Halloween, celte ou chrétien ?

Un article rédigé par Armelle Delmelle - RCF Liège, le 29 octobre 2025 - Modifié le 29 octobre 2025

Halloween, veille de Toussaint, est une fête qui nous évoque d’abord le porte-à-porte pour des friandises et des costumes monstrueux. Et pourtant, cette fête n’est à l’origine pas ce qu’on pourrait appeler satanique. Mais alors, Halloween, c’est quoi et ça vient d’où ?

Photo : Canva

D’où vient l’Halloween moderne ?

Halloween est une fête d’origine irlandaise. Lors de la famine qui toucha le pays au 18ᵉ siècle, de nombreux Irlandais ont immigré aux États-Unis, emportant leurs traditions avec eux. La fête a alors été « américanisée » avant de retraverser l’océan sous sa forme actuelle. La fête telle que nous la connaissons aujourd’hui est un mix de différentes légendes et coutumes irlandaises du 18ᵉ siècle et de traditions actuelles des USA aux accents capitalistes.

Que signifie le mot « Halloween » ?

Le mot Halloween est la contraction de « All Hallow’s Eve », qui n’est autre que l’autre nom de « All Saints’ Day’s Eve ». Traduit littéralement, Halloween veut donc dire : la veille de la Toussaint. Cela explique que cette fête soit célébrée le 31 octobre.

Le terme Halloween est donc apparu après l’an 613, année durant laquelle le pape Boniface IV a institué la fête des martyrs célébrée alors au mois de mai. C’est deux siècles plus tard que le pape Grégoire IV a étendu cette fête à tous les saints (Toussaint) et qu’elle fut fixée au 1ᵉʳ novembre du calendrier chrétien. Les historiens considèrent généralement que cette date a été choisie pour christianiser la fête de Samhain. Cependant, cela ne met pas tout le monde d’accord.

Nicholas Rogers, auteur du livre Halloween : From Pagan Ritual to Party Night, écrit :

Les fêtes commémorant les saints, par opposition aux martyrs chrétiens originels, semblent avoir été célébrées dès 800. En Angleterre et en Allemagne, cette célébration avait lieu le 1ᵉʳ novembre. En Irlande, elle était commémorée le 20 avril, une chronologie qui contredit l'opinion largement répandue selon laquelle la date de novembre aurait été choisie pour christianiser la fête de Samhain.

Que l’on soit d’accord ou non sur l’origine celte ou chrétienne de cette fête, rien ne nous empêche de nous poser la question de ce qu’était Samhain.

Qu’est-ce que le culte de Samhain ?

Samhain était l’une des quatre grandes fêtes qui marquaient le calendrier celte, aussi bien en Irlande qu’en Gaule (les Gaulois faisant partie des peuples celtes). Chez nous, cette fête était appelée Samonios. Nous en avons d’ailleurs une trace écrite retrouvée sur le calendrier dit de Coligny à Lyon.

La fête de Samhain marquait la fin de l’été, les récoltes et le début de la nouvelle année. Selon les croyances de l’époque, c’est à ce moment-là de l’année que la limite entre le monde des morts, celui des dieux et le nôtre était la plus mince. Cela permettrait aux esprits de visiter notre monde.

Cette célébration durait trois jours : du 31 octobre au 2 novembre. La nuit du 1ᵉʳ au 2 novembre était réservée à l’alliance avec les ancêtres passés dans l’autre monde. Durant ce temps de communication avec l’« au-delà », les Celtes laissaient « les ombres » émerger autour d’eux afin de les accueillir.

Des feux étaient allumés pour conjurer la noirceur de l’hiver et les esprits mauvais qui pouvaient s’y cacher, comme un rempart contre les esprits malveillants. Si toutefois certains venaient à se promener parmi les vivants, ils auraient pris plaisir à jouer de mauvais tours à ces derniers. Pour y échapper, certaines personnes auraient pris l’habitude de se déguiser. Cela leur aurait permis de se fondre dans la masse et d’éviter les mauvais coups des esprits.

La fête de Samhain a-t-elle été christianisée ?

L’Irlande a été christianisée au 5ᵉ siècle par saint Patrick, qui est entre-temps devenu patron du pays. L’une des façons de christianiser un pays était de s’emparer de ses lieux de culte et de reprendre les traditions de son peuple en leur donnant une forme chrétienne pour faciliter le processus de conversion.
Selon la BBC, une lettre envoyée par le pape Grégoire Iᵉʳ à l'évêque Mellitus (évêque de Canterbury) au VIe siècle, dans laquelle il suggérait que les lieux de culte non chrétiens existants soient adoptés et consacrés à des fins chrétiennes, est souvent citée comme preuve à l'appui de cette méthode d'acculturation.
Enfin, l'Encyclopaedia Britannica indique que la date du 1ᵉʳ novembre a sans doute été choisie par le pape Grégoire IV « dans le but de supplanter la fête païenne par une célébration chrétienne ».

Quand a émergé Halloween ?

La fête d’Halloween, quant à elle, voit le jour huit à neuf siècles après la décision de Grégoire IV, soit aux 17ᵉ et 18ᵉ siècles. À cette époque, la couronne d’Angleterre aurait réintégré cette fête en la remodelant afin de satisfaire le besoin d’identité culturelle des Irlandais, peuple alors délaissé et soumis à la famine.

Les traditions d’Halloween qui ont traversé le temps

Certaines traditions de la fête de Samhain ont donc traversé les âges et sont encore appliquées aujourd’hui. Le rite de se déguiser et d’échanger des offrandes pour ne pas subir un mauvais sort, par exemple. La version actuelle d’Halloween a pris des allures festives et de démesure aux USA, en en faisant une « Halloween » plus capitaliste. L’Europe reprend depuis des années cette fête d’« Halloween », grand mélange de traditions d’hier et d’aujourd’hui, d’Irlande et du pays de l’oncle Sam en somme.

Il peut cependant être utile de noter que le personnage de la sorcière n’est pas irlandais, mais une référence écossaise. En effet, il n’y a pas eu de chasse aux sorcières sur l’île d’émeraude et la fête de Samhain n’était pas fêtée en Écosse.

Autre tradition : les citrouilles sculptées que l’on met à nos fenêtres. Elles font référence à la légende de Jack à la lanterne. Cet homme aurait, de son vivant, fait un pacte avec le diable, mais aurait réussi à se jouer de ce dernier. En conséquence, lors de son décès, il fut non seulement refusé par saint Pierre au Paradis, mais également par le diable aux portes des Enfers. Il fut donc condamné à errer entre les deux mondes, muni uniquement d’une lanterne creusée dans un navet.

La tradition a donc voulu que les Irlandais placent des lanternes similaires à leurs fenêtres pour repousser cet esprit perdu en lui faisant peur, comme lui leur faisait peur.

Un nouvel Halloween pour demain ?

Si les accents du capitalisme ont frappé durement la fête d’Halloween, ne pourrait-on pas la reconsidérer pour lui donner une forme plus sobre et responsable, en adéquation avec les valeurs chrétiennes ?