Florentine Rey est poète et performeuse. Elle dit/performe ses textes autour du corps, du féminin et du monde qui ne tourne pas rond. Une proposition énergique qui expérimente le lien étroit entre le corps et les mots. Cris de mouton, pots de yaourts, coquilles, biscottes… Un univers étrange qui surprend le spectateur tout en créant avec lui une complicité libératrice et joyeuse.
Florentine Rey - « Poésie performances » - Editions Delatour France - 15 €
Il y a bien longtemps avant de faire de le buzz dans la poésie-performance Florentine Rey s’éclatait avec « Blandine Marcel ». Une petite fille à l’imagination délirante dont les aventures pas piquées des hannetons ont été éditées chez Michalon. Dans le deuxième volume, si j’ai bonne mémoire, Blandine « une bibiche flamboyante » était partie d’un côté et Marcel « créature molle à trois yeux » de l’autre.
Pourquoi ce retour en arrière ? Pourquoi ce flash-back comme on dit au cinéma ? Pour vous prévenir tout simplement que si aujourd’hui Florentine Rey fait « parler son corps » au cours de performances endiablées ce n’est pas pour mettre en exergue des tournures gentillettes du style « la biche brame au clair de lune et pleure à se fondre les yeux » mais autour de formules d’une toute autre épaisseur. Des poèmes qu’elle dit échafauder « dans le bazar ambiant » c'est-à-dire dans le monde un tantinet déboussolé d’aujourd’hui. Un monde où la violence est souvent au rendez-vous.
Parfois c’est le texte - du genre « si j’avais des couilles, je trouverais d’autres solutions que des kilomètres de murs au problème de l’immigration » - qui est le déclencheur. D’autres fois c’est le geste qui s’impose avant les mots. La gestuelle qui se met en marche toute seule excitée par le spectacle d’une situation délirante.
Parfois c’est l’humour - noir de préférence - qui l’inspire : « Au nom du monde pourri que nous avons créé et que nous ne sommes pas prêts à voir s’effondrer : prions ! ». Parfois c’est la désespérance qui s’impose : « Un jour je cesserai de vouloir. Je me laisserai couler au fond d’un lac. Les poches remplies de cailloux ». Mais toujours la fantaisie bat la mesure. Celle des mots, soutenue par les rythmes du corps qui donnent à la performance sa force et son pouvoir.
Une performance, précise Florentine Rey, c’est « transformer l’énergie en mots, faire sortir les mots du corps puis laisser le corps les reprendre ». C’est une aventure qui a pour cousin le happening. Une pratique artistique qui a son origine dans la première moitié du XXe siècle - à moins que troubadours, trouvères et ménestrels en soient les lointains parents. Un art que d’autres Stéphanois, Orlan et Pierre Pinoncelli, ont le génie, le courage et l’instinct de faire rayonner depuis bien longtemps déjà au delà des frontières. Jamais deux sans trois affirme le dicton.
© clichés Louis Reynard
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