"Ils s'appellent eux-mêmes les fantômes de la société" : Fiona Lauriol s'arrête à Annecy et Chambéry pour alerter sur le racisme anti-vieux
Le 30 septembre dernier, Les Petits Frères des Pauvres ont publié leur troisième baromètre de l’isolement des personnes âgées en France. En 2025, l’isolement s’installe et s’aggrave, affirme l’association. 750.000 personnes âgées seraient en situation de mort sociale, c'est-à-dire sans aucun lien avec la famille, les amis ou les voisins. Une augmentation de 150% en huit ans. Afin d'alerter sur "l'invisibilité des arthrolescents", Fiona Lauriol réalise un Tour de France en camping-car. Avec ses parents, elle s'est arrêtée à Chambéry et Annecy.
©RCF Haute-Savoie“Il n’y a pas de fin de vie, il y a la vie jusqu’au bout, et la vie c’est aussi prendre des risques”
"L'arthrolescence", c'est ce jeu de mots, avec arthrose et adolescence, que Fiona Lauriol emploie pour caractériser nos aînés. Derrière la sémantique, il y a une vraie histoire autour de ce mot qui n’est pas encore entré dans le dictionnaire. C’est à la sortie d’une conférence qu’une femme de 94 ans interpelle Fiona, sur son sentiment d'être considérée comme une vieille dame par la société. Fiona lui répond, la comparant à une "arthrolescente", le troisième stade après l’adulescence et l'adolescence. En clair, "croquer la vie à pleines dents, même avec un dentier !", plaisante Fiona, avec le sourire qui ne la quitte pas.
Derrière ces propos de cette nonagénaire, il y a l'âgisme. Et on en est tous les malheureux acteurs. Quand on prend des décisions à la place de ses parents, de ses grands-parents, parce qu’on les jugent “trop vieux” pour s’occuper de leurs comptes en banque, quand on pense aussi que nos aînés ne peuvent plus avoir de vie intime, quand on pense qu’après 60 ans, on ne peut plus avoir de projet. On fait preuve de “racisme anti-vieux”. Fiona Lauriol a commis des erreurs avec sa grand-mère centenaire, à qui on lui promettait en 2018 une semaine tout au plus à vivre. Mais elle a eu un déclic. Quand elle a vu sa “mémé regarder un mur blanc toute la journée avec un air un peu bêbête", elle s’est demandée. Mais c’est ça la vieillesse ? Alors elle l’a remise sur pied, s’en est occupée 24 heures sur 24, jusqu’à l’emmener faire un tour d’Europe en camping-car. Et là, à 100 ans, "elle a rajeuni". “Il n’y a pas de fin de vie, il y a la vie jusqu’au bout, et la vie c’est aussi prendre des risques”, clame Fiona, qui aujourd’hui, malgré le décès de sa grand-mère centenaire en 2020, continue son combat en faveur de la vie tout simplement.
Fiona Lauriol, "la semeuse de graines"
Fiona Lauriol sillonne aujourd'hui les routes, de camping, en camping, elle était à Chambéry le week-end passé, à Annecy cette semaine au camping municipal, avant de prendre la direction de l’Ain à Bourg-en-Bresse, pour alerter les élus, parlementaires, et députés. Avec son camping-car customisé, placardé d’affiches sur lesquelles sont écrits ces mots “101 ans, Mémé part en vadrouille”, c’est le titre de son livre traduit à l’international en hommage à sa grand-mère Dominique, qui sera adapté au cinéma dans un peu plus d’un an. Fin de ce tour de France en camping-car à Paris, en juin 2026, à l’Assemblée Nationale.
Et il est grand temps. Selon les Petits Frères des Pauvres, ce sont deux millions de séniors aujourd’hui en France qui sont isolés de leur entourage proche. Derrière la mort sociale, il y a aussi la mort solitaire. Ces personnes âgées que l’on retrouve décédées seules chez elles, des semaines, voire des mois plus tard. Alors évidemment, tout le monde ne peut pas s’acheter un camping-car et faire un tour du monde avec sa grand-mère, mais si déjà, le lien peut-être rétabli avec sa grand-mère ou son grand-père, ce sera déjà un grand pas de fait. Fiona veut être cette "semeuse de graines".
La Semaine Bleue, du 6 au 12 octobre ! La semaine nationale dédiée aux retraités et aux personnes âgées.
Plusieurs dizaines d’animations organisées dans la région, comme un cross intergénérationnel à Porte de Savoie le 9 octobre à l’EHPAD Foyer Notre-Dame, ou encore à Saint-Etienne le 11 octobre, une pièce de théâtre radiophonique à l’espace Boris Vian.


Chaque jour de la semaine à 6h35 et à 12h08, la rédaction de RCF Savoie Mont-Blanc approfondit un sujet d'actualité locale ou s'intéresse à un événement en donnant la parole à un acteur du territoire.


