Magazine littéraire en lien avec l'association de promotion de la lecture "Lire à Saint-Étienne".
Roland Boudarel
" Place Médard " (La Découverte)
Juillet 1890. Épouse charmante et respectable, Gwenn aurait dû naître, grandir et mourir dans son village du Finistère. Mais lorsque son chemin croise celui d'un artiste, son existence chavire.
Alors qu'elle vend son lait sur la place Médard, cet homme croque son portrait. Pour cet affront, son mari la marque au fer rouge.
Pendant plus d'un siècle, de Quimper à Paris, Florence ou Sétif, ses descendantes porteront cet héritage tragique dont elles ignorent tout.
Les chroniques de Jacques Plaine
ROLAND BOUDAREL Place Médard Librinova Né à Saint-Étienne, Roland Boudarel a fait ses études à Valbenoîte, Tezenas-du-Montcel puis à l’université Jean Monnet où il a soutenu un DEA consacré à la femme du XXème siècle à travers l’œuvre des frères Goncourt. En pays bigouden, mariée sans amour, Gwenn n’en menait pas moins une vie heureuse avec ses vaches. Et pourtant ! Le crabe avait emporté sa mère quand elle avait cinq ans et son père avait disparu avant même sa naissance laissant en héritage une sanguine rapportée de Florence. Chaque semaine – poussant ou tirant un lourd char à bras – elle allait vendre son lait, place Médard à Quimper. Et un jour, un jour à marquer d’une croix plutôt noire que blanche, un peintre - avec chevalet, boite à pinceaux et à peintures - passa par là . Séduit par sa beauté, il décida de faire son portrait « à l’huile comme les plus grands maîtres hollandais ». Une audace pire qu’un viol en cette fin de XIXème siècle. « Ta tête est déshonorée pour la nuit des temps » hurlera le mari - quand le plus malveillant des malveillants l’informera de la chose - avant de la marquer au fer rouge. Sur un sein, un seul « pour que si un jour je te mets grosse, tu puisses offrir la mamelle restante à téter ». C’était en juillet 1890, une hache traînait par là et elle en fit usage. Ensuite ce sera la honte, la prison, le procès, les assises, le bagne, la Nouvelle Calédonie. Une sale histoire, une triste affaire à oublier et à faire oublier. Même Ronan n’en saura rien. Ronan son fils né pendant le procès et élevé comme un orphelin dans un couvent de bonnes sœurs. Des cornettes qui – le jour où il prendra son envol - glisseront la fameuse sanguine dans son baluchon. Ensuite, de génération en génération, de fille en fille, de descendante en descendante, chacune aura son histoire. Des aventures que chacune racontera à sa façon et à la première personne. De bonnes ou mauvaises fortunes, sans passé, ni ancêtres, enrubannées d’un arbre généalogique sans branches ni racines. On en retrouvera en Toscane et en Algérie d’hier et d’aujourd’hui. On en rencontrera d’autres à Montparnasse, au lac Annecy, à Lyon et à Saint-Étienne puis le hasard ramènera la dernière à Quimper. À Quimper, où au musée de la ville trône « La laitière de la place Médard » un tableau peint en 1890, place Médard.
Bénédicte des Mazery
" L'intrus " (Plon)
Élise et Romain forment un couple heureux : bons jobs, un appartement, une vie ponctuée par le déjeuner du dimanche avec Mina, la mère d'Élise. Jusqu'au jour où Élise se découvre enceinte. Pas question de garder cet intrus, elle n'a jamais voulu d'enfant. Elle va avorter. Mais à la consultation, Élise découvre qu'elle est enceinte de sept mois. Terrorisée, elle s'enferme dans le mutisme. Pour éveiller en elle l'instinct maternel, Romain lui offre un reborn baby. Et Mina s'installe chez eux pour apprendre à sa fille les gestes d'une mère sur ce bébé de silicone, si semblable à un vrai, si rassurant. Tout semble rentrer dans l'ordre, le ventre d'Élise grossit soudain. Mais à la naissance, Élise ne parvient pas à créer de lien avec son véritable enfant. Tom est "trop vivant", il l'inquiète. Plus Élise doute d'elle, plus son attachement au reborn se renforce. La mère parfaite, c'est Mina, qui prend le relais de sa fille auprès de son enfant malgré les réticences de Romain. Au fil des jours, tandis que Tom se laisse dépérir aux côtés du reborn immuable, les rôles de chacun deviennent de plus en plus confus, jusqu'à ne plus savoir ce qui se joue réellement… L'intrus n'est pas forcément celui qu'on croit.
Chronique de Jacques Plaine
BÉNÉDICTE DES MAZERY L’intrus Plon Écrivain, journaliste, auteur de documentaires télévisuels, Bénédicte des Mazery a reçu le prix Paul Féval de la Société des gens de lettres pour son roman « Les Oiseaux de passage ». En 2009 elle fut aussi finaliste du prix Charles Exbrayat avec « La Vie tranchée ». Lorsque Romain son cher mari lui avait proposé d’acheter une voiture, elle avait dit non. Il n’en avait pas moins fait l’acquisition d’une magnifique limousine qu’elle avait mise illico au garage. Puis quand un autre jour il avait parlé « maison » elle avait encore dit non, précisant « que son corps se crispait à l’idée de posséder ». Ils n’en avaient pas moins signés tous les deux « un crédit sur vingt ans pour un très bel appartement ». Même réponse sans nuances quand il avait été question de descendance. C’était non, toujours non. « Je n’ai pas envie de me reproduire, de fabriquer un autre être vivant, fragile, assujetti aux aléas d’une famille et de la vie, de ce monde. Je ne veux pas de ça. Jamais ! » C’était clair, net et précis, sauf qu’un jour - alors qu’elle était plate comme une planche à pain, qu’elle avait toujours pris la pilule et tous les trucs que vous savez - le gynécologue lui avait annoncé froidement la nouvelle : Madame vous êtes enceinte de sept mois et demi. Et avait rajouté question d’enfoncer le clou : « votre bébé mesure quarante centimètres et pèse déjà un kilo neuf ». Gros tsunami et mouvements divers dans la famille. Romain, le mari est ravi. Chef d’entreprise, il annonce même la nouvelle à son conseil d’administration. Mina, la mère d’Élise - qui depuis la mort de Paul son mari se considère comme une pièce maîtresse, essentielle et inamovible du ménage - est aux anges. Quant à Élise, rien de neuf dans sa petite tête de mule, elle envisage tout sauf d’être mère. Que ce soit se remettre au marathon ou faire don de son futur gamin à sa meilleure amie. La maternité non c’est pas pour elle. Avorter ? Pas ça non plus « le délai légal est dépassé ». Alors ? Alors un beau matin Romain et Élise se trouvent face à une vieille dame qui sourit à une drôle de poupée. Une poupée en silicone. Une reborn comme on les appelle dans les maisons de retraite où on compte sur elles pour amener calme et sérénité. Pour « la fille plate au ventre plein » une découverte qui change la donne.
Rolland Fournel
" La sidérurgie de la Loire " (Actes Graphiques)
L'histoire de la sidérurgie du département de la Loire depuis 1815 est riche en événements. Après un démarrage difficile la Loire occupe une place de premier plan pour la fabrication du fer et surtout de l'acier. De 1953 à 1970, des entreprises sont réunies au sein de la Compagnie des Ateliers et Forges de la Loire (CAFL), puis de 1971 à 1984 cette dernière s'allie avec les usines Schneider pour créer Creusot-Loire, dont la faillite en 1984 sera une tragédie pour notre département.
Chronique de Jacques Plaine
ROLLAND FOURNEL La sidérurgie de la Loire 1815–2022 Actes Graphiques Après « Compagnies minières et mineurs du Gier 1750– 1950 », Rolland Fournel nous propose ici un autre fleuron de l’aventure industrielle de la Loire : la sidérurgie. Au début du XIXème plus de huit mille ouvriers travaillaient le métal dans la Loire. Des armuriers, des quincailliers, des cloutiers, des couteliers mais personne n’osait s’attaquer à la fonte, au fer et à l’acier. Il faudra que James Jackson sollicité par un ministre de Napoléon 1er traverse le Chanel et s’installe à Trablaine (aujourd’hui le Chambon Feugerolles) pour que naisse en France la première fabrication d’acier fondu et que Saint-Étienne s’ouvre à la sidérurgie. Un départ insolite, Jackson déménageant ses activités au pied de la Roche Corbière un caillou que Lionel Terray escaladera avant l’Annapurna. Rolland Fournel nous raconte ces deux siècles de conquêtes et de prospérité, de marchés gigantesques générés par le développement du rail, de l’automobile et aujourd’hui du nucléaire. Deux siècles traversés par trois guerres précédées par de riches années pour des usines qui fabriquent des blindages, des chars d’assaut ou des canons de marine. Deux siècles marqués d’avancées techniques révolutionnaires - du puddlage à la coulée continue en passant par les fours électriques - mais émaillés de conflits, de crises financières, de krachs bancaires voire de grèves avec occupation d’usine. Une histoire qui verra les grandes heures des forges de Terrenoire, de Marrel, Holtzer, Claudinon, des Aciérie de la Marine, de Verdié, puis des Ateliers et Forges de Firminy, pour en arriver à la grande fusion des CAFL. Une fusion signée de cette déclaration du président des Aciéries de Firminy préférant « crever tout seul plutôt que prospérer dans le cadre d’une fusion » et celle du directeur d’Holtzer prévenant «qu’il appellerait le commissaire de police pour le mettre à la porte si quelqu’un venait lui parler de fusion ». Ensuite ce sera Creusot-Loire, les grimaces d’un certain baron suivies de celles d’un Pineau Valencienne enragé, l’État mettra alors une main à la poche puis l’autre sur les joyaux de l’affaire. Une descente aux enfers ? Sauf que le feu est le paradis de Vulcain, ce Dieu qu’on dit « sorti de la cuisse de Jupiter ».
Une émission enregistrée à la médiathèque de Saint-Etienne
Quelle mouche a donc piqué Charly Picassiette ?
À peine majeur, il veut quitter sa mère poule, leur ferme des collines, leur village. Paris l’attend, paraît-il, et puis la gloire : le garçon s’apprête à publier un « roman » très autobiographique où tous ses proches pourront se reconnaître.
Mais Madame Picassiette et ses voisins ne l’entendent pas de cette oreille : pas question de laisser le mioche gâcher sa vie et raconter la leur.
Au Chandoiseau (14 habitants, 3 chèvres), l’heure de la mobilisation générale a sonné…