Mgr Emmanuel Gobilliard : « Les héros de l'évangile sont encore parmi nous, il suffit de les regarder »
Dans son nouvel ouvrage intitulé Les héros de l’Évangile sont parmi nous, publié aux éditions du Cerf, le père Emmanuel Gobillard révèle la beauté des gens qu'il rencontre, ces existences simples qui par leur humanité, éclairent la nôtre. Au micro de l'émission Des livres et vous, l'évêque de Digne raconte comment l’Évangile se prolonge aujourd’hui, dans des visages parfois inattendus. Un entretien qui révèle un regard qui console, qui relève et qui ouvre à la présence de Dieu dans l’ordinaire.
Mgr Emmanuel Gobilliard - © RCF LyonDes saints profondément humains : un Évangile qui se relie à la vie réelle
Dès les premières minutes de l’entretien, le père Gobillard confie ce qui a déclenché l’écriture du livre : une forme de lassitude devant les représentations lisses de la sainteté, trop parfaites pour nous ressembler. « On effaçait de leur vie tout ce qui était faiblesse ou fragilité… Alors que les saints de l’Évangile étaient beaucoup plus humains », explique-t-il. Pierre qui se trompe, Paul qui s’emporte : « Ils ont fait toutes les boulettes de la terre ».
Cette humanité brute l’a conduit à regarder autrement les personnes rencontrées dans son ministère : un Joseph d’aujourd’hui, une Marie-Madeleine de demain. Et pour entrer dans ces récits, il s’appuie sur une manière très incarnée de prier l’Évangile : « Je me mettais dans la scène, à la place de Pierre, de Jacques… En changeant l’angle, en montant dans l’arbre avec Zachée ».
Ce regard vivant, il l’applique aussi à la chasteté, qu’il rapproche du couple de ses parents — séparés par la guerre mais unis par la prière. La chasteté, dit-il, « c’est un ajustement dynamique à l’autre », une juste distance au cœur des relations. Un chemin pour tous, laïcs comme consacrés.
Ces "Siméon", "Anne", "La Samaritaine"... que l’on croise sans les reconnaître
Son ministère dans les Alpes de Haute-Provence l’a conduit à une tournée des Ehpad qui l’a bouleversé : « Il y avait une joie profonde… la fécondité peut se vivre dans la vieillesse et la fragilité ». Il y repère de nombreux « Siméon et Anne » : des personnes silencieuses mais essentielles, « le cœur battant » du diocèse.
D’autres rencontres surviennent au hasard d’un rayon de supermarché. Revenant de Madagascar, désemparé devant une armée de shampoings, il demande conseil à une cliente. De fil en aiguille : un échange, une prière, une blessure confiée. « J’ai rencontré la Samaritaine… J’avais besoin d’elle comme Jésus a eu besoin d’elle. »
Un soir, alors qu' André Manoukian a été invité à jouer du piano sur l'esplanade de la basilique de Fourvière, il devient aussi témoin d’une rencontre improbable entre un musicien SDF et le célèbre musicien. Sans répétition, le saxophoniste tremblant se met à jouer et à improviser un morceau de toute beauté : « André s’est arrêté… Il s’est demandé : mais qui est cet homme ? » Cette scène évoque pour lui les bergers et les mages, venant d'univers complétement différents mais réunis au pied de la crèche.
À travers ces portraits, le père Emmanuel Gobilliard partage une conviction forte : l’Évangile continue de se dire encore aujourd’hui, dans des vies fragiles et lumineuses. Et ces personnes vivent à côté de nous, si on sait les voir.
La plupart des gens sont formidables, il suffit de les regarder
Reconnaître "les saints de la porte d’à côté" : un art à cultiver
"Ils sont tellement humains, et c’est pour ça qu’ils nous ressemblent" : le livre se termine sur une invitation simple et profonde, apprendre à reconnaître en nous les multiples personnages de l’Évangile. « Je suis un peu chacun d’eux », confie le père Gobillard. Lire l’Évangile, c’est donc accepter de le laisser « se reproduire dans nos vies », pour que notre existence devienne, elle aussi, une page vivante de cette Parole qui « poursuit sa course ». Une perspective qui ouvre le cœur et le regard.


Chaque semaine, un écrivain nous dévoile son ouvrage, sa personnalité, ses passions et les coulisses de son écriture, au micro de Laetitia de Traversay. L'émission est diffusée sur RCF Lyon le vendredi à 19h et le dimanche à 17h45.
