L'impôt ne commande pas nos générosités
Les divorces sont onéreux ; celui intervenu entre la fiscalité et la solidarité ne fait pas exception ; il blesse l’action engagée auprès des personnes fragilisées. Le sujet est suffisamment grave pour ‘mettre les pieds dans le plat’ ou plutôt l’assiette fiscale qui, avec le nouvel impôt sur la fortune immobilière (IFI), est évaluée à 850M€ contre 5 Md€ pour la défunte ISF.
La table de la solidarité est renversée. L’économie sociale et solidaire est pour le moins secouée, alors qu’elle secourt bien des personnes en recherche d’un toit, d’un travail… Habitat et Humanisme, sans cette épargne, n’aurait pu loger 22 000 foyers en souffrance et les accompagner pour les aider à se reconstruire. Le rapport de Jean-Louis Borloo rappelle la nécessité de mettre ‘la République’ dans ces quartiers de ban accablés par tant de difficultés et de désespoir que l’heure est de retisser l’unité nationale ; elle nécessite confiance et investissements.
Une mixité s’impose ; la construction de logements à vocation d’insertion doit s’accélérer en la corrélant à la formation professionnelle. A mal nommer les choses, on les aggrave (Camus). Trop longtemps, l’économie solidaire a été caricaturée par des expressions dommageables, niches, béquilles fiscales, alors qu’elle est réductrice de la misère et la précarité. Qui peut le contester ? Une économie, relevant de la mission du bien commun, mérite d’être saluée, encouragée, développée. La contribution de l’Etat inférieure à 9 M€, via les dispositifs TEPA et Madelin, a un impact tout à fait insignifiant au regard des entreprises ESUS, contribuant à défendre les plus vulnérables.
Si la fiscalité est un levier efficace pour favoriser les souscriptions au sein des entreprises solidaires ; elle n’est pas la seule motivation, observant que, majoritairement, les actionnaires maintiennent leur participation au capital, longtemps après la durée des 5 années nécessaires à l’éligibilité de l’avantage fiscal. L’Administration fiscale diminue son soutien, l’affectant à l’IFI et au dispositif Madelin sur l’IRPP. Or l’heure n’est pas de réduire la voilure, mais d’être davantage là où des êtres souffrent.
Il faut être aveugle pour ne pas voir les fragilités et sourd pour ne pas entendre les cris qu’elles suscitent. Que faire ? la réponse est de l’ordre d’une éthique de responsabilité : dire non à l’inacceptable. Et si ces 5 Md€ - disponibles pour n’être plus déclarés au titre de l’ISF - se présentaient comme un moyen de déclaration de guerre contre la misère, en investissant dans une économie riche d’humanité, attentive aux vulnérabilités. Qui peut rester indifférent au fait que des enfants ont un présent si difficile qu’il compromet leur avenir. Qui peut demeurer étranger à la situation des personnes isolées, en perte d’autonomie, peinant à trouver un habitat adapté. Qui ne peut pas comprendre l’inquiétude des soignants pour leurs patients confrontés à un tel isolement que les soins à domicile sont impossibles, d’où la recherche d’une alternative à l’hospitalisation. Que d’appels reçus restent en souffrance. L’impôt tue l’impôt. Son absence ne viendrait-elle pas faire naître paradoxalement une solidarité s’exerçant au nom d’une liberté toute intérieure.
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