Berceau de la viticulture mondiale, la vallée d'Areni ne représente pas qu'un intérêt historique pour les vignerons d'Auvergne Rhône Alpes. Le vignoble Arménien situé à plus de 1000 mètres d'altitude est aussi une terre d'exploration essentielle pour l'avenir de la viticulture française. Avec notamment des enjeux sur la gestion de l'eau et le réchauffement climatique.
Berceau de la vigne et du vin, l’Arménie occupe une place unique dans l’histoire œnologique mondiale. Selon la Genèse, après le Déluge, Noé aurait planté la première vigne au pied du mont Ararat, aujourd’hui en Arménie, marquant ainsi la naissance de la viticulture.
Cette tradition millénaire trouve un écho archéologique dans la grotte d’Areni-1, située dans la région de Vayots Dzor. Découverte en 2007, cette grotte a révélé le plus ancien complexe de vinification connu, daté de plus de 6 000 ans : pressoir, cuves et pépins de raisin attestent d’une production élaborée et d'échanges commerciaux intenses.
Une histoire qui se retrouve aussi dans le patrimoine végétal des vignobles arméniens comme l'explique avec fierté Zahuri Muradyian la directrice de la Fondation de la Vigne et du Vin d'Arménie "nous avons plus de 400 cépages endémiques qui ont aujourd'hui la reconnaissance de la comité scientifique internationale". Parmi eux, l’Areni Noir (ou Sev Areni) est le plus emblématique. Ce cépage cultivé depuis plus de 6 000 ans dans la région se distingue par sa grande résistance naturelle et par le fait de ne pas avoir été impacté par le phylloxéra, ce qui lui a permis de traverser les siècles sans subir de modification.
Si la qualité des meilleurs vins Arméniens n'est plus à démontrer, la filière souffre encore d'une trop grande disparité observe Isabelle Seigle Ferrand déléguée générale du comité vins Auvergne Rhône Alpes "nous avons beaucoup d’avance sur la structuration des filières, avec des comités qui sont très structurés et qui assurent la qualité de la production. L’Arménie n’a pas encore cette organisation, cette capacité à travailler de manière transversale pour accompagner le développement". C'est d'ailleurs sur ce point que l'Arménie attend l'aide de la France "vu son expérience dans la viticulture, la coopération avec la France n'a pas de prix pour nous. Notamment l'aide de la Région Auvergne Rhône Alpes pour renforcer l'oenotourisme qui est un secteur encore nouveau pour nous. C'est un axe de développement très fort dans lequel nous souhaitons investir" précise Zahuri Muradyan.
Il faut dire qu'Auvergne Rhône Alpes, et particulièrement la vallée du Rhône, a fait de la visite des domaines et des routes du vin des atouts touristiques majeurs. Avec plus de 1000 caves ouvertes aux visiteurs, la région voit l'activité fortement augmenter avec une fréquentation en hausse de 30% depuis 5 ans. En 2023, tous les vignobles français ont ainsi accueilli 12 millions d'oenotouristes, dont la moitié d'étrangers. Un intérêt pour le savoir faire des vignerons qu'Isabelle Seigle Ferrand imagine se développer en Arménie dans les années qui viennent "Ce vignoble d'Areni a tous les éléments pour être attractif à l'international. Il y a des événements et du savoir-faire. Mais il manque juste des labels, des cahiers des charges. Aujourd'hui cela entraîne trop de disparités qu'il faut arriver à gommer. La fondation de la vigne et du vin en Arménie, avec notre soutien, doit travailler sur cet axe".
Pour les producteurs français la collaboration avec l'Arménie, et notamment le vignoble d'Areni, présente un intérêt majeur "les vignes sont plantées à plus de 1200 mètres d'altitude et des expérimentations sont menées à plus de 2000 mètres. C'est un véritable enjeu pour nous en terme de changement climatique. On observe comment réagissent les cépages en fonction de leur exposition et de leur altitude. Et en cela l'Arménie nous intéresse beaucoup et alimente grandement nos travaux d'expérimentation et de recherche" explique Isabelle Seigle Ferrand qui se réjouit de pouvoir compter sur l'aide de la Région Auvergne Rhône Alpes dans le cadre de la Mission Arménie comme l'a rappelé son président Fabrice Pannekoucke.
Le travail effectué avec la région d'Areni vient aussi renforcer le projet de candidature d'une partie de la vallée du Rhône au patrimoine mondial de l'Unesco. Les collaborations internationales étant indispensables pour que le dossier soit étudié et potentiellement reconnu. Enfin l'Arménie est une terre volcanique et ses vignobles historiques pourraient contribuer au développement international du label des Vins Volcaniques initié par Pierre et Léa Desprat.
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