
Benjamin Netanyahou a promis lundi 26 mai de ramener les otages vivants ou morts. Alors qu’Israël intensifie sa guerre à Gaza, 59 personnes supplémentaires ont encore été tuées dans le territoire palestinien. L’attitude intransigeante du Premier ministre israélien provoque des fissures avec des alliés historiques de l'État hébreu. Le vent tourne-t-il sur la scène diplomatique ?
Le gouvernement de Benyamin Netanyahou ne cache plus ses ambitions de prendre le contrôle de l’ensemble de la bande de Gaza, et les alliés historiques d’Israël commencent à revoir leur position. La semaine dernière dans une déclaration commune, Emmanuel Macron, et les Premiers ministres britanniques, Keir Starmer, et canadiens, Mark Carney, ont prévenu qu'ils ne resteraient « pas les bras croisés » face aux « actions scandaleuses » du gouvernement israélien à Gaza. Une ligne rouge a été franchie avec l’annonce du plan de conquête de l’enclave.
« C'est essentiellement l'effet d'une pression des opinions publiques, qui se fait de plus en plus vive dans ce conflit tragique. Il semble bien qu'Israël, par ses outrances, a perdu la bataille de l'opinion internationale. La passivité diplomatique crée des dissonances avec les opinions publiques nationales », explique Bertrand Badie, enseignant à Sciences Po, et spécialiste des relations internationales.
Il semble bien qu'Israël, par ses outrances, a perdu la bataille de l'opinion internationale.
Les pays européens ont mis longtemps avant de réagir, en raison de liens historiques avec l'État hébreu. Sans compter sur les pays qui portent le poids de la Shoah comme l’Allemagne ou la France. La France, qui après Israël a eu le plus grand nombre de victimes lors du massacre du 7 octobre, a changé de ton. Alors est-ce la fin d’une relation particulière ? Pas forcément estime Frédéric Encel, géopolitologue spécialiste du Proche-Orient et auteur de la guerre mondiale n’aura pas lieu chez Odile Jacob. « C'est la fin d'une tonalité très basse de la France quant au conflit israélo-palestinien, mais pas d'une proximité très forte qui continuera d'exister, pour plein de raisons très prosaïques entre la France et Israël ».
Toutefois, il ne s’agit pour le moment que de discours de prise de paroles, mais peu contraignantes pour Benyamin Netanyahou.
Le calcul fait par Benjamin Netanyahou, que d'ici à ce qu'une décision contraignante soit prise, l'opération militaire israélienne sera achevée.
C’est pourquoi certains, comme Dominique de Villepin, plaident pour « un isolement économique et stratégique ». L’Union européenne a des outils à disposition pour augmenter la pression. L’Europe « est le premier partenaire économique d’Israël » avec un accord d’association. Une majorité des pays s’est prononcée la semaine dernière pour que la Commission examine une possible révision de cet accord. « Mais cela demande de longues délibérations à l'intérieur de l'Union européenne. Sur certains dossiers, ça demande l'unanimité des membres et on est loin de l'avoir atteint. Sur d'autres, seule une majorité peut être déterminante. C'est dire que c'est très long et c'est probablement le calcul fait par Benjamin Netanyahou, que d'ici à ce qu'une décision contraignante soit prise, l'opération militaire israélienne sera achevée », souligne Bertrand Badie.
« Il en faudrait bien plus pour faire plier le Premier ministre israélien », abonde Frédéric Encel. « Pour Netanyahou, manifestement, le maintien au pouvoir, à la tête d'une coalition extrémiste, qui l'a lui-même composée est plus important que tout. C'est devenu sa principale variable de prise de décision ».
Si les menaces européennes étaient suivies d’effets, le niveau de tension entre Israël et ses partenaires occidentaux atteindrait sans doute un seuil inédit, mais on en est très loin à ce stade.
Washington est sans aucun doute seul à pouvoir réellement forcer la main du gouvernement israélien. Donald Trump semble prendre ses distances.
« Beaucoup d'initiatives prises par Donald Trump vont dans le sens d'une certaine humiliation, voire une admonestation, qui est assénée à Benjamin Netanyahou », constate Bertrand Badie.
On ne touche absolument pas au levier militaire, à la fourniture d’armes, Trump ne semble pas prêt de renoncer.
« Mais on ne touche absolument pas au levier militaire, à la fourniture d’armes, Trump ne semble pas prêt de renoncer à cette pratique majeure et constante de la diplomatie américaine », nuance-t-il.
Israël est donc loin d’être un État paria comme l’a été dans un autre registre l’Afrique du Sud au temps de l’Apartheid.
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