Le vote solennel sur la propostion de loi sur l'aide à mourir aura lieu mardi 27 mai après-midi. Mais qu'est ce que cette évolution législative dit de l'évolution du rapport à la mort de notre société ? Analyses avec Damien Le Guay, philosophe, spécialiste d’éthique médicale et auteur de l’essai Quand l'euthanasie sera là… chez Salvator, le 25 mai d'une Tribune dans le Journal du dimanche.
L'amendement a fait l'effet d'un coup de canon pour les opposants à la loi fin de vie. Les députés ont voté une hausse des peines en cas d'entrave au droit à l'aide à mourir. Une personne qui tenterait d'empêcher ou d’influencer quelqu'un qui a émis la volonté d’une euthanasie, est passible de deux ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende.
Mardi 27 mai sera « une journée très triste parce qu'il risque d’y avoir un élément de basculement, une rupture anthropologique », assure Damien Le Guay. Pour le philosophe, la médecine et la société ont toujours lutté contre la mort en faisant le nécessaire pour apaiser la douleur physique et psychologique. Si la loi fin de vie venait à être votée, « on pourra non seulement choisir sa mort mais surtout accepter que les gens veuillent et leur donner la mort ».
La loi va augmenter les hypocrisies et va favoriser la mort au détriment des soins palliatifs.
70% des Français se disent favorables à l'aide à mourir. Pour Damien Le Guay, ce chiffre est malheureux car il montre « que la mort est une solution ».Pour lui la loi fin de vie est une mesure d'économie pour pallier aux soins palliatifs. « La loi va augmenter les hypocrisies et va favoriser la mort au détriment des soins palliatifs », assure tristement le philosophe.
Les progressistes placent le sujet de la mort comme étant libre et indépendant. En ayant le droit de choisir sa mort, la volonté de chaque personne s'impose aux autres. Mais pour le philosophe, quand vient la fin de vie, « les malades ont besoin notamment de soins palliatifs du réconfort des autres ».
Les malades ont besoin notamment en soins palliatifs du réconfort des autres.
L’auteur de l’essai Quand l'euthanasie sera là… s’oppose à la possibilité de choisir seul de mourir ou pas. Selon lui, il est indispensable que les humains aient recours aux autres pour les conseiller face à une telle décision. L'entourage doit aussi pouvoir réconforter la personne en souffrance d’autant que pour le philosophe, la loi du 27 mai, si elle est votée, étendra le droit à mourir aux mineurs particulièrement vulnérables.
Damien Leguay a travaillé sur le disability paradoxe qui montre que beaucoup de personnes vivant avec un handicap sérieux rapportent en général une qualité de vie perçue comme bonne, à la surprise souvent des personnes non handicapées. Le philosophe a même interrogé les personnes atteintes de la maladie de Charcot sur leur qualité de vie : « on s'attend à une réponse très négative or elle est meilleure que ce qu’aurait pensé la population générale ».
La demande de vie, la demande de continuer à vivre est plus forte que tout en général.
Pour le spécialiste d’éthique médicale, il est impossible de savoir en avance quelle décision une personne prendrait si elle était confrontée à une maladie comme Charcot. Face à des situations de vie qui apparaissent insurmontables, « la demande de vie, la demande de continuer à vivre est plus forte que tout en général ». Après une semaine en soins palliatifs, seulement 0,3% de personnes continuent à demander l'aide à mourir.
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