
Hauts-de-France
L’Homme aime surprendre, jouer avec les apparences et créer des illusions. La prestidigitation, cet art de faire croire à l’impossible, en est un bon exemple. Derrière les tours de magie, il ne s’agit pas seulement de divertissement, ces gestes rapides et ces ruses bien pensées nous parlent aussi de la manière dont l’Homme comprend le monde. Une émission Je pense donc j’agis présentée par Melchior Gormand.
L’Homme a toujours aimé jouer avec la réalité. Tromper l’œil, faire surgir l’inattendu, détourner l’attention pour mieux étonner, la prestidigitation, cet art de l’illusion, fascine depuis des siècles. Mais au-delà du divertissement, la magie révèle quelque chose de profond sur notre manière de percevoir le monde. Elle nous confronte à nos limites cognitives
L’être humain à depuis toujours chercher à s’émerveiller.“Il y a un besoin d’émerveillement”, affirme Alexandre Denis, prêtre et prestidigitateur. Pour lui, la magie est là pour divertir, mais surtout pour établir une relation. “C’est un outil qui m’a aidé à entrer en relation avec les autres", partage Cyril Thomas, magicien et maître de conférences en psychologie cognitive. Voir un tour de magie, c’est aussi accepter de vivre un rêve éveillé, tout en sachant que ce n’est pas réel. “Il faut faire le pacte de faire semblant”, explique-t-il. C’est cette suspension volontaire de l’incrédulité qui rend l’expérience magique.
Il y a un besoin d’émerveillement.
Cet émerveillement est un outil, un moyen de construire une relation avec le spectateur. “L’effet est vraiment dans la relation plus que dans le tour”, insiste Alexandre. Le spectateur accepte de suspendre son incrédulité, pour vivre un rêve éveillé. “Il faut faire le pacte de faire semblant” explique Cyril Thomas. C’est dans cette faille volontaire que naît la magie.
La magie est aussi une façon de raconter quelque chose. Un tour n’est pas un simple effet, mais une construction. “Un numéro contient un début, un développement et une fin”, précise Alexandre Denis. Comme au théâtre, où l’illusion est souvent utilisée comme un effet spécial, la magie raconte une histoire, détourne l’attention pas dans le but de tromper, mais dans le but d’émerveiller.
“On voit moins de choses qu’on ne le croit”, affirme André Didierjean professeur de psychologie cognitive à l’Université Marie et Louis Pasteur à Besançon. C’est sur cette faiblesse que les magiciens s’appuient. La psychologie cognitive, qui étudie notamment la mémoire et le raisonnement, permet de comprendre pourquoi l’illusion fonctionne. Notre cerveau reconstruit les informations manquantes en s’appuyant sur ce qu’il connaît déjà, quitte à inventer ce qui n’existe pas.
Les magiciens manipulent notre perception. “Le spectateur doit oublier qu’on a détourné son attention”, explique Alexandre Denis. L’art consiste à amener le regard à un endroit précis, rendant invisible ce qui se passe à côté. Ces mécanismes sont aussi ceux utilisés par les pickpockets, preuve que cette manipulation a des limites et peut être utilisée à des fins de nuire.
Les illusions nous rappellent que notre perception est faillible. Le spectateur vient à un spectacle de magie non pas pour comprendre, mais pour se mettre volontairement dans une situation d’incertitude. “Les gens savent qu’ils ne vont pas comprendre”, affirme André Didierjean. Cette mise en doute de la réalité fait partie intégrante de l’expérience, les personnes souvent rationnelles apprécient cette confrontation à l’irrationnel.
“La magie existe partout, même dans la nature, c’est de la ruse”, affirme Cyril Thomas, co-auteurs avec André Didierjean du livre Les secrets de la prestidigitation - Comment les magiciens manipulent notre esprit, aux éditions Odile Jacob. Les animaux ont des stratégies de camouflage qui relèvent de la prestidigitation, c'est une manipulation de la perception. Cette idée se retrouve aussi dans la vie quotidienne car face à un choix, on choisit souvent pour ce qui demande le moins d’effort et c’est un principe que les magiciens exploitent habilement.
Les magiciens utilisent les failles de notre cerveau, souvent sans en être totalement conscients. “Ce n’est pas parce qu’on est fort qu’on est conscient à 100 % de ce qu’on fait”, explique André Didierjean. Leur savoir est parfois plus instinctif que réfléchi. Mais certains, comme Alexandre Denis, disent bien maîtriser ce qu’ils font. Pour lui, un tour de magie est comme un puzzle, chaque geste est réfléchi, précis, et doit paraître naturel. Cela demande de la rigueur, de la logique et une bonne connaissance de la manière dont on perçoit ce qui nous entoure.
La frontière est mince entre illusion et manipulation. Utilisée à mauvais escient, la magie peut devenir dangereuse : voyance et spectacles privés jouant sur le mentalisme. “Il y a une manière de faire de la magie juste pour faire croire qu’on a des pouvoirs”, prévient Alexandre Denis. Le consentement devient alors important. “Certains n’aiment pas se faire manipuler”, note Cyril Thomas. Le bon usage de la magie repose sur un pacte bien défini, faire semblant, ensemble, pour mieux s’émerveiller.
Cette émission interactive de deux heures présentée par Melchior Gormand est une invitation à la réflexion et à l’action. Une heure pour réfléchir et prendre du recul sur l’actualité avec des invités interviewés par Véronique Alzieu, Pauline de Torsiac, Stéphanie Gallet, Madeleine Vatel et Vincent Belotti. Une heure pour agir, avec les témoignages d’acteurs de terrain pour se mettre en mouvement et s’engager dans la construction du monde de demain.
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