Le mot de la semaine : Chercheur et recherche
Ce lundi 29 septembre, plus exactement ce soir, commence la « Nuit européenne des chercheurs ». Ce mot, qui par définition correspond à des personnes ayant pour vocation la « recherche », correspondait bien aussi aux semaines que l’on traverse, chacun étant à la recherche de la meilleure formule sociale, politique, climatique, médicale, en bref, à la recherche de solutions Aussi avez-vous choisi de nous raconter ces mots, « chercheur » et « recherche ».
Jean Pruvost © Pascal HausherrJe ne suis pas sûr de passer une nuit blanche à « chercher », et à honorer de ma pensée « la nuit européenne des chercheurs », mais
« rechercher » l’origine des mots voilà qui est à ma portée et « chercher » le mot « chercher » ne manque évidemment pas de sel. Alors, on va essayer de ne pas tourner en rond mais, ce faisant, on est au cœur du sujet. Le mot « chercher » vient du latin « circum », donnant le verbe « circare », signifiant « aller autour » qui, en se déformant au fil des siècles, a abouti en ancien française au verbe « cerchier » attesté, dans la Chanson de Rolland, en 1080. Puis au XVI e siècle, « cerchier » s’est déformé en prenant la forme du verbe en usage aujourd’hui, « chercher ».
Un mot aux multiples facettes
Ainsi, dès l’origine, le mot est imagé puisqu’il s’agit de tourner autour de la vérité, autour de ce qu’on trouve pas encore, ou de ce qu’on ne retrouve plus. Dès le départ, le verbe s’adressa aussi bien à quelque chose ou à quelqu’un que l’on cherche. Au reste en consultant la première édition du Dictionnaire de l’Académie française, publiée en 1694, on constate tout de suite à travers les exemples le caractère très large du verbe. « Chercher à manger », c’est évidemment vital, « chercher du secours, de l’argent », « chercher un passage dans un livre, chercher fortune, chercher la pierre philosophale », la pierre transformant des métaux en or, aucun ministre de l’économie ne l’a d’ailleurs trouvée… Et si l’on cherche notamment des excuses, des échappatoires, on relève aussi le fait de « chercher des inventions », avec un exemple suprême alors donné, « il ne cherche plus que Dieu ». Enfin on disait couramment « chercher quelqu’un par mer et par terre » pour dire « chercher en tous lieux ».
L'origine du mot
Le mot n’apparaît qu’en 1538, en tant que « cercheur », ne prenant sa forme moderne qu’en 1636, et ce « chercheur », est bien présent dans la première édition du Dictionnaire de l’Académie certes encore loin du chercheur du CNRS, même si on encourage la vraie recherche. Voici l’exemple donné : « Vraiment vous estes un beau chercheur, ne vous amusez pas à ces chercheurs de thresors, à ces chercheurs de pierre philosophale », exemple suivi du « chercheur de franches lip[p]pées », de bons repas le « chercheur de franche lippée » étant celui faisant bonne chère aux dépens d’autrui. Quant au mot « recerchier » apparu en 1160, il désignait le fait de « parcourir en cherchant » et c’est à Blaise Pascal qu’on doit l’emploi figuré, « la recherche de la vérité ». Enfin, je n’ose pas dire que le
mot « recherche » déjà synonyme d’« enquête » au XVII e siècle, signifie également, et là je lis le dictionnaire, la « poursuite que l’on fait pour avoir une fille en mariage », avec cet exemple stupéfiant : « il a bien fait de la despense à la recherche de cette fille, de cette veuve ». Alors là, tout de suite, je vous rassure, la « nuit européenne des chercheurs » ne s’assimile en rien une chasse effrayante des célibataires à la recherche éperdue de la compagne de leur vie…


Jean Pruvost, lexicologue passionné et passionnant vous entraîne chaque lundi matin dans l'histoire mouvementée d'un simple mot, le mot de la semaine !
