
Éducation au vivant, une question d'émotions
En partenariat avec KAIZEN
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Faire classe hors les murs. De plus en plus d’enseignantes et d’enseignants sortent en plein air pour délivrer des apprentissages en maternelle, primaire ou secondaire. Un congrès international s’ouvre à Marseille ce mercredi. Cette pédagogie des classes dehors se développe y compris en France.
Le chant des oiseaux, la chaleur du soleil, le vent dans les arbres. Et en dessous, les enfants, autour de la maîtresse, qui apprennent à compter en remplissant des boîtes d'œuf avec des pignes de pins. Faire classe dehors, en fait, ce n’est pas si nouveau. On assiste à un retour de pratiques plus ou moins anciennes, dont certaines remontent à l’Antiquité. “Aristote donnait ses cours de philosophie en marchant dehors. Au XXe siècle, le courant hygiéniste proposait des cours dans des écoles sans murs”, rappelle avec humour Benjamin Gentils, directeur de l’association la Fabrique des Communs Pédagogiques à l’initiative des Rencontres internationales de la classe dehors à Marseille.
Il y a les classiques sorties dans des espaces naturels ou bien dans des musées ou d’autres institutions culturelles. Mais cela peut se passer aussi dans l’enceinte de l’établissement. Virginie Sigaud est institutrice à Lyon dans le 8e arrondissement. Depuis quatre ans, avec sa collègue Loetitia Raguin, elle donne une petite partie de ses cours de CP et CE1 dehors, dans la cour ou bien à l’extérieur de l’école. “Au départ, on a constitué un jardin pédagogique avec les élèves. Il s’agissait d’activités de jardinage”, se rappelle Virginie Sigaud. “Et petit à petit, on a exporté des matières scolaires à l'extérieur, parce qu'on s'est rendu compte en fait de tous les bienfaits de ces activités en extérieur”. “Nous avons commencé par la poésie. Ensuite, nous avons fait des maths, de l'orthographe et de la grammaire”, abonde Loetitia Raguin. Cette dernière estime d’ailleurs que “toutes les matières abordées en classe s'adaptent et se pratiquent aussi bien à l'extérieur”.
Il s’avère que ces cours hors les murs peuvent même se dérouler dans la rue, pour placer les élèves dans une situation différente. Benjamin Gentils cite par exemple “des oraux du bac de Français sous la forme d'événements littéraires”. Conséquences de ce type de pratique, cela permet de sortir les élèves de leur zone de confort. “Ils développent leur éloquence et leur confiance en eux pour prendre la parole dans un espace où il y a de l'incertitude, où il y a des gens qui peuvent passer, parler et crier” s’enthousiasme le directeur de la Fabrique des Communs Pédagogiques.
L'éducation à l'extérieur ne s’oppose pas à celle donnée dans la classe. “On va dehors, on va enquêter, on va collecter des choses, on va prendre des photos”, souligne Benjamin Gentils, ajoutant que tout cela se fait dans le but d’analyser ensuite les résultats de l'expérience, en classe. Il estime aussi que la pédagogie à l'extérieur permet de réaliser des activités inaccessibles en classe, ce qui permet de parfaire l'apprentissage des élèves. Et cette méthode séduit selon Benjamin Gentils jusqu’à “4.000 écoles, collèges et lycées en France”. Dans certains cas, les classes dehors peuvent faire l’objet de partenariats plus poussés, comme avec l’office français de la biodiversité, où des enfants sont inclus, par exemple, dans des dispositifs de suivi d'aires protégées.
Réduction du stress, meilleure rétention de l’information, amélioration de la santé physique… Les bienfaits de l’apprentissage en plein air chez les élèves sont nombreux. Des études scientifiques en Suisse ou au Canada le confirment au niveau international. Dans sa classe à Lyon, Loetitia Raguin constate que “certains enfants avaient des difficultés, par exemple, en lecture. L'apprentissage leur était plus facile dans le jardin”. Selon elle, “le regard du groupe était la cause de ses difficultés. En petit groupe, les élèves sont plus enclins à entrer dans l'apprentissage et à réussir”.
Les classes dehors sont à l’initiative des équipes pédagogiques. Si la pratique se développe, elle est loin d’être une généralité en France. Il existe plusieurs freins, notamment le manque de formation des enseignants.“Nous allons être formés sur les inégalités de genre, sur la question de la lutte contre le harcèlement, mais la classe dehors n'en fait pas partie”, regrette Guislaine David, porte-parole du syndicat SNUIPP. “De nombreux enseignants se motivent en équipe ou seuls et s'auto-forment sur ces questions-là”, précise-t-elle.
Selon les partisans de l'école, une prise en compte des collectivités locales est aussi nécessaire. Il faut souvent adapter les établissements scolaires, en aménageant les cours de récréation, en les végétalisant, ou en offrant des moyens de se déplacer à l’extérieur en sécurité. Des grandes disparités entre les communes émerge l’intérêt des échanges internationaux pour partager les pratiques. Des enseignants de Suisse, du Canada, mais aussi du Sénégal ou du Liban seront présents à Marseille. Dans ces pays, la classe hors les murs est souvent un standard plutôt que l’exception.
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