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Mode éthique et responsable à Lyon : a-t-elle encore un avenir ?

Mode éthique et responsable à Lyon : a-t-elle encore un avenir ?

Un article rédigé par Thierry Weber - RCF Lyon, le 12 mai 2025 - Modifié le 16 mai 2025
Tempo · Le podcast d'actualité de RCF LyonMode éthique et responsable à Lyon : a-t-elle encore un avenir ?

En avril, trois enseignes lyonnaises de mode éthique et responsable ont annoncé leur fermeture. Une tendance de fond, car depuis 2022, le paysage lyonnais a perdu au moins une vingtaine de marques ou de boutiques du même genre. Crise économique, explosion de la fast fashion, des produits plus respectueux de la planète mais perçus comme trop chers : les raisons de ces fermetures sont multiples, et pourtant des créateurs et créatrices continuent de se lancer en 2025. Dans une région connue pour sa tradition textile, éclairages sur l’avenir de la mode éthique et responsable à Lyon.

Les raisons de ces fermetures sont multiples, et pourtant des créateurs et créatrices continuent de se lancer en 2025 - Artificial Photography via Unsplash (image d'illustration)Les raisons de ces fermetures sont multiples, et pourtant des créateurs et créatrices continuent de se lancer en 2025 - Artificial Photography via Unsplash (image d'illustration)

Sous un soleil radieux d'un lundi matin de mai, Nicolas Asbóth-Martire vient récupérer des documents pour la liquidation judiciaire de sa boutique. En 2015, il a cofondé Les Curieux, magasin d'achat-revente de mode éthique et responsable, le résultat d'un mariage entre deux boutiques qui se sont unies pour survivre. Dix ans plus tard, malgré un changement de local pour diminuer les frais, les rideaux sont définitivement fermés et la capitale des Gaules a perdu l'un de ses emblèmes du consommer autrement à Lyon.

Un contexte difficile

Cette histoire, est celle de beaucoup d'entrepreneurs lyonnais, contraints de mettre la clé sous la porte ces dernières années. La mode éthique et responsable pâtit comme tous les autres commerces, d'une situation de crise :

« Il y a eu un essor du made in France juste après le covid, qui a duré six mois, un an. Mais avec l'arrivée de la guerre en Ukraine, l'inflation a complètement changé le comportement de la clientèle », explique Nicolas Asbóth-Martire. Mais cela ne peut pas tout expliquer.

Il y a aussi les entrants de la fast-fashion, qui sont là à matraquer, font des très petits prix, sont très performants, sur les canaux de distribution.

Des petits prix, accessibles pour tous, bien loin des 30 euros que coûtait un t-shirt basique (mais éco-responsable) de sa boutique dans le 6e arrondissement lyonnais : « Dans notre boutique, on essayait toujours de faire comprendre aux gens qu'un t-shirt à 3 euros c'est pas possible. Si vous achetez un t-shirt à 3, 5 ou 10 euros, il y a quelqu'un qui se fait forcément avoir ». Une fast-fashion, de plus en plus puissante, la faute peut-être à l'absence de définition légale, et donc de contrôle.

Même s'il reste convaincu qu'un autre modèle est possible, pour Nicolas Asbóth-Martire, l'avenir s'inscrit en pointillé : « Si on parle de l'avenir de la mode éthique à Lyon, je suis plus que mitigé [...] à cause des travaux en centre ville, même si c'est pour un résultat très beau, on n'a pas anticipé le commerce urbain. Je pense que cette mode éthique et responsable se fera plus en périphérie, car les gens se sont installés là-bas ».

L'invité de M Comme Midi · RCF Lyon« Il n'existe pas encore de définition légale de la fast fashion » Glynnis Makoundou, avocate en droit de la mode

Faire les choses autrement pour continuer à vivre 

Quand on parle mode éthique et responsable à Lyon, un détour par le "Passage Thiaffait" s'impose. Ici, c'est l'endroit où des créateurs et créatrices, soucieux de leur impact environnemental peuvent lancer leur business, avec l'aide du Textile Lab, de la Ville et de la Métropole de Lyon. Situé dans les pentes de la Croix Rousse, c'est dans l'une de ces petites boutiques que Mauguan Péniguel s'est installé en 2023. Suite à un projet étudiant, il cofonde la marque NOSC, des vêtements de sport fabriqués à base d'huile de ricin. La promesse ? Des vêtements techniques, éco-responsables, qui durent dans le temps. « La volonté de créer NOSC part d'une étude disant que la pratique sportive détruit l'environnement dans lequel on vit, car ça rejette des microplastiques, des PFAS », explique le jeune entrepreneur.

Le "Passage Thiafait", dans les pentes de la Croix-Rousse © RCF Lyon

Un concept, qui a trouvé son public, mais qui n'a pas résisté à l'étape d'après : « L'objectif était de s'ouvrir à de nouveaux pays, de nouveaux réseaux. Le problème, c'est que j'étais dans une phase où le passé et le passif était trop lourds à supporter. On est dans une industrie textile, dans le sport, et technique et éco-responsable, donc en fait ça fait beaucoup de critères qu'il faut manier. Quand on est un gros mastodonte, on a des activités à côté qui permettent de nourrir l'innovation, nous c'était le cœur même de NOSC, on n'avait pas de vente récurrente à côté ».  

Comme Les Curieux, NOSC a baissé le rideau début avril, mais le sourire reste présent sur le visage du passionné de sport et d'entrepreneuriat : «Vendre de l'éco-responsabilité, ça ne plaît plus autant. Maintenant, faut se dire qu'il y a d'autres entreprises, qui plus ou moins correctement, font du green, de l'éco-responsable, mais du coup, ce n'est plus un argument différenciant [...]. Moi je suis convaincu que si on arrive à vendre un produit, même si la personne n'a pas conscience qu'il est éco-responsable, ça veut dire qu'il il y quelque chose d'autre qui plaît. Oui pour faire de l'éco-responsable par nature, parce que c'est nécessaire, mais l'innovation est une des manières d'apporter un besoin ou une différenciation ».

Un avenir mitigé, mais rempli d'espoir

Ce contexte difficile n'empêche pas de nouveaux créateurs et créatrices de se lancer. Il y a 8 mois, Alizée Sabin s'est lancée avec sa marque Caybeau, des vêtements évolutifs pour bébés et enfants, à base de tissus déjà existants, de l'upcycling : « Le vêtement va être évolutif sur 3 ans, avec une coupe droite, intemporelle et des bouton- pressions » (pour ajuster à la taille de l'enfant, ndlr).

Pour une robe par exemple, comptez 59 euros, le juste prix pour la jeune créatrice : « C'est un prix que j'ai statué à partir du prix que les parents étaient prêts à mettre pour une mode enfant, en général ça peut aller entre 15 et 25 euros, j'ai ensuite pris en compte mon travail (2h30 par produit, ndlr). Si on divise le prix par trois, ça fait 19 euros une robe. J'ai vraiment essayé de trouver le juste prix pour me financer moi-même, et avoir la possibilité pour l'acheteur d'acheter facilement ».

Alizée Sabin et sa marque de vêtements "Caybeau" © RCF Lyon

Même si elle avoue son scepticisme sur l'avenir de la mode éthique et responsable à Lyon, la jeune créatrice lyonnaise garde le sourire et l'envie de se battre. Pour l'accompagner, et pour fédérer d'autres acteurs, l'association The Greener Good, travaille au quotidien avec eux, et a organisé le temps d'une soirée, l'événement "En mode éthique, la Fashion révolution à la lyonnaise".

Les modèles économiques (dans la mode étique ndlr) sont très divers, et ne sont pas très solides, donc c'est très important de faire cohabiter ces acteurs là, pour qu'il puissent échanger, s'entraider

Clémentine Mossé, la directrice de l'association, poursuit : « J'espère vraiment que les initiatives qui sont présentes aujourd'hui vont perdurer et se développer. Je pense à une initiative lyonnaise, qui rayonne maintenant dans toute la France, We Dress Fair. La première plateforme en ligne de vente de vêtement éthique et éco-responsable, qui lance sa propre marque de vêtement ».

Des avancées, et des initiatives qui donnent de l'espoir, avec de l'enthousiasme ? « Oui, toujours ! », conclut en souriant Clémentine Mossé.

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Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
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