
Derrière les droits de douane de Donald Trump, et la fébrilité économique qu'ils provoquent, même s'il a fini par en repousser l'application, ou encore la crise politique en France après la condamnation de Marine Le Pen, c’est au fond toujours le même mal qui rôde : le ressentiment et la colère.
D’un côté, la guerre commerciale de Donald Trump ; de l’autre, les débats autour de la peine d’inéligibilité de Marine Le Pen. Deux faits majeurs d’actualité, qui illustrent selon Aymeric Christensen une tendance moralement indéfendable…
Décidément, « il y a quelque chose de pourri », et pas seulement au royaume du Danemark ! Si je me permets de convoquer Hamlet ce matin, c’est bien parce qu’il est question de corruption, à la racine même de notre époque.
Prenez les droits de douane brandis par le président américain. Ils ne relèvent même pas d’un débat – au fond, légitime – entre protectionnisme et libre-échange. Non. Ils s’appuient sur une croyance folle et revancharde : l’idée que la mondialisation serait tournée contre son pays… alors que c’est justement cette mondialisation qui lui a permis de bâtir sa puissance et d’imposer partout son modèle.
Dans le même temps, le Rassemblement national s’insurge contre la condamnation de Marine Le Pen, qui devrait l’empêcher d’être candidate à la prochaine présidentielle, donc. C’est un comble qu’une peine judiciaire suscite plus d’indignation que la fraude avérée qui l’a méritée ! Comme si la droiture et la justice étaient subordonnées à des intérêts ou des aspirations. Comme si la dénonciation de la corruption n’était qu’un prétexte, qu’elle ne valait que chez les autres.
Le RN, pour détourner les regards de ses fautes, préfère capitaliser sur la colère de ses électeurs. C’est politiquement habile, sans doute, mais c’est aussi une pente dangereuse. Le ressentiment est une substance inflammable. Le fait même de l’exciter devrait disqualifier pour l’exercice de toute responsabilité. Du moins… si on croit un minimum à la valeur de l’honnêteté.
Oui, et pas seulement aux États-Unis ou en France. La colère est sans doute un bon carburant populiste, mais elle n’a qu’un seul horizon : l’entre-dévoration. L’envie et la rancœur ne produisent qu’amertume et désir de revanche. Et la démocratie s’abîme, rongée par ces parasites.
Mais ce sont aussi les grands symptômes d’une époque qui se plaît à tenir le compte scrupuleux des humiliations, des dominations, des ingratitudes, des torts établis et présumés, des perdants, des coupables, sans oublier les boucs émissaires… Ce chemin, en somme, qui mène tout droit à la guerre civile, tout droit à la guerre mondiale. Est-ce bien la voie que nous voulons emprunter ?
Bien sûr, et je la puise dans le récit de la Passion, que nous entendrons dès dimanche. Vous savez, l’histoire d’un homme accueilli triomphalement à Jérusalem et peu après mis à mort sous les cris de la même foule.
Mais cette victime, la vraie victime, n’a aucun esprit de revanche. Sur la croix, ses bras sont grands ouverts. À contre-courant de l’égoïsme, du ressentiment et du repli, le Christ nous rappelle que nous pouvons devons, toujours, poser des gestes de réconciliation, de réparation et de communion. Et surtout, que même au plus sombre de la pourriture, il y a toujours une graine qui ne demande qu’à germer.
Des chroniqueurs d'horizons variés nous livrent leur regard sur l'actualité chaque matin à 7h20, dans la matinale.
- Le lundi : Stéphane Vernay, directeur de la rédaction de Ouest-France à Paris, et Arnaud Benedetti, rédacteur en chef de La revue politique et parlementaire ;
- Le mardi : Corinne Bitaud, agronome et théologienne protestante, et Marie-Hélène Lafage, consultante en transition écologique auprès des collectivités territoriales ;
- Le mercredi : Clotilde Brossollet, éditrice, et Pierre Durieux, essayiste ;
- Le jeudi : Antoine-Marie Izoard, directeur de la rédaction de Famille chrétienne ; Aymeric Christensen, directeur de la rédaction de La Vie ;
- Le vendredi : Blanche Streb, essayiste, chroniqueuse, docteur en pharmacie, auteure de "Grâce à l’émerveillement" (éd. Salvator, 2023), "Éclats de vie" (éd. Emmanuel, 2019) et "Bébés sur mesure - Le monde des meilleurs" (éd. Artège, 2018), et Elisabeth Walbaum, Déléguée à la vie spirituelle à la Fédération de l'Entraide Protestante.
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