Dans leur ouvrage Apprendre à apprendre, publié aux éditions de la Chronique sociale, Jean-François Horemans et Alain Schmidt proposent une approche originale de la pédagogie. En s’appuyant sur les dessins du Chat de Philippe Geluck, ils parviennent à rendre accessibles des concepts complexes et à redonner vie à des figures parfois oubliées de l’histoire de l’éducation. Un livre qui s’adresse à tous ceux qui apprennent ou font apprendre avec le désir de transmettre autrement.
L’histoire de ce livre commence à Andenne devant l’inauguration d’une statue représentant le célèbre Chat de Geluck. Celui-ci, bras écartés, tend une corde sur laquelle un ourson s’aventure avec un équilibre précaire. Ce geste de l’ourson qui ose marcher sur une corde tendue et le regard bienveillant du Chat, concentré sur sa traversée, évoquent pour Jean-François Horemans un geste pédagogique : celui de soutenir sans intervenir, d’accompagner sans imposer et d’oser se lancer dans l’inconnu. Touché par la symbolique de cette scène, il en parle à Geluck, en lui suggérant que son personnage incarne, sans le dire, une posture de pédagogue.
La réponse de Geluck ne tarde pas : « Tu peux en faire un livre, mais ne l’appelle pas La pédagogie du Chat ». De ce conseil naîtra Apprendre à apprendre, un ouvrage coécrit avec Alain Schmidt, qui fera appel à Geluck pour illustrer les différentes étapes du cheminement pédagogique décrit. Ainsi, les dessins du Chat deviennent le fil rouge d’une réflexion sur la transmission du savoir.
La première partie du livre invite le lecteur à un voyage dans le temps et la pensée de 28 grandes figures de la pédagogie, choisies pour leur apport essentiel à la compréhension de l’apprentissage. Avec un souci d’équilibre, les auteurs ont retenu quatorze femmes et quatorze hommes, connus ou méconnus. Des figures comme Boris Cyrulnik ou Philippe Meirieu y côtoient d’autres noms parfois oubliés, notamment des femmes dont les idées ont été, à tort, attribuées à des hommes ou négligées par l’histoire officielle car « la pédagogie est un monde qu’on pourrait croire très masculin mais pas du tout ! »
Chaque portrait proposé dans le livre se construit en trois temps : une courte biographie, une présentation synthétique des idées pédagogiques, puis une mise en perspective contemporaine. Il s’agit non seulement de transmettre un savoir historique, mais aussi de démontrer que nombre des problématiques éducatives actuelles ont été pensées bien avant nous. La pédagogie ne naît pas dans le vide : elle est le fruit d’héritages, de luttes, de révolutions intellectuelles souvent portées dans l’ombre.
Loin d’être un domaine réservé aux hommes, comme on pourrait le croire en feuilletant les manuels classiques, la pédagogie est aussi un champ d’innovation porté par de nombreuses femmes. Le livre rend ainsi justice à ces voix singulières et offre une galerie de penseurs et penseuses qui, chacun à leur manière, ont contribué à réinventer les façons d’apprendre.
tous ces gens vont se rejoindre à un moment donné pour montrer que lorsqu’on dit aux enfants qu’on a confiance en eux, qu’ils sont capables de faire, alors… ils font !
Dans sa seconde partie, Apprendre à apprendre développe vingt grands principes pédagogiques, directement reliés aux penseurs présentés plus tôt. Chaque principe est expliqué, illustré et accompagné d’étapes pratiques pour sa mise en œuvre, ce qui en fait un outil précieux pour les enseignants, éducateurs, parents et formateurs. Au cœur de ces principes, un message central émerge : l’importance de faire confiance à l’apprenant.
L’idée peut paraître simple, presque évidente. Pourtant, dire à un enfant qu’on croit en ses capacités, c’est lui donner la permission d’oser, d’expérimenter, de progresser.
Si on attend de savoir nager avant de plonger, on ne nage jamais
Apprendre, c’est avant tout se confronter à l’inconnu, accepter l’erreur, et avancer avec le soutien de ceux qui croient en notre potentiel.
Le livre aborde également un concept clé : la métacognition car apprendre n’est pas un réflexe automatique, mais un travail qui suppose de comprendre comment on apprend, dans quelles conditions, et avec quelles ressources personnelles. Cela demande une conscience de soi, une capacité à identifier ses propres mécanismes mentaux, ses blocages, ses besoins. Ce processus engage également l’identité : qui suis-je ? comment ai-je grandi ? comment est-ce que je perçois le monde et les autres ?
Apprendre, au fond, c’est apprendre à se connaître. C’est comprendre que nos manières de penser, de retenir et de comprendre évoluent et qu’elles sont profondément liées à notre histoire personnelle, à notre identité, à notre environnement. Le livre nous invite ainsi à dépasser l’idée d’un élève passif pour imaginer un sujet actif, capable de prendre en main ses apprentissages. Il rappelle aussi que l’école n’est pas une fabrique de résultats, mais un lieu de croissance ! Si tout le monde peut apprendre, comme le démontre l’éducabilité, encore faut-il que l’on crée les conditions qui le permettent. C’est là toute la responsabilité et la beauté du geste pédagogique.
"Derrière chaque livre se trouve un nom, une personne" (Marek Halter). Soulevons le voile sur les auteurs et acteurs du monde littéraire qui se livrent entre les lignes.
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