
LE POINT DE VUE DE MARIE-HELENE LAFAGE - Ecoles fermées, rues désertées, population calfeutrée, les derniers jours de chaleur nous ont montré que nous n'étions pas encore prêts à affronter la chaleur. Marie-Hélène Lafage en détaille les enjeux.
D’après Météo France, on subissait en moyenne des vagues de chaleur 1,7 par an avant 1989 ; c’est passé à 9,4 jours sur la dernière décennie. Avec la trajectoire de réchauffement actuelle, on sait que ce nombre de jours va doubler d’ici 2050. Si on ne parvient pas à limiter le changement climatique par des efforts supplémentaires, on aura 10 fois plus de vagues de chaleur à la fin du siècle et on atteindra régulièrement les 50°C en France. On regarde trop souvent ces épisodes comme ponctuels, alors qu’ils sont appelés à devenir de plus en plus fréquents et intenses. En ville, en particulier, on est confrontés au phénomène d’ilot de chaleur urbain, parce que la densité urbaine et le béton gardent la chaleur. Cela crée des différences de 3 à 4°C entre les grandes villes et la périphérie, jusqu’à 10°C lors des fortes canicules. Adapter les villes, c’est tout simplement une urgence pour qu’elles restent habitables demain !
On dit souvent qu'il faut planter des arbres, mais plus que planter des arbres, il faut débitumer et végétaliser, de manière massive. Il faut disposer d’espaces verts conséquents et planter différentes strates de végétation, pour rafraîchir la ville. Mais plus largement, c’est une bonne partie des villes telle qu’elles ont été construites au cours des siècles derniers qui est à revoir, car elles ne sont pas adaptées au climat de demain. Pour illustrer ce problème, il suffit de regarder la différence entre les villes du nord et les villes méditerranéennes, construites dans des climats différents. Donc on ne peut pas limiter les solutions à « planter des arbres », en faisant comme si l’arbre était un ventilateur urbain doté de pouvoirs magiques. Le chantier est colossal parce qu’au-delà de la chaleur, les villes font aussi face à des tempêtes et à des épisodes de fortes pluies de plus en plus fréquents et intenses.
Il faut maintenir l’attention sur ces questions au-delà des épisodes de canicule. Les élections municipales arrivent, l’année prochaine, et il faudra interroger les futurs candidats à ce sujet. L’État doit aussi soutenir la transformation des villes, par des crédits exceptionnels. Or, depuis quelques temps, son engagement est en recul. Les crédits alloués à la végétalisation, à travers le Fond Vert, ont été rabotés. Par ailleurs, les solidarités sont cruciales pour faire face aux vagues de chaleur, car tout le monde n’y est pas confronté de la même manière. Il y a des inégalités sociales et des publics vulnérables. Sur ces questions, au-delà des politiques publiques, il faut aussi que toute la société se mobilise, mette en place des lieux de fraîcheur partagés, prenne soin des personnes fragiles. C’est la société et pas seulement la ville qui devra s’adapter.
Des chroniqueurs d'horizons variés nous livrent leur regard sur l'actualité chaque matin à 7h20, dans la matinale.
- Le lundi : Stéphane Vernay, directeur de la rédaction de Ouest-France à Paris, et Arnaud Benedetti, rédacteur en chef de La revue politique et parlementaire ;
- Le mardi : Corinne Bitaud, agronome et théologienne protestante, et Marie-Hélène Lafage, consultante en transition écologique auprès des collectivités territoriales ;
- Le mercredi : Clotilde Brossollet, éditrice, et Pierre Durieux, essayiste ;
- Le jeudi : Antoine-Marie Izoard, directeur de la rédaction de Famille chrétienne ; Aymeric Christensen, directeur de la rédaction de La Vie ;
- Le vendredi : Blanche Streb, essayiste, chroniqueuse, docteur en pharmacie, auteure de "Grâce à l’émerveillement" (éd. Salvator, 2023), "Éclats de vie" (éd. Emmanuel, 2019) et "Bébés sur mesure - Le monde des meilleurs" (éd. Artège, 2018), et Elisabeth Walbaum, Déléguée à la vie spirituelle à la Fédération de l'Entraide Protestante.
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