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Contre la paresse, où trouver le courage ?

Contre la paresse, où trouver le courage ?

Un article rédigé par Clara Astratoff, Madeleine Vatel et Melchior Gormand - RCF, le 3 avril 2025 - Modifié le 3 avril 2025
Je pense donc j'agisContre la paresse, où trouver le courage ?

Lanceurs d’alertes, prise de position, héros de guerre : les journaux relèvent chaque jour des faits de courage. Loin d'être une idée abstraite, le courage est une qualité qui se révèle à partir d'une situation. Qu'on en manque ou qu'on en fasse preuve, il est reconnu et attendu. Qui sont les hommes et les femmes qui incarnent le courage aujourd'hui ? Comment susciter le courage ? Une émission Je pense donc j'agis présentée par Madeleine Vatel et Melchior Gormand.

De nos jours, nous manque-t-il du courage ? © jcomp sur FreepikDe nos jours, nous manque-t-il du courage ? © jcomp sur Freepik

Ce qu'il faut retenir :

  • Le courage s'exprime au quotidien, dans le fait de tenir bon et de ne pas céder à la paresse
  • La Russie, le contexte d'opposition au régime, suscite des actes de courage dont beaucoup sont peu visible ou même posés dans la clandestinité
  • L'un des moteurs du courage est d'agir pour les autres, il peut aussi venir de la foi

L’actualité nous montre chaque jour des personnalités qui font tout pour vaincre la peur d’agir. Des hommes et des femmes qui font preuve de bravoure comme en Russie en s’opposant au régime de Poutine. Mais d'où vient cette force morale qui permet d’agir et de se révolter ? Si le courage se traduit en acte, il est aussi l'objet de réflexion, étudié depuis longtemps par les philosophes. 

S’opposer à la ligne russe : un acte de courage

Contester le régime de Poutine et la guerre en Ukraine est un réel risque en Russie. Certains opposants deviennent des prisonniers politiques, plusieurs doivent s’exiler, et d’autres sont emprisonnés, certains en sont morts. Cette exposition au danger est une preuve de courage. “Certains opposants sont toujours en Russie et agissent de manière cachée. Je suis admirative de ces gens. Par exemple, ils mettent des flyers, mais même ça, c’est un risque”, dévoile Olga Solongo, sociologue et écrivaine d’origine russe, en France depuis 15 ans. Elle est la co-autrice du livre "Ces Russes qui sont contre la guerre", paru aux éditions les petits matins, il retrace le portrait de mouvements et de militants russes opposés à la guerre en Ukraine. Des contestations qui forcent le respect, et qui sont devenus des impératifs. “Pour les deux femmes que j’ai interviewé pour mon livre, quand elles sont passées à l’acte, elles ne pensaient pas au courage, elles agissaient avec une volonté de s'exprimer comme une sorte d’obligation interne. C’est après qu’elles ont réalisé que c’était du courage” raconte Olga Solongo.

Les actes de contestations au régime se sont multipliés depuis la guerre en Ukraine. Des prises de positions courageuses qui entraînent des menaces et des exils. Alexey Uminski est prêtre du clergé orthodoxe. Dès février 2022, il s’est opposé à “l’opération militaire spéciale” du Kremlin en Ukraine. Ainsi qu’à la ligne officielle de l’Église en Russie, en refusant de lire en janvier 2024, une prière guerrière "pour la victoire de la sainte Russie" rendue obligatoire dans le culte. Acte de courage pour lequel il sera démis de ses fonctions de recteur de l'Église de la Sainte Trinité à Khokhli. Il a dû quitter la Russie il y a un an, après avoir été menacé, en laissant son épouse à Moscou. Aujourd'hui établi à Paris, il a été accueilli par l'Église orthodoxe russe de Notre-Dame du signe dans le 16e arrondissement. C’est une église rattachée au patriarcat de Constantinople, avec lequel l’Église de Russie a rompu ses relations.

Désormais, Alexey Uminski donne du courage aux autres. “En Russie, il y a plus de 2 500 prisonniers politiques, avec aussi des ados de 14 ans. Chaque semaine, j’envoie des articles, des lettres  de soutien pour des prisonniers, j’ai des liens avec eux. Il y a beaucoup de gens et de chrétiens qui organisent l’aide et le soutien pour ces prisonniers, ce sont des petits courages qu’on ne peut pas voir”, témoigne-t-il.

"Petits" et "grands" actes de courage

Des actes d'héroïsme et de bravoure ont marqué la Russie. Tels que la manifestation du 25 août 1968 sur la Place Rouge, où huit protestataires ont déployé des banderoles contre l’invasion de la Tchécoslovaquie. “Dans ma famille, on connaissait tous cet exploit de courage, on se les racontait. C’est une manifestation énorme pour tous les pays soviétiques” confie le prêtre orthodoxe. Ainsi que le courage d’Alexeï Navalny, icône de l’opposition au régime de Vladimir Poutine.  

 

Dans ma famille, on connaissait tous cet exploit de courage, on se les racontait.

 

“Mais aujourd’hui seulement les petites manifestations de courage sont possibles en Russie. Elles sont très importantes et sont des exemples explique Alexey Uminski.Des petits courages au sens petitement visible. Ce sont des héros et héroïnes du quotidien qui sont invisibles et qui sont différents des héros du patrimoine historique ou de l’imaginaire dont on entend souvent parler” complète Gaëlle Jeanmart, philosophe et auteur du livre “Du courage : une histoire philosophique” avec Thomas Berns et Laurence Blésin, paru en 2010, aux Belles Lettres. Un régime autoritaire russe qui bride les protestations, avec des menaces fortes de prison ou de mort. “Il faut changer l’image de la Russie en montrant que tout le monde n’est pas d’accord avec Poutine. Mais aussi rappeler que les élections sont truquées et donc que tout le monde n’a pas voulu l’élire. Il y a beaucoup de résistants, mais les petits risques sont aussi des dangers, parce qu’on est dans un régime autoritaire, explique Olga Solongo. Ces “petits” courages ont une dimension collégiale. Le courage peut être un acte d’éclat qui illustre un individu. Mais il est aussi un être de vecteur qui réunit et impacte des groupes. C’est aussi un courage pour les autres”, précise la philosophe, Gaelle Jeanmart.

Un coup d'éclat venu d'un individu, c’est aussi un courage pour les autres.

Penser le courage 

Voltaire dit que le courage n’est pas une vertu, mais une qualité aux grands hommes exprime Gaëlle Jeanmart. Cette qualité dépend des contextes et des sources qui sont propres à chacun. “Le courage ne naît pas de rien, il y a des environnements propices. La guerre est une scène habituelle du courage. Dans ce contexte, le courage de résistance s’oppose à la peur. Mais il y a aussi un courage quotidien, comme le fait de porter sa maison, qui s’oppose au découragement. Le point commun de ces courages, c’est la force de tenir bon” explique la philosophe.

“Pour nous, c’est notre foi chrétienne qui nous donne la force. Jésus-Christ dit toujours : ne crains pas.

 

 Depuis longtemps, la philosophie étudie cette mystérieuse force morale. Socrate définit le courage comme des risques à mettre en balance. Il y a le risque d’aller en prison ou de mourir, mais il y a aussi d’autres risques plus discrets comme la honte. Ce qui compte, c’est d’être en accord avec soi-même, avec ses valeurs, même si l'on risque de mourir, complète Gaëlle Jeanmart.

Le point commun de ces courages, petits et grands, c’est la force de tenir bon

Cette force de caractère se puise dans différentes sources propres à chacun. “Pour nous, c’est notre foi chrétienne qui nous donne la force. Jésus-Christ dit toujours : ne crains pas” confit Alexey Uminski. Pour Olga Solongo “la qualité principale de ces gens aux actes de bravoure, c’est qu’ils ne sont pas indifférents aux conditions des autres, ça les pousse à agir”. La honte est aussi un moteur de courage. “C’est comme une obligation interne avec la conscience qui prend le dessus. Il y a une honte ressentie quand ton pays déclare une guerre criminelle à un pays voisin, avec un désir d’exprimer cette solidarité et de l'empathie” explique la sociologue russe.

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Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
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