Le livre de la semaine : "Je voulais vivre" d'Adélaïde de Clermont Tonnerre
Avec Je voulais vivre, Adélaïde de Clermont-Tonnerre signe un roman vibrant sur la quête de soi, le poids des secrets familiaux et le désir de liberté.
Couverture du livre "Je voulais vivre" d'Adélaïde de Clermont Tonnerre © DRVous souvenez vous de Milady de Winter ? Ça vous parle ? C’est la méchante des Trois mousquetaires d’Alexandre Dumas, publié en 1844. Espionne pour le compte de Richelieu, maîtresse de Rochefort mais aussi de Buckingam, l’amant de la reine à qui elle confie ses ferrets ; c’est elle qui empoisonne la charmante de Boissieu, la fiancée de d’Artagnan. Elle a été mariée au comte de la Fère plus connu sous le nom d’Athos. D’ailleurs, elle aura affaires avec chacun des trois mousquetaires. Manipulatrice, séductrice, intrigante, bonne cavalière et meurtrière, elle est maléfique et cruelle. Mais qui est-elle exactement ? Car enfin une femme a une histoire. Certes elle n’a que 25 ans mais elle a bien eu une enfance, des parents ?
Dumas n’en parle pas ?
A peine. On ne rentre pas à l’intérieur du personnage. Mais c’est le défi que s’est lancée Adélaïde de Clermont Tonnerre en écrivant ce roman, Je voulais vivre. Elle raconte en effet par le menu toute la vie de cette fille qui s’appelle Anne du Breuil. « Par une nuit glaciale, le père Lamandre recueille une fillette de six ans venue frapper avec insistance à sa porte. L’enfant aux yeux admirables tremble de froid et de faim. Elle a les pieds en sang dans ses souliers à boucles d’argent, mais refuse de répondre aux questions qui lui sont posées. Le vieux prêtre ne saura que son prénom : Anne ». Vingt ans plus tard, Anne est devenue Lady Clarick. Richissime, courtisée, elle a l’oreille des grands. Manipulatrice sans foi ni loi, intrigante, traîtresse, empoisonneuse, cette criminelle au visage angélique a traversé les siècles et la littérature. « Voici venu le temps d’écarter la légende pour rencontrer la femme. Même un personnage de fiction peut réclamer justice », écrit Adélaïde de Clermont Tonnerre.
Qu’est-ce qui motive un tel personnage ?
L’argent ? Le sexe ? Le pouvoir ? Rien de tout cela. Elle va utiliser l’argent, le sexe et le pouvoir non comme des buts mais comme des moyens pour parvenir à ses fins : la vengeance. « Milady n'est pas une femme qui pleure. Elle est de celles qui se vengent », écrit Adélaïde de Clermont Tonnerre. De très belle naissance, elle avait tout pour une vie harmonieuse et heureuse. Mais à six ans, elle a dû fuir le château familial, elle a vu des hommes s’emparer de sa mère pour la violer et l’égorger. Elle va être élevée au couvent où elle obtient l’autorisation de prendre des cours d’équitation. Sous le nom de Charlotte Backson elle sera mariée au comte de La Fère qui ne s’appelait pas encore Athos puis à James de Winter, le frère de Percy - c’est ce mariage qui lui valut son titre de Milady.
Quel est son secret ?
Une douleur atroce : marquée à l’épaule au fer rouge d’une fleur de lys qui la flétrit à tout jamais. Marquée par le bourreau de Bétunes qui sera charger de l’exécuter. Voilà un roman haletant, passionnant qui se lit au galop car les chapitres sont courts et la magie des capes et des épées opère encore. On y retrouve les personnages qu’on a toujours aimés à travers la vie furieusement féminine d’une femme qu’on finirait par aimer. Un des meilleurs plaisirs de lecture de la rentrée. Qui a obtenu avant-hier le Prix Renaudot.


Chaque jeudi à 8h44, Christophe Henning (La Croix) et Christophe Mory (RCF et Radio Notre-Dame) présentent le livre de la semaine.




