Antoine Raymond : "La voix des ombres qui murmurent"

Marie Anne Bucci, RCF
Antoine Raymond, vous avez été à la tête de l’entreprise ARaymond pendant plus de 26 ans, arrière-arrière-petit-fils du fondateur. Depuis le 1er juillet, vous avez transmis la présidence tout en restant membre du conseil de surveillance. Lors de notre première émission, vous avez évoqué la transmission et votre parcours de dirigeant. En près de trois décennies, vous avez porté ARaymond au rang de multinationale employant 8000 personnes, leader mondial des solutions d’assemblage et de fixation. Pour cette deuxième rencontre, nous revenons à l’écrivain que vous êtes : votre nouveau livre, La voix des ombres qui murmurent, nous entraîne dans un voyage à travers le temps, depuis la révolution industrielle, avec des figures anonymes et des membres de votre famille que vous appelez vos « anges gardiens ». Très jeune, avant votre admission à l’université de Saint-Gall, vous ressentiez déjà l’envie profonde d’écrire. Qu’avez-vous vécu ce jour-là ? Et quel était votre désir en écrivant ce nouveau livre ?

Antoine Raymond
J’ai toujours été fasciné par la possibilité de mettre sur le papier ce que l’on porte au plus profond de soi. Étudiant, je rêvais de créer, d’imaginer, mais je n’étais pas encore capable d’écrire. Il m’a fallu la vie et ses expériences pour parvenir à transcrire ces ressentis accumulés depuis plus de quarante ans.

RCF
Dès les premières pages, on vous suit adolescent, émerveillé par le panorama qui mène au glacier blanc. Le récit est précis, vibrant, presque cinématographique.

AR
Quand on vit intensément, tout s’ancre en nous : dans la mémoire, le corps, l’âme. J’ai gardé ces moments gravés de façon indélébile. En écrivant, je retrouvais encore les odeurs, les lumières, les rires. Enfant, chaque découverte semble durer une éternité. Adulte, la routine accélère le temps. L’écriture m’a permis de retrouver cette intensité.

RCF
Dans ce livre, vous rendez hommage à vos « anges gardiens » : des hommes et des femmes de votre famille qui ont incarné audace, courage et liberté. Pouvez-vous nous parler de l’un d’eux ?

AR
J’ai découvert, et mon père lui-même ignorait, que mon grand-père paternel avait négocié la reddition de sa division écossaise face au général Rommel, avant qu’il ne devienne le « renard du désert ». Une photo conservée à l’Imperial War Museum de Londres en témoigne. Ce fut une émotion immense. Mon grand-père maternel, lui aussi, a fait preuve d’un courage exceptionnel. Je me demande souvent si j’aurais eu leur force.

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Derrière ces portraits, il y a un travail colossal. Était-ce aussi une quête de vous-même ?

AR
Oui. J’ai écrit ce livre tout en assumant mes responsabilités à la tête de l’entreprise. Cela m’a coûté des nuits, des week-ends, des vacances. J’ai découvert au fil de l’écriture des informations que personne ne connaissait. Parfois, j’avais l’impression d’être guidé.

RCF
Combien de temps a duré ce travail ?

AR
J’ai élaboré le scénario durant l’été 2023 et commencé l’écriture en janvier 2024. Huit mois intenses.

RCF
Ce livre devait-il paraître au moment même de la transmission de l’entreprise ?

AR
Oui. Je voulais qu’il coïncide avec les 160 ans de l’entreprise et transmettre des récits inédits à mes collaborateurs, à mes parents, à ma fille et à mes successeurs. Le message que je voulais leur laisser, c’est l’audace et le courage.

RCF
En travaillant sur ce livre, vous avez voyagé dans l’histoire familiale.

AR
Assis à ma table, j’ai traversé les siècles à la rencontre de mes ancêtres, jusqu’au XVIIIe siècle. Mes parents, mes grands-parents, mes oncles et tantes m’avaient transmis beaucoup d’histoires, et j’ai toujours eu cette capacité à tout retenir.

RCF
Qu’avez-vous ressenti le jour de la publication ?

AR
Beaucoup d’inquiétude. J’avais le sentiment d’avoir progressé par rapport à mon premier livre, mais je racontais des choses très personnelles. Mon père a été gêné par certains passages. Je me suis demandé comment les lecteurs allaient accueillir ce mélange d’histoires de guerre, d’aventures humaines, de courage et de compassion. Ce que je retiens de mes aïeux, c’est cette capacité à distinguer les régimes oppresseurs des personnes elles-mêmes. Ma grand-mère, qui avait perdu deux fils en juillet 1944, a sauvé un soldat allemand du lynchage et l’a hébergé. Un geste immense de compassion.

RCF
Votre livre est un appel à l’audace, au courage et à l’émerveillement. Qu’a représenté pour vous l’écriture de cet ouvrage ?

AR
Elle m’a fait grandir. Dans un monde rempli de peur et d’incertitude, la vie est forte. Avec de l’amour, du courage et de l’audace, on peut transformer les choses, dans le bon sens.

RCF
Merci pour ce témoignage. Nous étions avec Antoine Raymond, qui a dirigé ARaymond pendant plus de 26 ans, autour de son dernier livre La voix des ombres qui murmurent.

Article rédigé à partir de l'interview radiophonique et retouché grâce à l'Intelligence artificielle.