Rentrée littéraire 2025 : "une tendance des ventes relativement morose"
La rentrée littéraire est habituellement la grand-messe de septembre. Chacun y va de son coup de cœur, essais, fiction, roman français ou étranger, des plus connus aux “petits nouveaux” ; 484 ouvrages vont paraître jusqu’en octobre. Mais en 2025, comme en 2024, les ventes de livres neufs sont plutôt à la baisse. Pour en parler, Renaud Lefebvre, directeur général du Syndicat national de l'Édition, est notre invité dans la matinale de RCF, Radio Notre-Dame.
Librairie L'Armitière, à Rouen © Wikipédia“Le constat est relativement morose, on parle d’une baisse mesurée de l’ordre d’1,2% des ventes cette année. Mais il s’agit d’une tendance de fond défavorable en France” regrette Renaud Lefebvre. On lit de moins en en moins en France, "l’épisode de rebond de lecture pendant la période du Covid-19 était inespéré, mais cela n’a pas duré" observe directeur général du Syndicat national de l'Édition. "Nous sommes revenus sur des tendances de fond que l’on observe aussi dans d’autres pays européens, car on a moins de temps d’esprit disponible face à la concurrence des écrans qui n’apporte pas véritablement d’alternative en termes de lecture. Le livre papier ne s’est pas déplacé vers le livre numérique" analyse Renaud Lefèbvre.
En parallèle, malgré un recul de l’intérêt pour la lecture, celles et ceux qui lisent encore se tournent aussi vers le livre d’occasion. En point de vente ou sur internet, le secteur connaît une forte progression, avec un chiffre d’affaires annuel estimé à 350 millions d’euros. “Lire des livres d'occasion c’est toujours lire, de ce point de vue-là c’est important”, estime Renaud Lefebvre avant d'ajouter : "tous ceux qui s’intéressent au livre considèrent que le phénomène a des impacts favorables. Mais la difficulté c’est que ces ventes ne s'accompagnent pas de droit d’auteur, contrairement au prêt en bibliothèque, cela risque de fragiliser le secteur du livre".
Les diminutions du Pass culture pour les moins de 18 ans y sont-elles pour quelque chose ? “Il y a un début d’impact, notamment chez les libraires, qui sont les premiers touchés, mais il est difficile pour l’instant d’en mesurer les effets de manière précise”. La dotation de chaque jeune s’est trouvée diminuée de moitié, 300 euros de Pass culture étaient alloués aux jeunes avant le 1er mars, ils n’en perçoivent désormais plus que 150 euros. “Un coup de pouce” en moins vécu comme un mauvais indicateur pour le milieu, selon Renaud Lefebvre.
On lit de moins en moins en France, l’épisode de rebond de lecture pendant la période du Covid-19 était inespéré, mais cela n’a pas duré.
“Le pass culture permettait jusqu’à présent aux jeunes d’acheter près d’1 million de livres, d’un point de vue culturel et pratique le dispositif était important contre le décrochage de la lecture en France” ajoute le directeur général du Syndicat national de l'Édition. Pour qui “il est utile de conserver cet instrument comme levier de développement ou de maintien de la lecture chez les jeunes, car la moitié de leurs achats se porte sur les livres.” Notons que la romance, notamment la dark romance, séduit de plus en plus les adolescents et jeunes adultes. Mais est-ce suffisant ?
De manière générale, "la littérature est effectivement la première catégorie d’ouvrages vendus en France, en partie grâce aux livres de Poche“ précise Renaud Lefèbvre. Le secteur se porte plutôt bien, avec des phénomènes qui tirent les ventes vers le haut, on pense à des succès de librairies, comme les romans de Freida McFadden du côté des auteurs étrangers, d'Amélie Nothomb ou de Guillaume Musso, dans un autre genre, pour les Français. Mais en dehors des "Best-sellers, valeurs refuges dans une période d’incertitude”, la tendance est moins favorable.
D'autant que le contexte économique est incertain dans le milieu du livre, car les charges des libraires sont à la hausse partout en France. Une certaine inquiétude se fait sentir du côté des petites maisons d'édition et librairies indépendants. Parmi eux, certains font des demandes de subvention au CNL (Centre national du livre) ou aux régions. Les petits éditeurs de BD se disent aussi en danger, certains lancent même des cagnottes en ligne pour leur venir en aide, tant la situation est critique. En 2024, on constatait une baisse des ventes de bandes dessinées à hauteur de 5% et 72 librairies ont dû fermer leurs portes. Reste à savoir si l’on assistera à un regain d’intérêt pour les livres, début novembre avec la révélation du prix Goncourt ou lors des périodes de fêtes, en fin d’année.


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