Le cheval de trait, allié discret de la santé des forêts
À la foire agricole de Libramont, la démonstration de débardage au cheval a attiré les curieux. Derrière ce savoir-faire ancestral, des enjeux cruciaux se dessinent : préserver les sols, accompagner la résilience des forêts et redonner sa place à un compagnon de travail oublié. Rencontre avec Sébastien, de Pachalab, et Xavier, du Comité européen du cheval de travail.
©CECTSur le site animé de la foire agricole de Libramont, les chevaux de trait impressionnent par leur puissance tranquille. Dans un coin du terrain, des démonstrations de débardage rappellent que cet usage, bien que marginalisé, reste une réalité dans certaines régions forestières de Belgique.
En Belgique, c’est surtout dans les massifs boisés de l’Ardenne que le cheval est encore employé. Là où les peuplements sont denses, et où les machines peinent à se frayer un passage, l’animal se révèle particulièrement efficace.
Le travail consiste à tirer les troncs d’épicéas ou de douglas, une fois coupés et ébranchés, jusqu’aux layons ou aux coupe-feux. De là, les tracteurs équipés de pinces prennent le relais, rassemblent les bois et les acheminent vers les chemins forestiers où les camions de transport attendent.
L’ombre portée de la mécanisation
Depuis plusieurs décennies, la mécanisation a bouleversé les pratiques sylvicoles. Les gestionnaires forestiers ont progressivement adapté leurs méthodes pour faciliter l’accès des machines, même dans les parcelles densément peuplées. Résultat : le nombre de débardeurs à cheval a drastiquement diminué.
Pourtant, l’efficacité brute des engins lourds cache des effets collatéraux inquiétants. Le passage répété de machines crée des ornières profondes, tasse les sols, détruit la microfaune et compromet la régénération des jeunes plants. À long terme, l’équilibre biologique des sols en souffre.
Le cheval, lui, laisse une empreinte minime. Son poids, réparti sur quatre appuis, limite le tassement et préserve l’aération des sols. Un sol asphyxié ne peut plus accueillir correctement les jeunes racines, et toute la biodiversité en pâtit.
Autre atout : en se faufilant entre les arbres, le cheval respecte la régénération naturelle et les jeunes pousses, là où une machine lourde écraserait tout sur son passage.
Cette légèreté en fait un allié précieux dans les zones sensibles, comme les pentes, les milieux humides ou les forêts de protection.
Des forêts en quête de résilience
Les observations scientifiques le confirment : les massifs forestiers européens montrent des signes de fragilité croissante. Tempêtes, sécheresses, parasites… autant de menaces accentuées par la hausse des températures.
Face à ce constat, les gestionnaires forestiers misent sur la résilience : diversifier les peuplements, introduire des essences plus résistantes, maintenir un couvert végétal continu, favoriser la régénération naturelle. Et dans cette équation, le respect du sol devient central.
Le cheval s’inscrit alors comme un outil cohérent avec ces nouvelles orientations. En limitant les dégradations, il participe à la construction de forêts capables d’absorber les chocs climatiques.
Reste une question : le débardage au cheval peut-il retrouver une place significative face à la machine ? Probablement pas en termes de volume. Mais dans une logique de complémentarité, son rôle est loin d’être anecdotique.
Il faudra aussi former de nouvelles générations de débardeurs, soutenir les initiatives locales et redonner de la visibilité à ce métier exigeant.


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