Ventes, réhabilitations et rénovations... le patrimoine immobilier du diocèse de Lyon en profonde mutation
Avec ses 35 millions d’euros de budget annuel, le diocèse de Lyon affronte une équation délicate : entre hausse des coûts de l’énergie, vétusté d’un parc immobilier ancien et baisse du nombre de donateurs, l’Église doit revoir sa copie. Inventaire, ventes, réhabilitations… Derrière les pierres d’un patrimoine historique, c’est une véritable stratégie immobilière et pastorale qui se met en place, pour répondre aux besoins des paroisses d’aujourd’hui et préparer celles de demain.
Ventes, réhabilitations et rénovations... le patrimoine immobilier du diocèse de Lyon en profonde mutation - © RCF Lyon - Grégoire Gindre600 000 euros de travaux et plus d’un an de chantier : il y a un peu plus de deux ans maintenant, la maison paroissiale de Givors-Grigny a bénéficié d’une réhabilitation complète. Accueil, cuisine, parties communes, façade et jardin, tout a été repensé pour le confort des paroissiens. « Lorsque je suis arrivé, j’ai tout de suite vu que la maison paroissiale était fonctionnelle. En revanche, il y avait aussi des choses à modifier. Par exemple, avant, pour aller à l’accueil, il fallait traverser la cuisine. Ce n’était pas dès plus agréable », raconte le Père Damien Guillot, curé de la paroisse. Il montre fièrement la nouvelle table destinée aux enfants : « symboliquement, c’est important : on accueille tous les âges dans la paroisse », abonde-t-il.
À l’étage inférieur, d’autres travaux ont concerné la grande salle paroissiale. Cependant, l’enjeu n’était pas qu’esthétique : « lorsque l’on fait une réhabilitation d’un immeuble comme celui-ci, d’un ERP [établissement recevant du public, NDLR], on a l’obligation de se mettre aux normes de sécurité, de loi handicap avec l’accueil des PMR [personne à mobilité réduite, NDLR] », explique Cyril de Lesquen, responsable du patrimoine immobilier du diocèse de Lyon.
Une stratégie diocésaine assumée
Des exemples comme celui de la paroisse de Givors-Grigny, il y en a plusieurs sur le territoire diocésain qui s’étend jusqu’à Roanne. Tous s’inscrivent dans une dynamique stratégique du diocèse, lancée pour faire face à l’inflation et à la baisse des dons. Face à la nouvelle conjoncture économique, le diocèse de Lyon dit « s’engager dans une ambitieuse stratégie de révision de sa politique immobilière ».
Dans un courrier adressé à ses donateurs, le diocèse détaille les chantiers en cours : La Mulatière, Renaison, Roanne, Chaponost… Plusieurs millions d’euros sont investis dans la remise en état des bâtiments paroissiaux.
Pour piloter cette mutation, un inventaire complet du patrimoine a été lancé. « Un vrai travail de fourmi », résume Cyril de Lesquen. Objectif : déterminer si chaque bâtiment sert encore la mission pastorale. Certains seront rénovés, d’autres jugés trop vétustes ou inadaptés seront cédés.
Entre attachement et décisions courageuses
Fort d’un patrimoine immobilier hérité de plusieurs siècles d’histoire, au côté des Hospices Civiles de Lyon, le diocèse fait partie des grands propriétaires du territoire rhodanien. Une richesse qui impose des choix : « si le bâtiment a un intérêt pastoral, on fait en sorte de le conserver, de l’améliorer. Si le bâtiment n’a pas d’intérêt pastoral, on va se poser la question de l’usage de ce lieu », décrit Véronique Bouscayrol, économe du diocèse de Lyon. Pas encore question de vente ici : « ça peut accueillir une association caritative. Ça peut avoir un rôle d’accueil de foyer de jeunes, ou ça peut se transformer en logement ». Par charité ou en profitant d’un revenu locatif estimé à 500 000 euros par an, le diocèse tente tant bien que mal de conserver son patrimoine.
Vendre ? "C'est une décision courageuse [...] Des choix qui sont finalement du domaine de l'amputation du passé"
Et quand rien n’est possible ? « Nous prenons la décision courageuse de céder », confie-t-elle. Cela peut s’expliquer notamment par l’état du bâtiment trop vétuste, ou encore son emplacement trop éloigné. « C’est courageux parce qu’il ne faut pas oublier que ces biens [...] sont soit le fruit de la générosité du passé, soit ont été construits par des personnes encore vivantes ou dont les enfants ou petits-enfants sont encore vivants », justifie Véronique Bouscayrol en insistant sur le caractère « courageux » de ces choix qui sont « finalement du domaine de l’amputation de son passé ».
Faire de la pierre un outil, pas une finalité
Faire de ses bâtiments un outil au service de la mission pastorale, plutôt qu’un simple héritage coûteux. Voilà en une phrase le résumé de la nouvelle stratégie immobilière du diocèse. Désormais, chaque euro compte. Le diocèse a par exemple mutualisé l’ensemble des contrats d’énergie paroissiaux pour renégocier les tarifs et réduire la facture. Objectif : profiter de l’économie d’échelle. « Tous ces contrats, diffus, ont été repris au niveau des services généraux et ont permis de très largement faire diminuer la note », confirme Cyril de Lesquen.
« La pierre est un outil, pas un trésor que l'on amasse »
Mais la réalité économique ne se gère pas seulement dans les bureaux. Il faut aussi expliquer et convaincre les fidèles. « La pierre, c’est un outil. Ce n’est pas un trésor que l’on amasse. C’est plus difficile dans certains cas de faire passer le message auprès des paroissiens. Il y a, parfois, un attachement qui est presque de l’ordre du familial », souligne Véronique Bouscayrol. Bien heureusement, au-delà des murs, c’est bien la communauté qui fait l’Église.


L'actualité qui prend son temps, le choix d'un tempo lent. Info, culture, économie, écologie, religion, sport, mobilités et plus encore : RCF Lyon prend du recul sur le rythme médiatique classique. Après une saison 2023-2024 en quotidienne, Tempo passe en rendez-vous hebdomadaire à la rentrée 2024. Chaque semaine, quinze minutes pour traiter en longueur un sujet concernant le Rhône, le Roannais ou le Nord-Isère, en mêlant interview, décryptage, reportage et ambiance sonore.

