À l’approche des vacances d’été, la SNSM organise les Journées nationales des Sauveteurs en Mer samedi et dimanche. L’occasion comme chaque année de sensibiliser le grand public aux risques et à la sécurité en mer. Mais ces deux jours célèbrent aussi le bicentenaire de la naissance du secours en mer en France.
Il y a 200 ans, la première station de sauvetage en mer de France voyait le jour dans le Pas-de-Calais. Auparavant, les secours aux marins existaient bien, mais de façon sporadique. "Ils étaient organisés principalement par les paroisses et les diocèses littoraux. À cette époque-là, c'était souvent la barque des pêcheurs, mais il n'y avait pas de structure", rappelle Emmanuel De Oliveira, président national de la Société nationale des sauveteurs en mer.
Mais les choses changent en 1825. On voit à Boulogne-sur-Mer la première station de secours organisée et structurée. Pourquoi 1825 ? "Parce que c'est le moment où se sont développés les premiers transports massifs de passagers par voie de mer. Ce sont les premières migrations, en particulier vers le continent américain entraînant un certain nombre de drames" poursuit Emmanuel De Oliveira. Prenant conscience de ces drames, les Anglais, dès 1824, ont créé leur structure de sauvetage.
C’est justement des Britanniques restés dans le Pas-de-Calais, après l’occupation anglaise, consécutive à la défaite de Napoléon 1er, qui ont impulsé la création de cette toute première station de secours française. "L'Église anglicane s'était bien entendu aussi implantée ici. Dans le cadre d'une prêche, le curé de la paroisse a suggéré que le port fasse comme en Angleterre et organise institutionnellement les secours en mer. La société humaine a été constituée par un groupe de Français et de Britanniques", raconte Gérard Barron, président de la station de Boulogne-sur-Mer.
Le phénomène des bains de mer dès les années 1820 a aussi joué un rôle dans la création des secours en mer, car une infime minorité des gens savaient nager. "Pour la première fois, les gens se mettaient à l'eau dans la mer au début pour se soigner et ensuite pour leur plaisir, avec tous les accidents qui pouvaient survenir. Et donc, la première station de sauvetage, elle a été organisée d'une part sur les bains de mer et d'autre part sur le sauvetage des navires", détaille Emmanuel de Oliveira. Les moyens au 19e siècle se concentrent d’ailleurs d’abord sur les plages avant de se tourner vers le large.
La première station de sauvetage, elle a été organisée d'une part sur les bains de mer et d'autre part sur le sauvetage des navires
En 1833, à Boulogne-sur-Mer, est actée la construction d'une baleinière insubmersible permettant d'aller secourir les gens plus loin. "Tout au long du XIXe siècle, ces moyens étaient mus à la force des bras. C'étaient des bateaux à rames qui ne pouvaient pas aller très loin et ils n'y allaient pas très vite aussi", précise Gérard Barron. "C'est à partir du moment, au début du XXe siècle, que des moteurs ont été introduits sur les canots de sauvetage, que le rayon et la rapidité de l'intervention a augmenté. Et aujourd'hui, nous avons des moyens qui peuvent intervenir à 40 nœuds", explique le sauveteur. Pas de radio, ni de radar évidemment, et les alertes aux secouristes se faisaient par une cloche ou un coup de canon.
Petit à petit, d’autres sociétés analogues à celle de Boulogne-sur-Mer vont voir le jour, sur le littoral : en 1834 à Dunkerque, suivie de celle de Calais, Rouen, le Havre ou Bayonne en 1839, en Provence en 1863 et Cherbourg en 1865. La même année, un début de centralisation apparaît en France lorsqu’est fondée la Société centrale de sauvetage des naufragés, avec la création de nombreuses stations en Bretagne comme Saint-Malo. Groix et Ouessant en 1866 et Sein en 1867.
En 1883, voit également le jour la Société des hospitaliers sauveteurs bretons. Ces deux grandes sociétés vont fédérer les différentes stations durant un siècle. Puis en 1967, elles fusionnent et deviennent la Société nationale des sauveteurs en mer. La SNSM, aujourd’hui, compte 206 stations de sauvetage sur tout le territoire français (métropole et outre-mer). Aujourd’hui, les moyens sont rapides, les canots spécialisés, l’alerte est coordonnée par les Cross et arrive directement sur les portables de secouristes bénévoles.
"Dès le début, même sous l'Ancien Régime, le principe, c'était le bénévolat et la gratuité des secours. C'est quelque chose qui constitue notre ADN et qui a perduré depuis plus de 200 ans. C'était fondé sur un principe qui était la solidarité des gens de mer. Il n'a pas bougé, n'a pas varié", souligne Emmanuel de Oliveira. Cela s'accompagne du courage et du dévouement des 11 000 sauveteurs en mer que compte aujourd’hui la SNSM.
"Le sauveteur en mer, lorsqu'il part, sait qu'il prend un risque et ce risque, ça peut être sa vie", souligne le président de la SNSM. Le 7 juin 2019, trois sauveteurs de la station SNSM des Sables-d'Olonne ont ainsi perdu la vie dans le naufrage de leur canot en portant secours à un bateau de pêche en difficulté.
Le sauveteur en mer, lorsqu'il part, sait qu'il prend un risque et ce risque, ça peut être sa vie
L’an passé la SNSM a pris en charge près de 30 000 personnes, au large, sur le littoral et à terre. Dans le nord de la France, ils interviennent notamment pour venir au secours des multiples embarcation de migrants tentant la traversée de la Manche. "Nous portons secours aux personnes qui sont en difficulté en mer et nous ne portons jamais de jugement sur les motifs qui les ont placés en difficulté", conclut Emmanuel et Oliveira. La SNSM, pour son fonctionnement, est financée à 60 % par des ressources privées issues de la générosité du public et des entreprises, à 26 % par les subventions publiques.
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