Simon de Monicault | Sous les dorures impériales, l’éloge du bizarre
Le château de Compiègne présente actuellement une exposition audacieuse, "Bizarreries". Oubliés les trésors et les chefs-d’œuvre habituellement mis à l’honneur. Pour une fois, ce sont les objets oubliés dans les réserves qui sont célébrés.
Château de Compiègne @ Simon de MonicaultParmi la cinquantaine d’objets mis en valeur, un est particulièrement émouvant. Au premier abord, l’objet est modeste : un simple disque noir, d’une vingtaine de centimètres de diamètre. On croirait presque voir une bobine de cinéaste. Il s’agit en fait d’un gonfleur de matelas gonflable, datant de la fin du XIXe siècle et ayant servi à l’impératrice Eugénie.
Un destin tragique
Suite au spectaculaire vol de ses bijoux au Louvre, on a beaucoup évoqué ces derniers temps le
destin de l’impératrice Eugénie. Son immense beauté a fait tourner bien des têtes. Lors de son mariage, Victor Hugo écrit cruellement « l'Aigle épouse une cocotte ». Sa vie est marquée par les épreuves. La plus insupportable est certainement la mort de son fils en 1879 dans le Zoulouland (actuelle Afrique du Sud). Il y combattait sous l’uniforme britannique. Sa mère, très inquiète, avait pourtant tout fait pour l’en dissuader. Mais le jeune prince répondit aux objections de sa mère : « Quand j'aurai fait voir que je sais exposer ma vie pour un pays qui n'est pas le mien, on ne doutera plus que je sache la risquer mieux encore pour ma patrie ». Un an après sa mort, Eugénie se rend incognito, sous le nom de « comtesse de Pierrefonds », sur la tombe de son fils. C’est pour cet émouvant voyage que ce fameux gonfleur de matelas est employé.
Les réserves mises en lumière
L’exposition du Palais de Compiègne s’inscrit dans une tendance récente. Les musées souhaitent mettre en avant leurs réserves : la richesse et la variété des objets conservés constituent des atouts précieux pour interpeller les visiteurs. Le Louvre Lens, dès son ouverture en 2012, a veillé à mettre en lumière les œuvres des réserves. En mai dernier, l’institution londonienne Victoria and Albert Museum a ouvert un bâtiment entier pour permettre aux visiteurs de se plonger dans l’univers des réserves. Dans ces lieux riches de milliers d’œuvres, on est invité à une véritable chasse au trésor.


Chaque mardi à 8h45, Guillaume Goubert et Simon de Monicault présentent une exposition ou un événement qui raconte l'histoire de l'art.




