Connu pour les aventures de son enquêteur fétiche Stanislas Barbérian, Francis Groff prend un virage radical avec son nouveau roman L’homme sous le toit, publié aux éditions F. Deville. Huis-clos psychologique en forme de tragédie familiale, ce livre met en scène une cellule familiale au bord de l’implosion, à travers les regards croisés d’un père, d’un narrateur extérieur et… d’un chat.
Francis Groff a longtemps été associé à Stanislas Barbérian, cet enquêteur-bouquiniste qui déambule dans les villes wallonnes en quête de livres rares, et qui se retrouve régulièrement mêlé à des intrigues criminelles. Avec sept romans à son actif dans cette série, l’auteur avait prévu un huitième opus, qui aurait dû se dérouler à Mons. Mais un désaccord avec son éditeur a mis un terme à ce projet. Loin d’en être découragé, Groff a choisi de tourner la page en s’éloignant de son personnage fétiche. Ce changement de cap lui a permis d’explorer d’autres territoires littéraires, plus sombres, plus personnels, et nettement plus dramatiques. L’homme sous le toit s’inscrit ainsi dans une toute autre veine : celle du drame psychologique et du thriller familial, avec un ton résolument plus grave.
Le roman s’ouvre dans une petite ville française sans histoire. Dans une maison ordinaire, une famille vit un bonheur paisible, presque banal. Gabriel Lepape, sa femme Catherine, et leurs jumelles Élise et Élodie forment un foyer rythmé par les habitudes du quotidien. Mais ce fragile équilibre se fissure lorsqu’une maladie vient lentement éroder la sérénité de la maison. Ce n’est que le début. L’événement tragique qui s’annonce, mentionné à la fin de chaque chapitre comme une menace constante, finira par faire voler en éclats cette paix apparente. Le récit se resserre alors sur l’intérieur de la maison. À l’étage, dans un grenier transformé en refuge, Gabriel s’isole. Il écrit compulsivement dans un cahier. Ce décor clos, presque étouffant, sert de toile de fond à un roman où la tension affleure à chaque page.
Ce qui fait la singularité du roman, c’est son mode de narration. Francis Groff alterne entre trois points de vue : celui de Gabriel, personnage principal, celui d’un narrateur extérieur (vestiges des réflexes journalistiques de l’auteur) qui pose les faits, décrit le contexte, et offre une certaine distance analytique et enfin celui, plus inattendu, du chat de la maison. Ce dernier, témoin muet mais acéré, intervient régulièrement pour commenter les événements avec une ironie mordante.
Ce qui était intéressant, c’était de se mettre à la place de ce chat
L’animal, avec ses audaces, son sale caractère et sa lucidité cynique, apporte une touche d’humour noir bienvenue dans un récit par ailleurs empreint de gravité. Tous les trois chapitres environ, le chat « vient mettre son grain de sel », comme un contrepoint à la tension dramatique qui s’installe.
Avec L’homme sous le toit, Francis Groff fait le choix d’un style plus éloigné de la légèreté presque ludique des aventures de Barbérian. Ici, chaque personnage est scruté avec minutie.
J’ai été jusqu’à l’os de mes personnages
Le roman fonctionne comme une cocotte-minute : tout semble calme en surface, mais la pression monte, chapitre après chapitre, jusqu’à l’inévitable détonation. Groff s’attache à dévoiler les non-dits, les failles, les fragilités d’un foyer qui semble pourtant tout à fait classique. C’est aussi un roman l’impuissance, et cette manière que chacun a de fuir ou d’affronter le réel. Plus qu’un simple thriller, L’homme sous le toit est un roman d’atmosphère, où l’intime prend toute la place.
Mais l’auteur ne compte pas s’arrêter là. Alors qu’il explore aujourd’hui les ressorts du drame psychologique, Francis Groff s’apprête à (re)publier un roman écrit en 2017 mais jamais paru en librairie. Il s’agit d’un thriller d’espionnage, un genre encore différent, qui sera prochainement réédité dans une version remaniée aux éditions Edern. Et le sujet est d’une brûlante actualité : il y est question de conflits géopolitiques autour des terres rares, opposant les États-Unis et la Chine. Un thème brûlant d’actualité qui fait écho aux tensions internationales actuelles, même si le manuscrit date déjà de huit ans. Encore un changement de registre, preuve que Groff ne se laisse enfermer dans aucune case. Autant dire que ce virage pourrait bien captiver ses fans comme attirer un nouveau public, curieux de voir jusqu’où Francis Groff peut pousser sa palette d’auteur !
"Derrière chaque livre se trouve un nom, une personne" (Marek Halter). Soulevons le voile sur les auteurs et acteurs du monde littéraire qui se livrent entre les lignes.
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