
Alors que prolifèrent les « fake news » et les contenus générés par l’intelligence artificielle, comment l’annonce de la résurrection à Pâques aurait-elle été accueillie de nos jours ? La question pose, profondément, notre rapport à la confiance et à la rencontre.
Ce matin, au moment où les chrétiens entrent dans le triduum pascal, ce sont deux informations d’une importance cruciale qui méritent d'être commentées.
La première, c’est difficile d’y échapper, elle fait les gros titres : depuis des mois, un homme trouble l’ordre public, manipule les foules et menace les institutions. Pour qui se prend-il ? Les autorités sont inquiètes, la population manifeste, les politiques doivent se positionner, la justice doit réagir ! Arrêté, jugé, condamné : que ce Jésus meure, et qu’on n’en parle plus !
Et puis, dans la nuit de samedi à dimanche, viendra une seconde information. Le Christ va ressusciter… Mais contrairement à sa mort, cet événement-là va se dérouler en silence, loin des regards. Son annonce se diffusera comme une rumeur fragile, de bouche de femme à oreille d’apôtre, avec son lot de réticences, d’incrédulité et de craintes. Journalistiquement parlant, avouez que le storytelling n’est pas terrible.
Emballement médiatique contre nouvelles discrètes… Il est vrai qu’on pourrait se demander comment tout cela se serait passé de nos jours, à l’heure de l’info en continu et des « fake news »…
Certes, l’exercice est un peu vain. Mais il peut tout de même nous interroger sur notre époque, qui dispose de multiples outils de vérification… et de presque autant de moyens de falsification. Sommes-nous mieux ou moins bien équipés qu’hier pour croire à ce qui nous dépasse ? À l’ère du complotisme, des cellules spécialisées dans les « faits alternatifs » (en français, on dit aussi « mensonges »), du buzz et des clashs, est-ce que le témoignage ferait plus de bruit et autant de bien qu’il y a 2000 ans ?
Les progrès de l’IA en termes de génération de contenus, toujours plus faciles à créer et à diffuser, toujours plus réalistes et troublants, vont conduire à une multiplication des fausses infos, souvent propagées de bonne foi. C’est une révolution explosive, car elle bouleverse notre rapport à la vérité. Avec des documents, des images, des sons et des vidéos créés de toutes pièces, c’est non seulement notre confiance les uns dans les autres qui est mise à mal, mais surtout la confiance dans nos propres sens… Au risque de nous enfermer toujours plus dans le relativisme et l’individualiste, repliés sur des bulles homogènes et nous méfiant de l’extérieur.
Bien sûr, et d’ailleurs, dans le récit de la Passion du Christ, il est plusieurs fois question d’« imposture » ; au point que les pharisiens réclament des gardes devant le tombeau de Jésus, de peur que les disciples ne mettent en scène… sa résurrection. Mais, malgré cela, malgré même le manque de foi de certains témoins, l’événement va s’imposer comme une évidence.
Pourquoi ? Parce que dès le départ, le christianisme repose sur la rencontre personnelle et le témoignage, la confiance donnée dans une Parole qui s’incarne, plus encore que dans les signes accomplis. Cette singularité, cette vérité humaine, souvent maladroite, cette capacité à s’abandonner, aucune machine ne saura jamais la falsifier. Car l’être humain ne peut pas vivre en doutant de tout.
Alors… fausses nouvelles contre Bonne Nouvelle ? La leçon de la Résurrection est aussi celle d’un nécessaire saut de la foi : l’espérance tient ses promesses, elle nous rapproche, et surtout elle est pour tous.
Des chroniqueurs d'horizons variés nous livrent leur regard sur l'actualité chaque matin à 7h20, dans la matinale.
- Le lundi : Stéphane Vernay, directeur de la rédaction de Ouest-France à Paris, et Arnaud Benedetti, rédacteur en chef de La revue politique et parlementaire ;
- Le mardi : Corinne Bitaud, agronome et théologienne protestante, et Marie-Hélène Lafage, consultante en transition écologique auprès des collectivités territoriales ;
- Le mercredi : Clotilde Brossollet, éditrice, et Pierre Durieux, essayiste ;
- Le jeudi : Antoine-Marie Izoard, directeur de la rédaction de Famille chrétienne ; Aymeric Christensen, directeur de la rédaction de La Vie ;
- Le vendredi : Blanche Streb, essayiste, chroniqueuse, docteur en pharmacie, auteure de "Grâce à l’émerveillement" (éd. Salvator, 2023), "Éclats de vie" (éd. Emmanuel, 2019) et "Bébés sur mesure - Le monde des meilleurs" (éd. Artège, 2018), et Elisabeth Walbaum, Déléguée à la vie spirituelle à la Fédération de l'Entraide Protestante.
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