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DÉBAT | Nestlé : jusqu'où ira le scandale des eaux contaminées ?

DÉBAT | Nestlé : jusqu'où ira le scandale des eaux contaminées ?

Un article rédigé par Maxime Cossé, Stéphanie Gallet et Melchior Gormand - Radio Notre Dame, le 4 juin 2025 - Modifié le 4 juin 2025
Je pense donc j'agisDécryptage de l'actualité de l'écologie - mai 2025

Au cœur d’un scandale révélé par Le Monde et la cellule d’investigation de Radio France, le groupe Nestlé est de nouveau sous le coups d’une plainte déposée par l’UFC-Que Choisir. Cette plainte met en cause aussi la responsabilité de certains ministres du gouvernement français, et les accuse d’avoir sciemment laissé l’entreprise vendre des eaux minérales contaminées. Quels sont les enjeux de ce scandale? Que dit-il de l’accès à l’eau de qualité sur le territoire Français ? Une émission Je pense donc j’agis présentée par Stéphanie Gallet et Melchior Gormand.

© Pixabay © Pixabay

“Trois milliards d’euros de plus-value”, une estimation des bénéfices de l’entreprise qui a profité de ce système pendant une quinzaine d’années. Nestlé est mis en cause pour avoir filtré de manière illégale, une partie de ses eaux minérales, parce qu’elles étaient contaminées. Si l’aspect sanitaire inquiète, il est aussi reproché à l’entreprise d’avoir vendu ses produits comme des eaux minérales et naturelles, donc plus chères que des eaux classiques.

Dans le même temps, chaque année, la sécheresse gagne des territoires. L’eau vient à manquer pour les consommateurs, et sa qualité est à la baisse. Face à cette crise de l’eau, la polémique enfle lorsque la presse révèle l’implication du gouvernement, accusé d’avoir fermé les yeux sur ces pratiques. 

Alexandre Poidatz, militant et co-fondateur du collectif Lutte & Contemplation et Justine Guitton-Boussion, journaliste à Reporterre apportent leur analyse dans l'émission Je pense donc j'agis.

À la source, un scandale d’État ?

Perrier, Contrex, Vittel, Hépar. Une marque d’eau minérale de Nestlé sur trois serait concernée par l’utilisation de ces filtres, selon les auteurs de l’enquête du Monde et de Radio France, à la source du scandale. “Nestlé a déjà été condamné à une amende de deux millions d’euros”, rappelle Alexandre Poidatz, ce qui certifie la responsabilité de l’entreprise selon lui. Justine Guitton-Boussion ajoute que "Nestlé a accepté de payer cette amende pour éviter un procès”.

On a vu que certaines bouteilles Perrier avaient pu être contaminées aux matières fécales.

“Selon des documents officiels, l'Élysées et plusieurs ministres de l’époque étaient au courant de la fraude et n’auraient absolument rien fait, détaille Justine Guitton-Boussion. On a vu que certaines bouteilles Perrier avaient pu être contaminées aux matières fécales. Aujourd’hui, il est difficile de dire si ces eaux sont dangereuses. En revanche, il n’y a rien qui justifie de les vendre plus chères alors qu’elles sont de la qualité du robinet”, renchérit la journaliste. Là où le scandale prend de l’ampleur, c’est que ces quatre dernières années, il y a eu beaucoup d’alertes qui ont été faites à différents ministères, y compris jusqu’au sommet de l’État”, dénonce Alexandre Poidatz.

“En juillet 2022, les ministères de l’Économie et de la Santé étaient tenus informés des fraudes. Trois mois plus tard, le cabinet d’Élisabeth Borne, première ministre de l’époque, recevait une note qui signalait des risques sanitaires et juridiques. En 2023, c’était Jérôme Salomon, le directeur général de la Santé qui recommandait de suspendre plusieurs sites de Nestlé en France”, énumère Justine Guitton-Boussion. Il y a toutes ces alertes et il n’y a absolument rien qui se passe, ajoute-t-elle. “Est-ce qu’Emmanuel Macron était au courant ? On ne sait pas. En tout cas, Alexis Kohler, secrétaire général de l’Élysées, lui, l’était”, intervient Alexandre Poidatz.

“Emmanuel Macron a répété qu’il n’y avait pas de connivence avec Nestlé. Il n’empêche qu’avant de devenir président, quand il était banquier, il avait gagné un million d'euros en menant une négociation pour Nestlé et il s’était vu proposer un poste à la direction française du groupe”, rappelle Justine Guitton-Boussion. “Quand la commission d’enquête de l'Assemblée nationale s’ouvre, et qu’Alexis Kohler ne se présente pas après convocation, on estime qu’on est en droit de se poser des questions”.

Au cœur de l’affaire, la raréfaction de l’eau naturelle

“Est-ce qu’il faut tricher et dire au public que l’eau est potable, est ce qu’on doit changer les normes, parce que l’eau est de moins en moins bonne qualité, ou est-ce qu'on doit changer tout le système pour que cette eau soit buvable ?”, interroge Alexandre Poidatz. Il détaille ainsi que “d’un côté, on a des autorités de santé en France qui nous donnent des seuils de pollution à ne pas dépasser. D’un autre côté, on a des entreprises qui doivent faire des profits à bas coûts.

Le gouvernement ne peut pas ignorer les questions légitimes qui se posent sur sa responsabilité.

Le co-fondateur du collection Lutte & Contemplation estime "qu’extraire des eaux minérales naturelles est de plus en plus chère, car de plus en plus réglementé, parce que la nature est polluée”. Et de conclure que “les pouvoirs publics se retrouvent face à une situation où d’un côté, ils doivent gérer la santé des citoyens, de l’autre, ils doivent gérer le business des entreprises. Qu’est-ce qu’ils font ? Ils se mettent dans une situation de compromission, et ils cachent ce qu’il se passe.

L’eau, c’est un enjeu absolument essentiel, souligne Justine Guitton-Boussion. “On en revient à l’enjeu démocratique. Le gouvernement ne peut pas ignorer les questions légitimes qui se posent sur sa responsabilité, et sur le fait de garantir que tout le monde puisse avoir accès, à l’avenir, à de l’eau de bonne qualité“, se révolte-t-elle. “Si on continue avec un modèle agricole et industriel comme on a actuellement, si on pollue les nappes phréatiques, les sols, on aura, un jour, plus accès à de l’eau minérale de qualité”, renchérit Alexandre Poidatz.

“Un groupe qui a décidé de s'accaparer un bien commun. C’est l’essence même du capitalisme”, résume Justine Guitton-Boussion. La journaliste considère le sujet de l’eau comme un enjeu démocratique. Dans les eaux troubles du scandale Nestlé, cette ressource est un sujet à débat, dans lequel chacune et chacun a son mot à dire. 

© RCF
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
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