À Rouen, de jeunes migrants luttent devant la Préfecture pour faire reconnaître leur minorité
Depuis le 2 mai dernier, une vingtaine de jeunes migrants campent devant la Préfecture de Seine-Maritime à Rouen. Ces derniers demandent ardemment à ce que l’Etat français reconnaisse leur minorité et les droits qui y sont associés. Explications.
Vue sur le camp de jeunes migrants devant la Préfecture de Rouen, le 2 mai 2025. Crédits : CUARLe “collectif des mineurs isolés” a été créé en novembre 2024 par une dizaine de jeunes migrants qui n’étaient pas hébergés faute de place dans les espaces d'hébergement d’urgence et en attente de leur date d'audience. Ils se sont ensuite rendus à Paris pour se renseigner sur leurs droits. Au mois de janvier, les jeunes sont revenus à Rouen, ils ont fait des réunions et des campagnes de sensibilisation afin de chercher de l’aide auprès des associations et des syndicats. Suite à cela, le collectif a pu rejoindre la coordination nationale des mineurs en lutte qui réunit les villes de Marseille, Lille, Toulouse, Clermont-Ferrand, Besançon, Paris et Rouen. Tous les 6 mois, les collectifs de la coordination nationale s’organisent pour se retrouver dans le cadre de stage avec des activités et pour parler de leur lutte.
Chronologie - vendredi 2 mai 2025 : une vingtaine de migrants, tous mineurs isolés, s'installent devant la préfecture de Seine-Maritime à Rouen. - samedi 10 mai 2025 : manifestation « contre le racisme et pour l’égalité des droits » à Rouen en soutien aux jeunes migrants. - lundi 12 mai 2025 : rencontre du collectif avec des représentants de la Préfecture, du Département et du rectorat. Aucune solution d’hébergement n’a été trouvée. - mercredi 21 mai 2025 : initiative de quelques enseignants du lycée Marcel-Sembat à Sotteville-lès-Rouen de dispenser des cours. - samedi 24 mai 2025 : nouvelle manifestation, en soutien, organisée place Saint-Sever, à Rouen. - mardi 27 mai 2025 : rendez-vous au rectorat. Demande de scolarisation refusée mais certains dispositifs pédagogiques mis en place jusqu’au 4 juin. - lundi 2 juin 2025 : nouvelle réunion prévue avec le Département - [...] |
Un casse tête juridique : ni majeurs ni mineurs
L’action menée devant la préfecture, par ce collectif de jeunes migrants est la première grosse action menée par le collectif. L’objectif est de rendre visible leur situation et ce qu’ils traversent : "C’est pour montrer nos situations et pour rendre visible ce que l’État français cherche à cacher à l’opinion publique". Le collectif veut avant tout que l’État français reconnaisse leur minorité qui permet de les protéger "Nos documents d’état civil prouvent que nous sommes mineurs mais c’est contesté par l’État français. Par contre, on essaye de fournir d’autres documents qui prouvent réellement, que [...] les documents qu’on fournit sont [...] authentiques [...]" précise Doss, porte-parole du collectif.
Normalement on ne devrait pas être dehors, on devrait être hébergés jusqu’à ce que les doutes sur notre minorité soient levés, c’est à dire l’application de la présomption de minorité - Doss, porte-parole du collectif
Aujourd’hui, ils sont une vingtaine à camper devant la préfecture en attente d’action concrète de la part du rectorat et de la préfecture. Doss est l’un des portes parole du collectif, il nous décrit son envie de travailler afin de rendre fière sa famille : "Je veux juste travailler et rendre fière ma mère et mes frères et les aider [...]".
Un élan de solidarité local
Depuis leur installation, ce groupe de jeunes a reçu de nombreux soutiens locaux. Un élan de solidarité s’est alors immédiatement mis en place. "On reçoit plein de soutien que ce soit auprès de la mairie, des partis politiques, des syndicats et des personnes de bonne volonté notamment des riverains qui viennent souvent nous aider de ce qu’ils peuvent" nous raconte Doss. "C’est pas toujours facile mais on s’accroche avec leur soutien et ça nous réconforte, ça nous donne de l’espoir" poursuit-il.
Florian Renard, syndicaliste chez Sud Santé sociaux, contribue fortement à cette solidarité, en veillant sur le camp des jeunes migrants la nuit. "On est là au quotidien, pour veiller afin d’assurer leur sécurité parce qu’on sait très bien qu’il y a des gens, malheureusement, qui ne sont pas pour leur venue ici" indique-t-il.
Des réunions sans débouchés concrets
Le 27 mai dernier, un rendez-vous a eu lieu entre les jeunes migrants et le personnel du rectorat de Rouen. "C’était pour interpeller encore une fois le rectorat sur nos situations de scolarisation" souligne le porte-parole du collectif.
D’après lui, la réunion s’est "très mal passée". Le rectorat a refusé leur demande d’affectation dans un établissement scolaire mais a néanmoins mis en place un dispositif de cours de français et de mathématiques "jusqu’au 4 juin". "Ce n’est pas quelque chose que l’on a demandé. On souhaite être affecté dans les écoles et on espère juste que la rectrice nous inscrive pour débuter les cours l’année prochaine" argue avec détermination Doss.
Une nouvelle réunion doit se tenir ce lundi 2 juin avec des responsables du département.


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