Violences policières: "aujourd'hui tout se passe dans l'affrontement" estime la présidente de l'ACAT
Outre son combat contre la torture et en faveur de l’abolition de la peine de mort dans le monde, depuis 2016, l’ACAT renseigne et se mobilise contre les violences policières en France. "Notre association s’est fondée sur l’article 5 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, qui dit que nul ne sera soumis à la torture. Cet article a un complément : ni à des peines ou traitements humains dégradants. En s’occupant de dénoncer des exactions d’où qu’elles viennent, on est dans notre mandat. En dénonçant des exactions partout dans le monde, la moindre des choses est de les dénoncer quand elles se produisent aussi chez nous" explique Bernadette Forhan, la présidente de l’ACAT.
"Tout se passe dans l'affrontement"
Depuis plusieurs mois, des vidéos circulent régulièrement sur les réseaux sociaux, au gré des manifestations, montrant des gestes violents de la part des forces de l’ordre, sur des manifestants. Aujourd’hui, la police et le pouvoir politique sont montrés du doigt pour leur gestion des mouvements sociaux. "Les réseaux sociaux ont une action très importante dans cette dénonciation. Mais c’est toujours à prendre avec des pincettes. Il y a des informations non-vérifiées. Tout va très vite" ajoute…
Cela dit, Bernadette Forhan précise que dès lors que l’on évoque les violences policières, il faut également prendre en compte les violences à l’encontre des policiers. "L’un ne va pas sans l’autre. On est dans une société qui se montre de plus en plus violente et agressive, par manque de dialogue. On a détricoté du lien social un peu partout, et aujourd’hui on s’étonne que tout se passe dans l’affrontement, et jamais dans le dialogue. On ne prend pas le temps de se poser autour d’une table, pour discuter" analyse la présidente de l’ACAT.
Des policiers formés aux interpellations appelés pour du maintien de l'ordre
Cette dernière rappelle pourtant qu’après les attentats de Charlie, la police a été mise au pinacle. "Les gens prenaient en compte que parmi les morts, il y avait des policiers. Maintenant, ils sont tous considérés comme des affreux. Je ne pense pas que cela vienne des policiers. Personnellement, j’aurai tendance à mettre la responsabilité un peu au-dessus" estime Bernadette Forhan, citant notamment les chaînes de commandement.
Dans un tel contexte, il convient de tenter de placer le curseur au bon endroit, et d’essayer de distinguer un usage légitime de la force, d’un abus de pouvoir. "Qu’est ce qu’on va donner comme ordres ? Qu’est ce qu’on donne comme consignes ? Après quatre ans d’état d’urgence, les manifestations des Gilets jaunes, on a épuisé les forces classiques de maintien de l’ordre, et on est allé chercher des policiers qui n’étaient pas formés au maintien de l’ordre. Ce n’est pas le même travail que celui de la BAC. Ils sont formés à l’interpellation, pas à la mise à distance. C’est un contexte général de violence" précise la présidente de l’ACAT.
La responsabilité du politique
Depuis une quinzaine de jours, on observe un changement de ton de l’exécutif face à la multiplication des dérives policières. Emmanuel Macron a demandé "la plus grande déontologie", Christophe Castaner a dénoncé des "croche-pieds à l’éthique". "Il était temps. Ils sont un peu lents à la détente. Ce sont les politiques qui déterminent ce que l’on doit faire dans ces cas là" dénonce Bernadette Forhan.
Face à cela, la présidente de l’ACAT croit qu’une autre voie est possible, en matière de maintien de l’ordre. "On pourrait voir ce qui se fait chez nos voisins. Nous sommes les seuls à utiliser des grenades, qui sont des armes de guerre. Il y a un souci. Ne sommes-nous pas assez malins pour nous débrouiller autrement ? Ce n’est pas normal" conclut-elle.
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