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Didier van Cauwelaert : "Chanter est le meilleur des euphorisants !"

Didier van Cauwelaert : "Chanter est le meilleur des euphorisants !"

Un article rédigé par Vincent Belotti - RCF, le 14 septembre 2025 - Modifié le 14 septembre 2025
Il était une joieDidier Van Cauwelaert : "Chanter est le meilleur des euphorisants !"

C'est l’un des auteurs les plus prolifiques de sa génération, avec un titre par an en moyenne depuis ses débuts en 1982. Un univers original fait de reconstruction individuelle, passion complexe, mais aussi part de surnaturel et préservation de l’environnement. "L'impasse des rêves", son dernier roman largement autobiographique, vient de sortir aux éditions Albin Michel. L’occasion de revenir sur une carrière dense, couronnée par un prix Goncourt et de percer les petits secrets de bonheur d’un écrivain à ne pas déranger  ... au saut du lit !

© Albin Michel© Albin Michel

Un jeune écrivain reçoit par erreur le manuscrit d’une jeune femme dans lequel elle projette de tuer son mari. Piqué par la curiosité, il décide de la rencontrer. C’est le point de départ de "L'impasse des rêves", histoire où le jeune auteur en question n’est autre que ... Didier van Cauwelaert lui-même. Fiction ou réalité ? L’intéressé sourit : "Ce livre est parti d’une situation qui m’a complétement marqué : c’est ce point de rencontre entre les deux passions de ma vie : celle de la littérature et puis le fol espoir de rencontrer l’âme sœur. Et là, tout à coup, les deux sont liés ». Un roman largement autobiographique en forme de réflexion sur le pouvoir de l’écriture, qui peut détruire ou renforcer une vie.

Etre publié pour "sauver son père"

L’écriture d’ailleurs, elle a commencé vers 8 ans pour ce fils d’avocat né à Nice. C’est en entendant son père menacer de se tuer après un grave accident de la route qu’il décide de devenir le plus jeune écrivain publié au monde "pour lui donner envie de rester vivant même sur un fauteuil roulant." Si la médecine l’a finalement sauvé, c’est seulement à 22 ans que Didier van Cauwelaert connaitra son premier succès avec "20 ans et des poussières" avant d'être couronné par le Prix Goncourt  94 pour "Un aller simple". Tout un parcours que l'on suit dans ce dernier roman ""L'impasse des rêves" carrière d’écrivain, avec ses hauts et ses bas, s'entremêle avec cette relation passionnelle et complexe qui va le lier à la mystérieuse inconnue du début ...

Questions bonheur

Quand vous vous levez le matin, est-ce que c'est tout de suite de bonne humeur, genre, "Les copains d'abord" pour reprendre Georges Brassens que vous appréciez, ou c'est plutôt "Gare au gorille" : attention : on ne m'approche pas tant que je n'ai pas bu mon café ou mon thé ? 

 C'est vrai que je me réveille très tôt. Et puis un moment très important, c'est le moment de transition entre les rêves, entre ce qui s'est passé pendant la nuit. Surtout que je m'endors souvent en travaillant dans ma tête, donc je vois s'il y a eu des réponses aux problèmes que je me pose par rapport à ce que j'écris. Ou des problèmes liés à.… la "vie réelle" entre guillemets. Donc, il y a toujours un moment, un petit sas avant de se lever, où on fait le point sur la nuit, on essaie de retrouver le souvenir des rêves. Et après, c'est me lever tout de suite et me mettre à écrire le plus tôt possible. C'est-à-dire, par exemple, ne jamais me raser avant. Un thé vert, un biscuit et au boulot !

Et on peut vous approcher ou pas à ce moment-là ?

 Il ne vaut mieux pas, non ! (sourires) De la même manière que je ne laisse pas le monde m'approcher. Jamais je ne mettrai la radio, les informations. Ce sas-là est très important. 

Quand vous avez un petit coup de déprime, et il y en a dans la carrière d'écrivain, quand l'éditeur ne vous rappelle pas, par exemple, qu'est-ce que vous faites pour vous remonter le moral ? 

Je chante des chansons. On a parlé de Brassens. Il y aussi Charles Trenet, le meilleur des antistress et des anti dépresseurs que je connaisse. Mais les vibrations qu'on provoque quand on chante dans le corps, c'est le meilleur des euphorisants

Et vous chantez juste ? 

Relativement !  Je suis un chanteur de salle de bain. Il  y a des choses que je suis incapable de chanter, mais ce que j'aime, je le chante bien !

Quel est l'endroit qui vous ressource, autrement dit, où vous vous sentez bien ? 

Je pense que c'est mon jardin ou la mer. Je me baigne toute l'année, à chaque fois que je peux. Et puis, dans mon jardin, notamment, j'avais une passion pour un vieux poirier de 400 ans, dont j'ai raconté l'histoire dans "Le journal intime d'un arbre ", le jour où il est tombé. L’endroit est aujourd'hui complètement recouvert de pelouse, On ne soupçonne pas qu'il y avait sa présence. Mais c'est l'endroit où je me poste. Et je ne sais pas si c'est subjectif, si c'est réel, mais je sens l'énergie de cet arbre qui me traverse encore. Ce sont des moments de bonheur, de reconnexion, de souvenirs et de provision d'énergie pour l'avenir à laquelle je suis très sensible. 

"Auprès de mon arbre", on en revient encore à Georges Brassens. Je vivais heureux …

Plutôt, "À la place de mon arbre" ! C'est là pour tout vous dire que je fais ma gymnastique du matin, quel que soit le temps extérieur.

 Question gratitude. Est-ce qu'il y a une personne qui a beaucoup compté pour vous, dans votre vie personnelle ou professionnelle et à qui, aujourd'hui, vous avez vraiment envie de dire merci ? 

C'est un peu ce que j'ai fait dans "L'impasse des rêves" en parlant de mes premiers éditeurs, qui étaient Jean-Marc Roberts et ensuite... Richard Ducousset, Francis Esménard. Ce sont ceux qui sont les accoucheurs d'un auteur. Ce rapport-là, j’ai eu la chance de le vivre avec des personnes exceptionnelles. Jean-Marc Robert nous a quittés il y a trop longtemps, mais il est toujours d'une présence très forte. Et ceux qui l'ont suivi ne l'ont pas remplacé, mais l’ont complété. Il est rare qu'un auteur remercie profondément ses éditeurs. Pour aussi la qualité humaine, qui est pour moi indispensable au-delà des qualités professionnelles.

Je pensais aussi à Michel Legrand, le célèbre compositeur qui a fait la musique du "Passe-muraille" de Marcel Aymé, que vous avez adapté au théâtre et qui est devenu votre ami aussi. 

Oui, ensemble et autant d'amitié. C'était quelqu'un d'aussi génial qu'insupportable et indispensable. Michel, il a cette qualité, cette délicatesse extraordinaire des gens qui sont morts en pleine possession d'eux-mêmes. Et ça, c'est un cadeau merveilleux qu'on fait. On avait encore douze ouvrages à faire ensemble. On avait fait des calendriers. C'est à la fois tellement injuste qu'il soit parti si vite et en même temps, il est parti en telle forme, au sommet de lui-même, qu'il est toujours présent de cette manière-là dans mon cœur. 

Pour terminer, Didier van Cauwelaert. Vous connaissez le dicton "Pour vivre heureux, vivons cachés" , mais pour vous, "pour vivre heureux, il faudrait vivre comment "? Pas en faisant "L'impasse sur nos rêves", en référence au titre de votre roman ?

Non, parce que d'abord, l'impasse, ce n'est pas forcément un terme négatif. C'est aussi l'endroit où on peut se réfugier et où on peut sortir aussi, quand on veut et où on peut revenir. Mais il y a une formule, et je ne sais plus de qui elle est, mais qui, pour moi, résume tout ce que je peux répondre à votre question : il faudrait toujours travailler comme si on avait l'éternité devant soi. Et vivre chaque jour, comme si c'était le dernier.


"L'impasse des rêves" de Didier van Cauwelaert, publié aux Editions Albin Michel

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Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
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