Mobilité au quotidien : comment améliorer les déplacements en ville et à la campagne ?
Embouteillages, transports en commun saturés, routes mal entretenues, zones peu desservies… Et si notre manière de nous déplacer au quotidien était complètement dépassée ? La mobilité au quotidien diffère fortement selon que l’on habite en ville ou à la campagne.
© FreepikEntre les centres urbains qui étouffent sous le poids de la circulation et les zones rurales oubliées des grands plans de mobilité, le constat est sans appel : ville comme campagne, personne n’est vraiment gagnant. Pourtant, repenser la mobilité ne relève plus du luxe, mais de l’urgence. Quelles solutions pour un accès équitable, durable et efficace à la mobilité ? Quels modèles hybrides pour concilier les besoins des citadins pressés et des ruraux isolés ?
La mobilité urbaine, riche mais saturée
Dans les centres-villes, la mobilité est très diversifiée grâce au métro, aux bus, aux trottinettes et au vélo, mais cette richesse entraîne aussi des problèmes de congestion. Comme l’explique Frédéric Héran, "dès que la ville est suffisamment dense, le trafic automobile prend tellement de place qu’on aboutit inévitablement à une congestion. Une voiture utilisée tous les jours a besoin de trois places de stationnement et occupe, rien qu’en stationnement, environ 65 mètres carrés". Cette situation illustre le coût spatial énorme de la voiture, qui limite l’espace disponible pour les piétons et les cyclistes. Isabelle Lesens renchérit en précisant que "les voitures sont de plus en plus énormes et cachent la visibilité, notamment pour les enfants. J’ai toujours considéré l’automobile un peu comme une armée d’occupation". Les villes ont néanmoins progressivement reconquis l’espace public. Frédéric Héran rappelle que "dans les années 1960, toutes les grandes villes françaises étaient saturées de voitures. Peu à peu, l’espace public a été reconquis, avec par exemple des petits poteaux à Paris qui protègent les trottoirs". Ces mesures montrent l’importance d’aménager l’espace pour tous les usagers et pas uniquement pour les automobilistes.
Le trafic automobile prend tellement de place qu’on aboutit inévitablement à une congestion.
Pour la mobilité douce, le vélo reste tributaire d’un système complet. Sandrine, une auditrice de l’Île-de-France, témoigne : "on a des beaux tronçons de pistes cyclables, et ça s’arrête d’un coup. Après, on n’est plus protégé, et il n’y a pas toujours d’endroit pour attacher le vélo". Frédéric Héran confirme que tant qu’il y a des lacunes à tous les niveaux, "ça reste compliqué et ça dissuade beaucoup de monde. Il faut que le système vélo soit complet, y compris pour le stationnement et la sécurité". Pour Isabelle Lesens, il est important de se concerter et de patienter : "il ne faut pas imposer des changements de force. On doit travailler avec les commerçants et les habitants pour organiser la voirie et hiérarchiser les axes principaux. Les centres-villes doivent être le royaume des piétons, avec des parkings à proximité et des allées agréables pour finir à pied".
La mobilité rurale, dépendante et sous-estimée
À la campagne, la mobilité quotidienne est presque exclusivement dépendante de la voiture. Frédéric Héran explique que "dans les zones rurales, on n’a pratiquement que la voiture. Les transports publics sont souvent indigents, et le réseau cyclable quasi inexistant". Le vélo y reste principalement récréatif : "à la campagne, il y a un peu de vélo utilitaire, mais surtout du vélo loisir et du cyclotourisme, avec des clubs locaux qui font leur balade le dimanche matin", précise-t-il. Isabelle Lesens souligne que cette dépendance s’explique par des infrastructures et habitudes historiques : "l’habitude de la voiture s’est imposée parce que les villages sont isolés, les routes souvent peu adaptées et les distances même courtes sont parcourues en voiture. Mais tout lieu à moins de 5 km devrait pouvoir être accessible à vélo". Elle insiste également sur la nécessité de liaisons piétonnes et cyclables sécurisées : "les enfants doivent avoir la liberté de rentrer seuls de l’école. Il faut rétablir des liaisons faisables à pied et à bicyclette, même pour des distances très courtes".
L’habitude de la voiture s’est imposée parce que les villages sont isolés, les routes souvent peu adaptées et les distances même courtes sont parcourues en voiture.
Au-delà de la mobilité, ces enjeux touchent la santé publique et la socialisation des enfants. Comme le rappelle Isabelle Lesens, "les enfants ont besoin de socialiser, de tester des choses. Et marcher ou pédaler fait partie de ce processus". Pour elle, la voiture doit être utilisée de manière raisonnée : "on ne combat pas l’automobile, elle a sa pertinence, mais elle ne doit pas servir à tout. Dans les campagnes, il faut offrir de véritables alternatives pour que chacun puisse se déplacer sans dépendre exclusivement de la voiture".
Vers une mobilité équilibrée
Ville et campagne nécessitent des approches différentes mais complémentaires. En milieu urbain, il faut hiérarchiser les voiries, développer les pistes cyclables et sécuriser le stationnement, tandis qu’en milieu rural, il est urgent de créer des alternatives pour les courtes distances et de réorganiser les axes routiers pour limiter la dépendance à la voiture. Frédéric Héran résume : "on utilise un outil surdimensionné, la voiture, pour des distances tout à fait mineures. L’objectif est de faire reculer la voiture là où elle n’est pas indispensable et de redonner de l’espace aux piétons et aux cycliste". Isabelle Le Sens conclut que "la mobilité doit être pensée pour tous, urbaine ou rurale, avec la sécurité et le bien-être de chacun au cœur des décisions".


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