Gaz hilarant : dans l'enfer de l'addiction
Euphorie, rires incontrôlés ou distorsions sensorielles : ce sont les effets, de courte durée, que recherchent les consommateurs de gaz hilarant. Le protoxyde d’azote séduit de plus en plus de jeunes de moins de 30 ans. En Savoie, à la veille d’un afflux touristique hivernal important, la préfecture vient d’en interdire la détention, le transport et la consommation. En matière de santé, c’est un véritable fléau.
Cachée dans les buissons, en bordure d'un parking de centre-ville à Chambéry, une bouteille vide de protoxyde d'azote. ©RCF Savoie Mont BlancLe protoxyde d'azote, dit gaz hilarant ou "happy balloon" est utilisé en médecine pour ses propriétés anesthésiques et analgésiques. On le trouve également dans les cartouches pour siphon de crème chantilly. Mais son usage détourné, principalement chez les jeunes, n'est pas sans poser de nombreux problèmes.
Chez les jeunes
Le phénomène est identifié par le ministère de la Santé depuis 2019, mais il ne cesse de prendre de l'ampleur. En région Auvergne Rhône-Alpes, trois centres d’addictovigilance suivent les consommateurs à Clermont-Ferrand, Grenoble ou Lyon. De 2021 à fin 2024, ils ont traité 405 cas dont 268 graves avec un âge médian des consommateurs de 21 ans. Un constat partagé par la fondation Vinci Autoroute et Ipsos qui ont publié, en octobre dernier, une enquête sur l'impact de cette consommation, en particulier lors de la conduite. Elle révèle qu'un jeune de moins de 35 ans sur 10 a déjà pris du gaz hilarant en soirée, et parmi eux, un sur deux en conduisant. 7% des moins de 35 ans ont déjà été passagers d'une voiture dont le conducteur avait respiré du protoxyde d'azote. Des données d'autant plus inquiétantes que les effets du gaz peuvent survenir dans les 30 à 45 minutes suivant l’inhalation.
Les mêmes symptômes qu'un AVC
S'il est utilisé en médecine, notamment pédiatrique, sans effets secondaires graves, sa consommation répétée et à fortes doses peut causer de graves séquelles. Les symptômes sont ceux d'un AVC avec des atteintes neurologiques pouvant aller jusqu'à la paraplégie avec fuites urinaires/fécales ou troubles sexuels. L'addiction au gaz hilarant est associée à une perte de contrôle qui bascule vers une consommation compulsive. "Concernant ce gaz, nous n'avons pas encore suffisamment de recul sur cette consommation compulsive, commune à toutes les drogues", nuance Maxime Cloquié, directeur de l'association Le Pélican, à Chambéry, spécialisée en addictologie depuis 40 ans. Elle propose des consultations Jeunes consommateurs aux 12-21 ans, gratuitement, en sept points du territoire. "Les mineurs représentent environ 10 % de ces consultations", précise-t-il, tout en martelant l'importance de la prévention. "La prévention a porté ses fruits auprès des plus jeunes chez qui la consommation de tabac, d'alcool et de cannabis est en recul, selon les dernières données de l'Observatoire Français des drogues et des tendances addictives", insiste-t-il, appelant à une meilleur prévention autour du gaz hilarant.
Nuisances publiques
Selon la préfecture de la Savoie, les accidents de la route imputables au protoxyde d’azote sont de plus en plus nombreux. Alors que le département s'attend à recevoir un afflux important de touristes liés aux sports d'hiver, un arrêté d'interdiction a été publié le 4 décembre. ainsi, partout en Savoie et jusqu'à juin 2026, la détention, le transport et la consommation de protoxyde d'azote dans l’espace public à des fins récréatives est interdite. L'amende en cas d'incitation à la consommation d'un mineur est de 15 000 euros.


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