Les Européens auront les yeux braqués sur l’Allemagne ce dimanche. Les élections anticipées, dont les conservateurs sont favoris, avec une extrême droite annoncée à un niveau record, se déroulent sur fond de crise politique, mais aussi de crise du modèle économique.
La campagne des législatives en Allemagne a largement été dominée par l'immigration, cible de prédilection de l’AFD, le parti d'extrême droite. Le sentiment de déclassement en particulier à l’Est, la vague migratoire de 2015 et les conséquences de l’inflation suite à la guerre en Ukraine ont alimenté une montée inédite de l’extrême droite depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
"Mais l'autre grand thème de la campagne, sinon le principal, c’est l'économie" souligne Isabelle Bourgeois spécialiste de l’Allemagne ancienne attachée culturelle à l’Ambassade de France. Depuis deux ans, l’Allemagne est en récession. L’industrie déraille comme l’illustrent plusieurs grands plans de réduction d'emploi ces derniers mois, notamment dans l'automobile. C’est tout un modèle qui est bousculé. "Le modèle allemand est basé sur une industrie importante. Une industrie de transformation qui a besoin d'importer des matières premières et qui a besoin de marchés extérieurs pour exporter. L'enchérissement des matières premières et la fermeture du marché chinois ont conduit le pays à ne pas avoir les résultats escomptés" indique Helène Miard-Delacroix, enseignante à Sorbonne université, spécialiste de l’histoire contemporaine de l’Allemagne."La crise du modèle économique allemand n'a absolument rien à voir avec la question migratoire. Au contraire, l'économie allemande a besoin de main-d’œuvre. Le schéma de rejet des étrangers comme étant la raison principale de tous les malheurs des Allemands comme le dit l'AFD, ne tient pas économiquement" souligne l’historienne.
C’est une particularité, l’Allemagne possède une dette bien sûr, mais le pays ne l’a jamais laissé filer. Il y a une tradition de frugalité outre-Rhin où les règles sont très strictes dans ce domaine avec la "Schuldenbremse" le frein à la dette. "C’est un principe inscrit dans la constitution qui limite l’endettement à 0,35 % du PIB" précise Isabelle Bourgeois. Pour certains partis, notamment à gauche, assouplir cette règle est nécessaire pour doper les investissements dans la défense, la transition écologique et les infrastructures vieillissantes du pays. "Inscrire ce principe dans la Constitution, c'est s'empêcher dans une situation difficile, qu'a rencontrée finalement l'Allemagne, d'agir pour investir, pour intervenir dans les équilibres économiques. C'est un tabou, parce qu’à partir du moment où c'est dans la Constitution, c'est encore plus compliqué de l’enlever de la Constitution" fait remarquer Hélène Miard-Delacroix. Les conservateurs sont timidement ouverts à un assouplissement. Les Libéraux du FDP y sont clairement opposés.
Dans les sondages, la CDU est favorite du scrutin à 30 %. L’AFD à 20 %. Le SPD est crédité de 15 % et les Verts de 14 %. Une alliance avec l’extrême droite étant exclue, la question est de savoir comment le leader des conservateurs Friedrich Merz va former une coalition stable pour engager les réformes promises sur l’économie.
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