
La République démocratique du Congo (RDC) et le Rwanda ont paraphé le texte d’un préaccord de paix mercredi. Il vise à mettre fin au conflit meurtrier dans l’est de la RDC, dans le Nord Kivu, frontalier du Rwanda où les différents groupes armés, dont le M23 ont fait régner la terreur depuis 2021.
La RDC et le Rwanda se sont engagés dans un processus de paix mercredi 18 juin. Les deux Etats ont validé le principe d'un accord de paix qui devrait être signé le 27 juin à Washington. “Il faut encore rester prudent. Cela se fera en plusieurs étapes", explique Thierry Vircoulon, chercheur associé à l'IFRI et spécialiste de la région des Grands lacs africains. Des négociations étaient en cours depuis plusieurs mois sous les auspices des États-Unis et du Qatar, tous deux médiateurs entre la RDC et le Rwanda. “L'accord entre les deux pays, serait validé par une rencontre entre les présidents congolais, rwandais et américains” ajoute-il.
Ce processus de paix est donc encore fragile, d'autant plus dans le contexte géopolitique actuel et l'imprévisibilité de Donald Trump qui doit apposer sa signature. D'autres éléments déstabilisants peuvent aussi intervenir. En fin d'année dernière, un accord sous l'égide de l'Angola avait capoté. Il devait être signé le 15 décembre 2024. “Finalement, le président rwandais Paul Kagamé n'est pas venu, donc rien n'a été signé. Il ne faut pas oublier que les accords de paix sont toujours signés de mauvaise foi. On peut aussi faire beaucoup d'efforts pour les saboter” souligne le chercheur. Depuis la reprise du conflit en 2021, différents acteurs,dont l'Eglise se sont impliqués pour élaborer un dialogue et le pape François s'était rendu en RDC en 2023.
Plusieurs points sont négociés depuis des semaines, comme le désengagement de l’armée rwandaise de RDC, le désarmement ou encore l'intégration à des groupes armés non-étatiques. Ils figurent dans la déclaration de principe approuvée en avril. “Il y a surtout un point concernant la gestion des ressources minières entre le Rwanda et la RDC. L’objectif serait d’instaurer une forme de coopération économique dans le secteur minier entre les deux pays, probablement avec la participation de compagnies américaines. C’est d’ailleurs la principale raison de l’implication des États-Unis dans ce processus" précise Thierry Vircoulon. L'Est de la RDC, est riche en ressources naturelles, notamment de l'or ou du coltan. 60 à 80 % des réserves mondiales de ce minerai stratégique sont situées dans cette région du Kivu. Ce sont des ressources minières exploitées dans des conditions souvent inhumaines pour les mineurs, sans respect pour l'environnement et dont les revenus sont détournés par les différents groupes armés, dont le M23, soutenu par le Rwanda. Autant de ressources stratégiques que les Américains veulent sécuriser en concurrence avec la Chine. “C'est en effet l'un des objectifs de la politique américaine. Mais contrairement à l’Ukraine et au Groenland, c'est la RDC qui l'a proposé aux Etats-Unis. Ce n'est pas Washington qui est venu trouver le gouvernement congolais” souligne Thierry Vircoulon.
Le principal groupe armé, le M23, a fait des progrès rapides dans l'est de la RDC depuis le mois de janvier. Il s'est notamment emparé de villes clés, de vastes territoires, avec des combats et massacres qui ont fait des milliers de morts, 3 000 au moins, rien que pour la prise de Goma. Les déplacés sont estimés à 600 000 par les ONG humanitaires. Le M23 contrôlerait environ la moitié de la province du Nord Kivu et actuellement, des combats sporadiques se poursuivent. “Le M23 est harcelé par des groupes armés qu'on appelle les Wazalendo et l'armée congolaise est très peu active sur le terrain” souligne Thierry Vircoulon.
L'est de la RDC, est en proie à des violences depuis plus de 30 ans. Une demi-douzaine de cessez-le-feu et de trêves ont été signés et violés par les parties depuis la reprise des combats en 2021. Les accords qui avaient tenu par le passé ont tous fini par être rompus. “La guerre de 2008, s'était finie par un accord de paix. Celle de 2012 aussi avec un accord impulsé par les Nations Unies. C’est donc un conflit qui n'a cessé de ressurgir parce que les parties prenantes, et notamment son commanditaire principal, le Rwanda, en avaient intérêt” précise Thierry Vircoulon. Il reste maintenant à attendre la prochaine étape le 27 juin, si aucun grain de sable ne vient se glisser d'ici là dans le processus. “Il faut rester dans le conditionnel, si cet accord est signé, on verra s'il met fin définitivement ou non à cette crise” conclut le chercheur.
Chaque matin à 7h10, les journalistes de RCF décryptent un sujet d'actualité en profondeur, dans la Matinale RCF.
Suivez l’actualité nationale et régionale chaque jour
République démocratique du Congo
En partenariat avec CCFD-Terre Solidaire
RCF est une radio associative et professionnelle.
Pour préserver la qualité de ses programmes et son indépendance, RCF compte sur la mobilisation de tous ses auditeurs. Vous aussi participez à son financement !