Édito d'Antoine Marie Izoard - La sobriété, le nouveau mot à la mode chez nos politiques
En parallèle de la guerre en Ukraine, la France fait face à un choc énergétique. Et comme dans les années 70, suite aux chocs pétroliers de 1973 et 1978, le gouvernement tente de convaincre la France de restreindre sa consommation énergétique. Pour ça, le gouvernement répète le même mot partout : c’est la “Sobriété”.
Quel est ce nouveau mot à la mode chez nos politiciens ?
Ce mot à la mode, c’est le mot sobriété. Il faut croire que “quoiqu'il en coûte” de la crise sanitaire est bel et bien derrière nous, mort et enterré. Il laisse donc la place à la sobriété, à la modération, à la mesure. On ne s’en plaindra pas ! En fin de semaine passée, le gouvernement a présenté son plan pour mobiliser les Français sur les économies d'énergie afin d’essayer de limiter les conséquences de la hausse des prix et les risques de pénurie. Le ministre de l'Économie, la Première ministre, et puis maintenant le Chef de l'État, tous nous exhortent donc à la “sobriété énergétique”.
Et comme si le mantra répété à l'envi ne suffisait pas à l'approche d'un hiver périlleux sur fond de conflit à l'Est, la communication vestimentaire est en marche. Tous ont en effet ressorti leur col roulé. Jusqu'à Emmanuel Macron qui s'adresse à la nation avec un pull à col roulé bien visible sous son élégante veste de costume : l’exemple vient d’en haut ! D’ailleurs, quelle mère n'a pas lancé à son enfant, grelotant de froid en tee-shirt au cœur de l'hiver, un vaillant et légèrement désespéré : “enfile donc un pull !” ? Mais faut-il aujourd'hui que l'injonction vestimentaire provienne du plus haut de l'État ? La plus élémentaire des raisons semble avoir été égarées en chemin et le col roulé qui gratte est élevé au rang de planche de salut.
Pour quelle raison les Français vont-ils devoir ressortir les pulls cet hiver ?
Oui, car les mêmes responsables nous incitent à baisser le chauffage, pour abaisser notre facture bien sûr, mais surtout les dépenses énergétiques du pays. On nous annonce à grand renfort de communication qu'il ne fera pas plus de 19 °C dans les ministères.
Très bien… mais il me semble la France à la mémoire courte. Souvenez-vous : du temps de la “chasse au gaspi”, lors des deux chocs pétroliers de 1974 et 1979, la loi imposa dans les logements et les administrations publiques une température maximale de... 19 °C. Cette réglementation est toujours en vigueur, on l'a visiblement oublié. On a oublié également qu'en un siècle le confort personnel a pris ses aises avec le chauffage central. L'historien Renan Viguié, auteur d'une thèse justement intitulée "se chauffer en France au XXe siècle", a ainsi récemment rappelé dans les colonnes de nos confrères du Parisien que la température alors considérée comme "confortable" dans les pièces à vivre était comprise entre 15 et 17 °C. Ces températures, polaires pour certains Français pétris de confort, mais habituelles pour nombre d'autres aux fins de mois difficiles, étaient préconisées dans les manuels d'économie domestique et d'éducation dédiés aux jeunes filles dans l'entre-deux-guerres.
Un regard en arrière pour affronter le futur
Loin d'être nostalgiques du passé, un simple retour à la raison serait déjà source de bien des économies. “C’est le jeûne qui fait le saint, assurait Jules Renard, et la sobriété, l’homme de bon sens”. Appliquons donc quelques règles de bon sens tirées de la sagesse de nos aïeux et ayons à cœur que la simplicité et la sobriété permettent un plus grand partage au sein de notre société. Sans forcément avoir à supporter que des ministres remplacent nos mamans devant l'étagère de pulls ou le thermostat de la chaudière !
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