Toulon
Plus que des “tondeuses sur pattes”, ils font office de technique naturelle d’entretien, qui donne la possibilité au public de renouer avec la biodiversité. Les animaux de l’éco-pâturage permettent d’entretenir les espaces verts des collectivités, des entreprises, en plus des parcelles agricoles et autres terrains herbés. Comment cette technique agricole fonctionne-t-elle ? Quelles sont ses vertus ? Une émission Je pense donc j’agis, présentée par Melchior Gormand.
Ruminer pour mieux tondre. Des moutons, des brebis, des boucs, et parfois même des canards, occupent les plaines herbées des campagnes et des villes. Si l’éco-pâturage a le vent en poupe ces dernières années, la technique n’est pas nouvelle.
Cette pratique s’inspire du pastoralisme de nos ancêtres. Aujourd’hui, elle a cette particularité de répondre aux enjeux contemporains d’adaptation au réchauffement climatique, et de faire face à l’effondrement de la biodiversité. L’éco-pâturage place les animaux de la ferme au plus proche du public, et comble le fossé formé au fil du temps entre le monde rural et celui des villes.
“J’ai eu soixante naissances cette année, et je suis maintenant à 250 animaux”, estime Jérôme Tropini, éleveur et fondateur de Berger Maritime, solution locale d’éco-pâturage en Charente-Maritime. Son troupeau, uniquement composé de moutons, accueille aussi des races rares, comme les moutons landais, plus résistants aux maladies. Damien Hédin, secrétaire de la Fédération Française d'Éco-pâturage et d'Écopastoralisme, et président d'Ökotop, association spécialisée dans l'éco-pâturage, compte pas moins de 700 animaux dans son troupeau. Christophe Darpheuil est directeur de l’association Naturama qui propose l’entretien de surfaces herbées avec des animaux de la ferme, pour la plupart des brebis et des moutons, sauvés et récupérés dans des refuges. Son troupeau actuel compte 300 animaux de différentes espèces et races.
L’éco-pâturage, c’est une pratique bien ancrée dans son époque.
La demande d'entretien par les herbivores ne cesse d'augmenter tandis que de nombreux acteurs territoriaux limitent leur impact carbone. “On a les autoroutes, la Compagnie Nationale du Rhône avec l’entretien de toutes les berges”, cite Christophe Darpheuil, dont l’association Naturama est porteuse du projet “Mon Berger Local”. Cette initiative a pour vocation de mettre en contact gratuitement des éleveurs locaux avec des clients. Si l’association Naturama est en activité depuis 2005, Christophe Darpheuil considère que la demande des éco-pâturages a explosé avec la loi Zéro Phyto en 2019, qui impose aux communes et aux collectivités de ne plus utiliser de produits chimiques.
“L’éco-pâturage, c’est une pratique bien ancrée dans son époque”, explique Damien Hédin. Le président de l’association Ökotop, qui protège la biodiversité et propose des ateliers de sensibilisation sur le sujet, considère que “cela répond à des enjeux qui n’existaient pas autrefois, ce n’est pas un copier-coller du pastoralisme montagnard, comme on le connaît depuis des siècles”. Celui qui est aussi le secrétaire général de la Fédération Française d'éco-pâturage, concède au secteur d’être une réponse adaptée “au dérèglement climatique et à l’effondrement de la biodiversité, tout comme les enjeux sociaux et sociétaux de reconnexion du citadin au vivant”.
“Dans notre secteur, on pense avant d’agir”, reprend avec humour Damien Hédin en faisant référence au titre de l'émission Je pense donc j'agis. “En effet, un troupeau ça se conduit”, explique-t-il et ajoute qu’il faut “le savoir-faire d’un berger, d’un éleveur avec ses compétences et ses connaissances” pour conseiller le client sur les endroits où pâturer. “Ce qui est intéressant avec l’éco-pâturage, c’est que les parcelles ne sont pas adaptées à tous les animaux”, renchérit Jérôme Tropini. Cet éleveur a choisi le mouton, car il lui permet de répondre à des demandes particulières en matière de terrain. Celui qui fait appel à ses moutons landais estime qu'aujourd'hui, “s’il n’y avait pas l’éco-pâturage, cette race n’existerait plus”, puisqu’elle n’est pas destinée à la production.
“Je leur ai trouvé un intérêt génétique, car ils sont plus résistants, ce qui est très important si vous voulez utiliser un minimum de produits chimiques”. Il constate que ses moutons relâchent des excréments, particulièrement sains pour les sols. “Si ces excréments sont chargés de molécules chimiques, c’est un peu dommage pour le côté biodiversité”, répond Jéröme Tropini, lorsque Christophe Darpheuil évoque le fait de mettre en pâture les troupeaux sur des terrains viticoles. Ce dernier, dont les étables se trouvent dans la vallée du Rhône, considère que “faire pâturer les moutons dans les vignes permet de les faire brouter au plus proche des cèpes, sans les abîmer”.
L'éco-pâturage est une alternative d’entretien.
Des vignes aux espaces verts de communes urbanisées, les moutons font une étonnante passerelle. Christophe Darpheuil rappelle que l’éco-pâturage passe aussi par “de la médiation animale dans les hôpitaux ou dans les Ehpads”. “On a les prisons qui nous sollicitent beaucoup, on a les entreprises, les communes et les collectivités”, liste-t-il. Jérôme Tropini témoigne de la cohésion et du lien social que procure le contact avec ses moutons. En milieu rural ou en zone périurbaine, “les animaux deviennent une attraction et nous permettent de parler au public des sujets de la biodiversité, de l’élevage, et de rassembler des gens qui peut-être ne se seraient pas parlé”, s’émerveille-t-il.
Au plus proche de ce public que les éleveurs peuvent désormais sensibiliser, les communes et les collectivités territoriales sont aussi les premières à choisir de favoriser les solutions écologiques pour réduire leur empreinte carbone. Jérôme Tropini souligne que “l'éco-pâturage est une alternative d’entretien, elle vient d’une volonté d’agir dans le sens de la transition environnementale”. Une alternative, pour le même coût.
Cette émission interactive de deux heures présentée par Melchior Gormand est une invitation à la réflexion et à l’action. Une heure pour réfléchir et prendre du recul sur l’actualité avec des invités interviewés par Véronique Alzieu, Pauline de Torsiac, Stéphanie Gallet, Madeleine Vatel et Vincent Belotti. Une heure pour agir, avec les témoignages d’acteurs de terrain pour se mettre en mouvement et s’engager dans la construction du monde de demain.
Intervenez en direct au 04 72 38 20 23, dans le groupe Facebook Je pense donc j'agis ou écrivez à direct@rcf.fr
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