Le jury œcuménique du festival de Cannes a décerné ce week-end son prix du jury aux frères Dardenne pour le film « Jeunes Mères » qui raconte l’histoire de cinq adolescentes hébergées dans une maison maternelle.
Le jury œcuménique du festival de Cannes a choisi cette année de primer le film « Jeunes Mères » de Luc et Jean-Pierre Dardenne.
Ce film raconte l’histoire de cinq adolescentes hébergées dans une maison maternelle. Les réalisateurs belges narrent avec empathie le parcours de ces jeunes mamans qui affrontent un quotidien difficile, entre perte de repères et réconfort mutuel.
Au milieu des stars et des paillettes du festival de Cannes, la présence d’un jury chrétien a de quoi surprendre. Pourtant, ça n’est pas une nouveauté, le jury œcuménique du festival de Cannes existe depuis 1974. Il est composé de six membres tournants, tous amoureux du cinéma et rattachés à une église chrétienne. Ses membres sélectionnent le film de la compétition officielle qui transmet le plus, à leurs yeux, les valeurs d’espérance, de paix, de solidarité, de réconciliation et de dignité humaine propres à l’Évangile.
Le film des frères Dardenne primé cet année l’a été pour, et là je cite le communiqué de presse du jury œcuménique : « une histoire racontée avec douceur dans la meilleure tradition des auteurs qui (…) sont capables d’apporter de la nouveauté à leur style épuré ».
Et un peu plus loin, dans le même communiqué, on lit ceci : « Ce film nous révèle que même les petits gestes persistants d’affection et de soin, qu’ils proviennent de personnes ou d’institutions, peuvent guérir les blessures les plus profondes ».
Le style épuré des Dardenne on le connaît, depuis le temps : pas ou peu de maquillages, des décors de canal ou de camping aussi bruts qu’une crèche de Bethléem, des personnages esseulés et parfois dans le besoin qui luttent comme ils le peuvent pour se frayer un chemin dans l’existence.
La caméra les filme, souvent de très près, jusqu’à faire entendre leur souffle anxieux, comme dans « Rosetta », qui avait valu aux frères Dardenne la reconnaissance internationale et une palme d’or à Cannes en 1999.
Pour être (éventuellement) chrétien, ce qui pourrait manquer au cinéma des Dardenne parfois, c’est la part de mystère qu’un réalisateur comme Bruno Dumont a su insuffler à ses films tout en réalisant des films tout aussi sociaux, âpres et durs que ceux des Dardenne.
Mais le mystère n’est pas nécessairement dans les histoires qu’on raconte. Un film qui nous émeut, c’est en soi déjà un mystère.
il faut rappeler ces mots d’un autre réalisateur français, Robert Bresson, réalisateur notamment du « Journal d’un curé de campagne » qui dit ceci dans ses « Notes sur le cinématographe » :
« La caméra filme toujours les êtres avec l’indifférence d’une machine ».
Et c’est vrai ! On a tendance à l’oublier : le cinéma est plus du côté de la mécanique que du côté de la vie. Le tournage d’un film est toujours entrecoupé, fragmenté, mécanique, sans cesse interrompu…
Dans ces conditions, faire un cinéma humaniste, réparateur, qui transmet un souffle et des émotions, c’est – en fait – une prouesse incroyable !
Et que dans ces conditions, une fois le film monté, un souffle de vie le traverse, qu'il transmette et propage une émotion, si possible humaniste et pleine d’espoir, qu’un souffle de vie l'anime, cela tient, chez les Dardenne comme chez d’autres réalisateurs, de la prouesse et parfois même du miracle…
Qu’un film nous émeuve, cela tient toujours un peu du miracle.
Et c’est à cette question-là, semble-t-il que le jury œcuménique est sensible, année après années, Festival de Cannes après Festival de Cannes.
J. B.
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