Déontologix : la vérité journalistique
Dans le second épisode de Déontologix, le podcast du CDJ qui décrypte la déontologie journalistique, Romain vous parle de vérité journalistique. Pour comprendre ce que c’est, il s’intéresse au code de déontologie, texte de référence du CDJ mais aussi à un cas d’école remontant à 2006 « Bye bye Belgium ».
Déontologix : C'est quoi la vérité journalistique ? Crédit : CDJLe 13 décembre 2006, sur La Une, chaine de la RTBF, François de Brigode prend l’antenne. Il annonce alors le plus sérieusement du monde que la Flandre va proclamer son indépendance. Ce docu-fiction avait pour but de faire réagir, le problème, c'est que le public n’a pas bien saisi que c’était une fiction et y a cru. Il a fallu ajouter un bandeau sur l’écran indiquant « ceci est une fiction ».
Un boost pour la création du CDJ
À l’époque, cela fait déjà quelques années que le Conseil de Déontologie Journalistique (CDJ) est en préparation, mais il n’y a encore aucune auto-régulation du travail des journalistes. « Bye bye Belgium » crée un scandale aussi bien dans le monde politique que dans le monde médiatique. La pression est mise pour accélérer la création du CDJ qui voit finalement le jour en 2009.
Jean-Pierre Jacquemin, directeur de l'information à la RTBF et membre du CDJ depuis 2009, se souvient de cet épisode : « à la RTBF, certains ont vu, lors de la création du CDJ, une manière de punir la RTBF pour ce qu'elle avait fait. « Bye Bye Belgium », en prenant des journalistes pour raconter quelque chose qui n'était pas la vérité, déontologiquement, ça ne passe pas. »
Le mélange des genres dans Bye Bye Belgium a sans doute entaché la confiance d'une partie de la population dans les médias. Cela a rendu plus que nécessaire de rassembler les règles de la profession, déjà balisées dans plusieurs textes, dans un outil commun, et de veiller au respect de ces règles.
Le respect de la vérité
Aujourd’hui, alors que la désinformation se propage de plus en plus facilement, les journalistes ont le devoir d'informer dans le respect de la vérité. C'est d’ailleurs le premier volet du code de déontologie.
Ce premier volet du Code pose les bases. Il indique que les journalistes doivent rechercher et respecter la vérité, vérifier leurs sources, ne diffuser que des informations dont l'origine leur est connue, ne pas déformer ou omettre des informations essentielles, respecter le sens et l'esprit des propos tenus en interview, faire preuve de prudence, éviter toute approximation, distinguer les faits des opinions, utiliser la scénarisation uniquement pour clarifier l'information.
Cependant, nous vivons dans un monde où le numérique est roi. L'information journalistique côtoie toutes sortes d'autres contenus en ligne : rumeurs, parodies ou encore à la propagande. Les citoyens deviennent donc de plus en plus méfiants, y compris face à une information vérifiée.
La vérité journalistique
Ce terme divise quelque peu les personnes interrogées dans cet épisode. S’il y a bien une vérité sur les faits qui se sont déroulés et qui seront rapportés par le journaliste, celle-ci ne dépend pas de lui. Le travail du journaliste est de mener son enquête pour être en mesure d’apporter des éléments corrects, vérifiés et en accord avec la réalité des faits.
Si le respect de la vérité est bel et bien la base du métier, le CDJ ne s'attache pas à rechercher cette vérité, le Conseil ne refera pas l’enquête. Il ne fera que vérifier si les méthodes mises en œuvre par un ou une journaliste ou un média sont conformes au code de déontologie.
La responsabilité sociale des journalistes
Cependant, dire la vérité ne veut pas toujours dire tout ce qu’on sait. Comme Véronique Kiesel, membre journaliste du CDJ depuis 2022, nous l’explique : « il y a des choses qu'on sait et qu'on ne peut pas afficher. La vérité peut être extrêmement dangereuse et nocive et parfois, c'est inutile de donner ces détails-là si ça met vraiment des gens en danger. » Cela fait écho à la responsabilité journalistique.
Cette responsabilité sociale, inhérente à la liberté de la presse, c'est l'attention qui est prêtée dans le traitement journalistique aux répercussions prévisibles de l'information diffusée dans la société.
Un exemple concret pourrait être celui d’un accident de voiture entrainant la mort d’une personne. La police pourra demander aux journalistes de ne pas donner le nom de la victime. Non pas pour contrôler l’information donnée au public, mais pour pouvoir d’abord informer les proches de la personne décédée et que ceux-ci ne l’apprennent pas par la presse.
La responsabilité sociale peut donc aboutir, dans des cas exceptionnels, à ne pas traiter un sujet, du moins dans un temps limité, afin de protéger l'intérêt général. Ce fut le cas lors du silence radio imposé lorsque la police fédérale belge menait des opérations en lien avec les attentats de Paris fin 2015. Les internautes avaient d'ailleurs participé à noyer les éventuelles informations sur les actions en cours, en inondant les réseaux sociaux de photos de chatons.
Les journalistes ne doivent donc pas toujours tout dire, mais ils ne peuvent pas dissimuler non plus. Parmi les questions importantes à se poser, est-ce que cette information est essentielle ou non ? Est-ce que la diffuser répond à l'intérêt général ou plutôt à la simple curiosité du public ?
Rectifier ses erreurs
Une autre facette essentielle du premier volet du code de déontologie, surtout à l'ère numérique, c'est la rectification. L'article 6 du code tient en une ligne : « les rédactions rectifient explicitement et rapidement les faits erronés qu’elles ont diffusés ». Ce n’est donc pas une simple mise à jour de l'article, le public doit savoir où se situait l'erreur et comment elle a été rectifiée.
Avec la rectification, les journalistes assurent leurs responsabilités en toute transparence. Ils et elles reconnaissent leurs erreurs, les corrigent et les signalent au public. C'est ce qui les distingue de la mêlée. C’est aussi une question de confiance et de crédibilité.
Crédibilité et objectivité
La crédibilité journalistique est régulièrement associée à l’objectif. Si les journalistes se doivent d’être le plus objectifs possibles, ils restent des humains avec un passif, des idées et des envies. Le danger est donc d’apporter notre propre regard à notre sujet. C’est à chacun des journalistes, à la fois, de se discipliner lui individuellement, et de se servir des quelques outils comme le code de déontologie.
Déontologix est un podcast produit par le Conseil de Déontologie Journalistique avec le soutien de la Fédération Wallonie-Bruxelles.


Informer, c'est un métier... Et tout métier nécessite des règles. Si tu étudies le journalisme, tu entendras parler tôt ou tard de l'importance de la déontologie. Respecter la vérité, informer de manière indépendante, agir avec loyauté et respecter les droits des personnes : voilà en (très) résumé les balises, à suivre. Mais c'est évidemment plus simple à dire qu'à faire ! Alors suis le parcours de Romain, qui s'est donné pour mission de vulgariser ce vaste sujet en 6 épisodes.
"Déontologix" a été réalisé par Pamela Flores et Anna Vidal pour le Conseil de déontologie journalistique (CDJ), avec le soutien de la Fédération Wallonie-Bruxelles.
Crédits :
- Scénario : Muriel Hanot, Pamela Flores et Anna Vidal
- Interviews : Pamela Flores
- Voix off : Romain Rayée
- Réalisation : Anna Vidal
- Mixage : Jean-Marc Vierset
- Générique : "Floating" (Zambolino)


