de dessalement . Or celles-ci tournent au carburant qui vient cruellement à manquer, d’après les ONG. “Il faut savoir que 80 % de la production d’eau potable a été détruite à Gaza", continue celle qui est membre de MSF. “Les gens vivaient déjà à des seuils d'extrême urgence. On parle d’eau potable, mais de l’eau ménagère, on n'en a pas non plus, rappelle-t-elle également.

On se dirige vers une situation de famine, tandis que c’est quasiment la totalité de la population qui est en insécurité alimentaire. 

Amande Bazerolle, Médecin sans frontières

L’ampleur du mal est immense, s’émeut Cathy Leblanc, professeur en philosophie à l’Institut Catholique de Lille, spécialisée en philosophie des droits de l’Homme, et vice-présidente française du Comité international de Buchenwald. Et cette situation catastrophique implique aussi le personnel des associations sur place. “Il y a plus de quatre cents humanitaires qui sont morts à Gaza”, estime la chercheuse. Si les morts s’accumulent, les hôpitaux, sous les bombardements, font face à un afflux en constante augmentation des blessés. “Sur 36 hôpitaux, il y en a encore 17 qui sont partiellement actifs”, estime Amande Bazerolle, rappelant que “partiellement veut dire que l’hôpital de Shifa qui avait 700 lits, n'en a dorénavant plus que 12”. La responsable considère cependant que Gaza a du personnel médical extrêmement qualifié, nous n’avons pas besoin de les former, nous sommes là pour apporter du soutien et des capacités”, dans le cas où “il s’agit de chirurgie de guerre : les bombardements, ça n’est pas la spécialité de tout à chacun”.

Une situation humanitaire trop peu reconnue

“Je suis vraiment très en colère contre les hommes de bonne volonté qui ne mettent pas leur force à arrêter Benjamin Netanyahou”, regrette Jacqueline, une auditrice. Elle est rejointe par Patrick, "partagé entre l'émotion et la colère face à la dizaine de milliers de morts. Pour moi, le Hamas et Benjamin Netanyahou sont les mêmes, ce sont des assassins. Une situation qui questionne sur l’incapacité des organisations internationales à agir sur le terrain. “On constate une certaine inefficacité, notamment par rapport au mandat d'arrêt international émis contre Benjamin Netanyahou. Il y a aussi la difficulté de poser des sanctions qui impliquent de se mettre à dos Israël”, remarque Cathy Leblanc. “Sur place, les gens sont évidemment extrêmement remontés contre les Israéliens, contre le Hamas, et contre les organisations non-gouvernementales, qu’ils accusent de ne pas les aider assez", explique Amande Bazerolle.

La qualification de crime contre l’humanité est bien réelle. 

Cathy Leblanc, philosophe, spécialiste

Si MSF ne parle pas encore d’une famine, Cathy Leblanc estime, elle, “qu'il ne faut pas avoir peur d’utiliser ce mot de famine. Celle qui est aussi philosophe, souligne que “la qualification de crime contre l’humanité est bien réelle”, les bombardements des hôpitaux étant ainsi considérés car le droit de la guerre indique bien que les infrastructures civiles sont exclues des attaques. Israël arguant qu'ils sont un lieu refuge pour le Hamas. L’enseignante rappelle que “cette qualification de 'crime contre l'humanité' a été formulée par la Cour pénale internationale. Mais elle tempère concernant le terme qui pose plus de problème, celui du génocide”, même si, selon elle, “nous en prenons la direction”.

D’après Cathy Leblanc, “la première définition donnée par Raphaël Lemkin dit qu’il faut qu’il y ait une intention de détruire tout ou partie d’un groupe national, d’un groupe ethnique, d’un groupe racial ou d’un groupe religieux. La chercheuse cite ici le juriste juif polonais, qui a forgé en 1944, le terme et le concept de génocide. D'abord au tribunal de Nuremberg, puis auprès de l’ONU en 1949. Il rappelle que les notions de groupe et d’intention, sont les plus importantes pour estimer le génocide, sans oublier que, légalement, c’est une procédure qui prend un temps considérable.

Il faut que des actes soient mis en place pour que ce massacre s’arrête

Amande Bazerolle assure que nous sommes dans un mécanisme de génocide, et il faut que cela s’arrête. Ce n’est pas tout de qualifier la chose, il faut que des actes soient mis en place pour que ce massacre s’arrête. Si les organisations internationales sont critiquées pour leurs actions, de nombreux citoyens à travers le monde se positionnent en soutien aux Gazaouis. Mais Cathy Leblanc souligne avec regret que “pour l’instant, la paix est un doux rêve”

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Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
Je pense donc j'agis
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