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Michel Wieviorka: "l'antisémitisme est une forme de racisme à part"
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Michel Wieviorka: "l'antisémitisme est une forme de racisme à part"

RCF,  -  Modifié le 7 février 2018
Plongée au cœur des causes du racisme, de l'antisémitisme et du mal qui engendre le terrorisme, avec le sociologue Michel Wieviorka.
BALTEL/SIPA BALTEL/SIPA

Cela fait plusieurs années que le sociologue Michel Wieviorka travaille sur les questions de racisme, de violence, d'antisémitisme et de terrorisme. Il revient aujourd'hui avec un dernier ouvrage: 'Face au mal, le conflit sans la violence' (éd.Textuel).
 

'L'antisémitisme transite par différentes formes'

Il y a dix jours, à Sarcelles, un enfant de huit ans portant une kippa était agressé dans la rue. Pour Michel Wieviorka, plutôt que de parle de recrudescence des actes antisémites en France, il faut préciser que 'l’antisémitisme est devenu meurtrier, ce qui n’était pas le cas dans les années 50-70 en France. Un enfant, c’est toujours terrible. Ce n’est pas le premier drame avec un enfant. Ce n’est pas complètement neuf. Il est difficile de dire que l’antisémitisme progresse ou régresse, car il transite par différentes formes qui ne montent ou ne descendent pas en même temps. Plus de violence, de menaces, mais tout cela est un peu limité à certains quartiers' explique le sociologue.

Quant aux causes de l’antisémitisme, elles évoluent. 'Il y a toujours eu de l’antisémitisme en France. Cela s’est redéveloppé dans les années 70-80 à l’extrême-droite avec le négationnisme. Il s’est développé ensuite au sein de populations issues de l’Afrique du Nord tout simplement car au sein de ces populations, des identifications soit à la cause palestinienne soit à l’islam en guerre contre l’Occident, a fait pousser cet antisémitisme. Mais il y a un autre phénomène dont on ne parle pas encore assez, c’est celui lié à Internet, un domaine où il ne doit y avoir aucune limite à la liberté d’expression' ajoute Michel Wievorka.

Pour ce spécialiste du racisme, l’antisémitisme doit rester une forme de racisme à part. 'Vous n’avez aucun peuple, aucun groupe humain, qui depuis 2 500 ans reçoit la haine d’autres groupes. Je ne dis pas que l’antisémitisme est un racisme plus grave qu’un autre. Tous les racismes sont terribles. Mais il est à mettre à part uniquement pour des raisons historiques' précise l’auteur de 'Face au mal, le conflit sans la violence' (éd.Textuel).
 

Quels processus poussent les jeunes au terrorisme ?

Face à cela, pas de recette miracle. 'C’est un effort permanent qui doit combiner plusieurs démarches. Il faut de l’éducation, il faut utiliser tout l’arsenal que nous offre la loi. Il faut être très actif en ce qui concerne Internet. Nous sommes un peu comme en 1880, l’époque où apparaît la grande presse et l’on s’aperçoit qu’il faut introduire des mesures règlementaires pour éviter que cela ne parte dans tous les sens' analyse encore Michel Wieviorka.

Au sujet du terrorisme actuel, Michel Wieviorka, observant la photo de Salah Abdeslam, s’interroge sur les processus qui auraient poussé cet homme à participer à de telles atrocités. 'Il y a trois événement qui donnent beaucoup à réfléchir. On juge maintenant des terroristes. Et certains demandent à être jugés en France. Ces gens incarnent la capacité d’un pays comme le nôtre à juger démocratiquement des gens qui  ont transgressé nos lois. Ils nous permettent de sortir la tête haute des carnages auxquels ils ont participé' lance le sociologue.

'Dans de nombreux cas, ce sont des jeunes issus de l’immigration, venant de quartiers populaires. Ils ont connu le racisme, la discrimination, la délinquance, la prison, qui ont rencontré la religion parfois très tard. Sans la religion, ils ne seraient pas passés à l’acte. Ils ont voyagé, ils ont dérivé' analyse le sociologue, qui ajoute que pour tenter de comprendre ce phénomène, la sociologie ne suffit pas. 'Il faut circuler' dit-il, entre la personnalité, et la sociologie, même s’il concède 'qu’il y a toujours une part de mystère, de hasard. « Qu’est-ce-qui fait qu’en un individu, le mal soit possible ? Là, mes compétences s’arrêtent' conclut Michel Wieviorka.

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