JavaScript is required
Accueil
Les Mondes de Paul Delvaux

Les Mondes de Paul Delvaux

Un article rédigé par Yves Thibaut de Maisières - 1RCF Belgique, le 14 février 2025 - Modifié le 14 février 2025
16/17Les mondes de Paul Delvaux à la Boverie

Il reste jusqu'au 16 mars 2025 pour se rendre à la rétrospective de l'œuvre d'un artiste belge qui a traversé tout le 20e siècle. Les Mondes de Paul Delvaux est à découvrir à la Boverie à Liège. 

Affiche de l'exposition Les Mondes de Paul DelvauxAffiche de l'exposition Les Mondes de Paul Delvaux

Il vous reste jusqu'au 16 mars pour découvrir les Mondes de Paul Delvaux à la Boverie à Liège. Marie-Elizabeth van Rijckevorsel est guide-conférencière et anime des visites de cette exposition. Elle nous décrit l'univers de l'artiste qu'elle nous invite à rencontrer !

Évoquer l'œuvre de cet artiste belge, né en 1897, c'est entendre certains dire que son œuvre se résume à des femmes dévêtues, des trains dans un décor de pénombre. Finalement, que révèle ce titre "Les Monde de Paul Delvaux" ? 

Marie-Elizabeth van Rijckevorsel : Il est vrai que les Belges, en particulier, pensent bien connaître l'œuvre de Paul Delvaux. Ils ont l'impression que c'est du déjà vu, qu’elle habite beaucoup notre imaginaire de belge, que c'est un peu froid, qu’on en a vite fait le tour. Mais cette exposition nous détrompe fortement sur cette première impression. En effet, parce que quand on visite cette exposition, on se rend compte que l’artiste a produit une œuvre influencée par énormément d'artistes différents. C'est une œuvre riche, féconde et intéressante pour nous-mêmes. J'ai observé les visiteurs qui arrivaient avec beaucoup d'aprioris repartir avec un élargissement intérieur.

L’exposition s'inscrit aussi dans le contexte du centième anniversaire du courant surréaliste. Il est un artiste du XXe siècle, voire de l’intégralité du siècle précédent, puisqu'il est né en 1897 et mort en 1994. On peut dire qu’il a connu au long de son existence tout le spectre artistique ?

II était allé à la fois perméable aux différentes inspirations de son époque, tout en restant très indépendant à leur égard. On a tendance à la présenter comme un peintre surréaliste. Les surréalistes sont souvent des revendicateurs assez agressifs, parfois. Delvaux a une humilité, une simplicité qui va tout à fait à l'encontre de la tendance de ce courant. Son œuvre n'a pas la mission de revendiquer quoi que ce soit ; elle est une exploration de sa propre intériorité. D’ailleurs, il n’a pas été bien traité par les surréalistes qui se moquaient beaucoup de lui, allant jusqu’à le surnommer “Delvache”…

Les trains et l'art de ses confrères comme inspiration

 

Les trains et les femmes nues étaient ses principales sources d'inspiration. Que cherche-t-il à nous faire comprendre, même s'il n'est pas dans la revendication ? Le train est-il une allégorie du voyage ?

Certainement ! en tout cas une invitation au mystère, au voyage intérieur. Le train fait partie de son histoire parce qu'il habitait à Bruxelles, et que lorsqu'il se rendait chez sa grand-mère il prenait la ligne allant de la gare de Bruxelles-Luxembourg - qu'il connaissait très bien - vers Ottignies, dont il viendra d'ailleurs chef de gare honorifique à un âge très avancé. A plus de 80 ans, il affiche le sourire d'un petit garçon qui a toujours aimé le train. Il aimait les gares. D'ailleurs, il avait un pass spécial pour pouvoir aller à l'arrière des gares, voir les travailleurs et les machines. Ce qu'il aimait bien, c'étaient les trains à vapeur, les machines du passé. Tout au long de sa vie, le chemin de fer à l’ancienne, comme les femmes de la fin du XIXe. 

En 1936, Delvaux présente ses œuvres au cours d’une exposition avec Magritte au palais des Beaux-arts de Bruxelles. Comment était-il perçu ? La critique était-elle positive à son égard ?

De son vivant, la critique était positive, mais pas celle des surréalistes, plutôt agressifs à son égard. Magritte et Delvaux sont des “frères en art” dans leur manière de peindre. D'ailleurs, ils ont été tous les deux bouleversés par le même artiste à savoir Giorgio de Chirico, ce peintre du mystère, du silence, de l'étrange. Cette rencontre les aura beaucoup marqués. J'ai le sentiment que la peinture de Paul Delvaux est une psychothérapie à ciel ouvert. 

Pourquoi parlez-vous de “psychothérapie à ciel ouvert” en parlant de l'analyse de son œuvre ? Qu'est-ce que la peinture venait "chercher" chez lui ?

La plupart des Belges savent que Delvaux a été très marqué par une éducation sévère, mais surtout que ses parents déversaient sur lui beaucoup d'attentes. Il était le fils aîné, on pensait qu'il ferait de grandes études. Quand il a annoncé qu'il voulait être artiste, ses parents ont été choqués et très sceptiques. Heureusement qu’ils avaient dans leurs relations un artiste renommé dont l’image laissait entrevoir une possibilité pour leur fils. Mais là-dessus s'est greffé le problème de la relation du fils avec sa mère. Et ce déséquilibre est très intéressant à analyser, parce que la maman a refusé que son fils  épouse son amour de jeunesse, TAM (surnom d’Anne-Marie). Paul a préféré céder pour ne pas brusquer l’autorité parentale.

En fait, toute sa peinture nous raconte son impossibilité d'accéder à la féminité. 

A partir de cet épisode, tout a dérapé puisque les femmes sont devenues un grand interdit pour le jeune artiste. En fait, toute sa peinture nous raconte son impossibilité d'accéder à la féminité. Le résultat n’en est que plus beau ! Ce qu'on voit dans la plupart de ses compositions, ce sont des décors avec de grandes places vides où se promènent étrangement des femmes, des squelettes. Ce mystère qui plane dans des espaces architecturés, structurés, c'est vraiment ce qui va le plus impacter Paul Delvaux. 

Les Mondes de Paul Delvaux, est-elle une exposition à voir avec de jeunes enfants ?

Je dirais qu’étant donné qu’comme on entre dans un monde intérieur et qu'il s'agit là d'obsessions d'un homme qui a vécu des grandes frustrations par rapport à la féminité, je pense qu'il y a certaines œuvres qui sont plus difficiles à voir pour des plus jeunes enfants, mais qui font rêver tout de même par ailleurs. Donc aux parents de guider un petit peu vers les œuvres ou de demander à des guides de le faire avec eux, de guider vers les œuvres qui conviendront mieux. 

Le 16/17 ©1RCF
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
16/17
Le 16/17 ©1RCF
Cet article vous a plu ?
partager le lien ...

RCF vit grâce à vos dons

RCF est une radio associative et professionnelle.
Pour préserver la qualité de ses programmes et son indépendance, RCF compte sur la mobilisation  de tous ses auditeurs. Vous aussi participez à son financement !

Faire un don
Qui sommes-nous ?

RCF est créée en 1982, à l'initiative de l'archevêque de Lyon, Monseigneur Decourtray, et du Père Emmanuel Payen. Dès l'origine, RCF porte l'ambition de diffuser un message d'espérance et de proposer au plus grand nombre une lecture chrétienne de la société et de l'actualité.

Forte de 600.000 auditeurs chaque jour, RCF compte désormais 64 radios locales et 270 fréquences en France et en Belgique. Ces 64 radios associatives reconnues d'intérêt général vivent essentiellement des dons de leurs auditeurs.

Information, culture, spiritualité, vie quotidienne : RCF propose un programme grand public, généraliste, de proximité.Le réseau RCF compte 300 salariés et 3.000 bénévoles.

RCF
toujours dans
ma poche !
Téléchargez l'app RCF
Google PlayApp Store
logo RCFv2.14.0 (21796db) - ©2024 RCF Radio. Tous droits réservés. Images non libres de droits.