Édito - S'inspirer de François d'Assise dans l'écologie intégrale, par Adrien Louandre
L'héritage de Francois d'Assise, dont la fête est ce 4 novembre, peut-il aider a une conversion écologique pour un chrétien.
Un héritage qui me semble on ne peut plus actuel aujourd’hui. Face au stress des factures à payer, à la solitude existentielle que beaucoup vivent au quotidien ou les bruits de la guerre, Laudato Si, Fratelli Tutti et les récits de vie de François d’Assise sont des boussoles pour s’orienter vers un nouvel horizon, vers une véritable révolution de la tendresse, comme la nomme le pape François. Le Poverello d’Assise, c’est en effet l’homme qui parle aux Oiseaux et au Loup de Gubbio, mais c’est aussi celui qui va voir les lépreux exclus, et le sultan ottoman en pleine croisade. Sultan qui lâchera si tous les chrétiens étaient comme François, le monde en serez transformé. Je suis intimement convaincu de cela. St François n’est pas juste chrétien par culture ou tradition, mais parce que tout au long de sa vie, il est allé pleinement à la rencontre de l’autre, il s’est converti à la rencontre des souffrances du monde. Il n’a pas fait la morale aux gens, n’est pas resté seul dans son coin, il a créé un ordre pour créer du collectif et un véritable changement social et spirituel. Plus encore : il n’a pas appelé à la haine ou à la guerre Sainte comme le font le patriarche Kirill ou, la semaine dernière, un prêtre orthodoxe sur la place Rouge, il a osé la paix par la rencontre de l’autre dans sa pleine humanité.
L’écologie intégrale c’est changer ses comportements de manière bien plus profonde et intime que juste trier ses déchets ?
J’entendais hier soir l’ancienne déportée Ginette Kolinka expliquée que chaque atome de haine que l’on a pour l’autre, c’est déjà avoir un pied dans Auschwitz. Cela me fait écho à cette phrase d’Etty Hillesum dans son journal, elle aussi déportée mais qui n’a pas survécu, permettez-moi de la citer longuement puisque c’est le cœur de ce que je voudrais évoquer dans cet édito :
“La saloperie des autres est aussi en nous. Et je ne vois aucune autre solution, vraiment aucune que de rentrer en soi-même et d’extirper de son âme toute cette pourriture. Je ne crois pas que nous puissions corriger quoi que ce soit dans le monde extérieur que nous n’ayons d’abord corrigé en nous. L’unique leçon de cette guerre est de nous avoir appris à chercher en nous-mêmes et pas ailleurs.”
Sans détour je le dis : mon église et bien des églises chrétiennes me font souvent honte, je me demande souvent ce que je fais-là et s’il n’était pas possible de vivre ailleurs ma foi intime. Je suis glacé quand j’entends la haine de ce prêtre à Moscou appeler à la guerre sainte ou dégoûté par le nombre d’abus spirituels qu’il y a dans nos églises et sidéré par toutes ces fois où l’idéologie désincarnée prend le pas sur les réalités de M. ou Mme tout le monde. Il apparaît souvent que l’on préfère se cacher pour garder ses certitudes quitte à rejeter celui qui n’est pas comme nous. Ces cas sont toutefois plutôt extrêmes et disons-le : minoritaires sur le terrain.
Je ne peux me résigner à ce que ce soit de cela que l’on parle principalement parce qu’en cette fête de François d’Assise demain, je constate régulièrement sur le terrain que l’immense majorité des chrétiens ont commencé cette conversion du cœur à laquelle le saint d’Assise nous invite par sa vie. Je voudrais ici remercier toutes celles et tous ceux qui ne font pas que de parler de l’évangile, mais le vivent pleinement, voire même en rayonne. Ce sont souvent des gens simples : peut-être vous cher auditeur, chère auditrice. En effet, comme me le disait si bien mon père spirituel d’une époque : la frontière entre le bien et le mal passe en chacun d’entre-nous. Oui, la sainteté ne s’acquiert pas par des gens parfaits, heureusement sinon ça ne serait pas pour moi, mais par la vie des gens de tous les jours. Oui tant de gens luttent en eux-mêmes contre les racines de nos misères, qu’elles soient matérielles, relationnelles, psychologiques ou spirituelles.
Ainsi, face à temps de violences, gardons à l’esprit cette espérance : chaque jour, des forêts d’actions et de changements positifs poussent, extirpant d’elles-mêmes leurs mauvaises herbes, cette “saloperie” mentale qu’évoque Etty Hillesum qu’est la haine. Un arbre qui tombe fait plus de bruit qu’une forêt qui pousse. Cette forêt continue de pousser, de s’enrichir de tant d’expériences et de visages. Donnons la Parole à ce qui pousse en silence afin que ces voix recouvrent les bruits de haine et souvent, nos propres bruits de haine.
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- Édito29 septembre 2022
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