Ce mardi 26 mai, un couple de lyonnais, Joseph et Marie Remillieux, ont été reconnus Justes parmi les nations à titre posthume. Malgré un contexte géopolitique tendu, les demandes de reconnaissance auprès du comité français pour Yad Vashem sont de plus en plus nombreuses. Qui sont les Justes parmi les nations ? Quels sont les critères pour recevoir ce titre ?
L’institut Yad Vashem continue de remettre à titre posthume la médaille de Juste parmi les nations. Ce mardi 26 mai, un couple de lyonnais, Joseph et Marie Remillieux, ont ainsi été reconnus Justes lors d’une cérémonie à la Préfecture du Rhône. Malgré un contexte géopolitique est tendu - et la polémique dans la ville de Vendôme - "les demandes de reconnaissance sont de plus en plus nombreuses", confie Sylvie Altar, historienne et déléguée régionale pour le Comité français pour Yad Vashem. Qui sont les Justes parmi les nations ? Quels sont les critères pour recevoir ce titre ?
La Côte-d'Or, le Jura, la Saône-et-Loire, mais aussi l'Ain, l'Ardèche, la Drôme, l'Isère, la Loire, la Haute-Loire, le Rhône, la Savoie et la Haute-Savoie. Ces douze départements forment à eux-mêmes une zone qui concentre le plus grand nombre de Justes parmi les nations. Une "terre des Justes", peut-on lire dans l’ouvrage "Justes parmi les Nations", de Sylvie Altar et Stéphane Nivet paru en avril 2025 aux éditions du Progrès.
"Cette grande région Rhône-Alpes, étendue aux marges bourguignonnes et franc-comtoises, traversées dans le Jura et en Saône-et-Loire par la ligne de démarcation, ainsi qu'à la Haute-Loire, devient le carrefour des espérances, une terre de refuge intérieur qui voit converger vers elle le flot des déracinés."
Sylvie Altar et Stéphane Nivet, "Justes parmi les nations" (éd. Progrès)
Au cours de la Seconde Guerre mondiale, des milliers de Juifs y ont trouvé refuge dans cette zone stratégique. Jusqu’à 40.000 en 1943 - là où ils n’étaient qu’environ 8.000 avant la guerre. Cette zone est devenue stratégique en raison de son "réseau ferroviaire notamment de petites lignes qui vont desservir des coins reculés comme Le Chambon-sur-Lignon". Et aussi en raison de sa proximité avec la Suisse, ce qui est "un aspect essentiel lorsque l’on parle des persécutions et des possibilités de sauvetage et de filières".
La ville de Lyon est même devenue "capitale du judaïsme", explique Sylvie Altar, historienne, spécialiste de la vie des Juifs en France avant, pendant et après la Seconde Guerre mondiale. Les institutions juives s’y sont installées dès 1941, le Consistoire central puis le Grand-Rabbinat. Il n’est donc pas étonnant que ce territoire refuge ait suscité autant de personnes reconnues Justes parmi les nations.
On compte en France plus de 4.300 Justes parmi les nations : 882 de cette région Rhône-Alpes élargie. Il y a parmi les plus connus le cardinal Pierre Gerlier, archevêque de Lyon, bien que maréchaliste au début de la guerre. Ou encore le pasteur André Trocmé et son épouse Magda, du Chambon-sur-Lignon, l’un des deux villages qui ont reçu en Europe le diplôme d’honneur de Juste parmi les nations.
En réalité, "on ne saura jamais exactement le nombre de façon exhaustive de Justes parmi les nations", prévient Sylvie Altar. De même que l’on ne sait pas grand-chose de la vie de la plupart d'entre eux, presque anonymes. Des hommes et des femmes "qui ont agi de façon simple, humble". L’institut Yad Vashem a même érigé à Jérusalem un monument aux Justes anonymes. Robert Badinter parlait d'une "conspiration des braves gens".
Le titre est remis "uniquement aux personnes non juives", explique la déléguée régionale pour le Comité français pour Yad Vashem, qui, pendant la Seconde Guerre mondiale, "ont mis leur vie en péril pour sauver un Juif en échange de rien, sans retour, sans attendre quoi que ce soit". Ce que vient récompenser ce titre, c’est un acte, et non la moralité de la personne. Le comité Yad Vashem traite les dossiers en menant une enquête historique, sur la base d’archives et de témoignages. Il faut aussi prouver que ces personnes avaient conscience de sauver une vie.
La phrase gravée sur la médaille remise aux Justes parmi les nations, "Qui sauve une vie sauve l’humanité", est tirée du Talmud. Ce très vaste recueil de commentaires de la Torah est au cœur de la tradition juive. Sur l’autre face de la médaille sont gravées des mains qui agrippent des fils de fer barbelé eux-mêmes reliés à un globe terrestre.
La notion de Juste est très importantes dans la Bible et la tradition juive. "Le juste, c’était celui qui respectait au moins les sept lois de Noé, décrit Sylvie Altar, qui permettait au monde de tourner normalement." Les sept lois noahides tirées du Livre de la Genèse, le fameux récit du Déluge, sont considérées comme des lois universelles.
L’Institut Yad Vashem a été créé en 1963 en Israël, à la suite du procès Eichmann à Jérusalem (de 1961 à 1962), qui constitue "un tournant majeur", souligne Sylvie Altar. Au cours de ce procès, "il y a eu cette idée de se dire que face à cette nuit, liée aux premiers témoignages qui se sont révélés, il fallait peut-être aussi chercher la lumière c’est-à-dire ceux qui ont agi d’une manière ou d’une autre pour sauver des Juifs". Le titre de Juste parmi les nations est "la plus haute distinction civile de l’État d’Israël", souligne l’historienne.
En 2007, les Justes parmi les nations sont entrés symboliquement au Panthéon, sur proposition de Simone Veil. "L’idée, c’était de montrer ces valeurs de prise de conscience humaine, décrit Sylvie Altar, ces valeurs universelles, qui doivent animer les sociétés, ces valeurs qui représentent notre République."
Comment comprendre les rites, les fêtes qui rythment le calendrier hébraïque ? Comment lire la Bible à la lumière de la tradition juive ? Qu’apporte la lecture du Talmud ou les textes de Maïmonide à un croyant juif... ? Chaque semaine, dans un dialogue avec un fin connaisseur du monde juif, Odile Riffaud nous fait entrer dans la richesse de cette tradition religieuse qui est à la racine du christianisme et de l’islam.
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