Frédérique Badoux : explorer le chaos du TDAH pour mieux comprendre et inclure
Diagnostiquée TDAH à presque cinquante ans, l’écrivaine Frédérique Badoux publie Petit manuel du chaos. Entre récit intime et enquête fouillée, elle s’attaque à un sujet qui divise la psychiatrie, interroge l’école et met à l’épreuve nos institutions. Son objectif : éclairer un trouble encore méconnu et ouvrir la voie à une société plus inclusive.
©Frédérique BadouxLe trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) reste l’un des diagnostics les plus controversés en psychiatrie. Pathologie génétique ? Conséquence de traumatismes précoces ? Simple problème éducatif ? Les débats traversent la médecine et l’opinion publique depuis des décennies. À cela s’ajoute une autre question brûlante : faut-il privilégier les traitements médicamenteux ou les approches comportementales ?
Face à ces querelles d’experts, Frédérique Badoux a choisi de prendre une autre voie : raconter le TDAH de l’intérieur. Dans Petit manuel du chaos, elle tisse un texte à double voix : celle des études et des théories qu’elle a consultées, et celle de son expérience personnelle, livrée en italique. Une manière de sortir des abstractions et de redonner chair à un trouble qui bouleverse les existences.
Un diagnostic tardif, vécu comme une révélation
Lorsque le diagnostic tombe, à l’hôpital psychiatrique, Badoux a 50 ans. Elle y était admise non pas pour cela, mais à la suite d’un nouvel effondrement psychique et physique, comme elle en avait connu tant d’autres. Dix jours d’observation plus tard, les médecins posent des mots sur ce qui jusque-là n’était qu’énigme et souffrance : TDAH. Le choc est immense.
Je voulais comprendre pourquoi le chaos revenait sans cesse dans ma vie
Loin de se contenter de l’étiquette médicale, elle décide alors d’explorer elle-même ce trouble, de l’étudier et de le mettre en récit. « C’est une petite revanche », dit-elle, évoquant ce besoin de reprendre la main sur une réalité souvent objectivante. L’écriture devient outil de compréhension, moyen d’organiser la pensée et de mettre en lumière ce qui, jusque-là, restait dans l’ombre.
Une histoire familiale qui se répète
En retraçant son parcours, Badoux découvre que le TDAH s’inscrit aussi dans une histoire familiale. Son fils, longtemps empêché par une phobie scolaire et divers troubles « dys », est lui aussi diagnostiqué à 17 ans. Son vécu fait écho à celui de sa mère, révélant la dimension héréditaire de ce trouble qui se transmet sans toujours être nommé. Le père de l’autrice, lui, n’a jamais été diagnostiqué, mais présentait déjà les signes d’un TDAH non reconnu.
Cette répétition familiale souligne un enjeu majeur : l’importance de reconnaître la personne dans sa singularité, plutôt que de la juger inadaptée. « La reconnaissance de la personne telle qu’elle est, c’est vraiment important », insiste Badoux, qui voit dans cette prise de conscience une condition essentielle à l’estime de soi et à l’inclusion.
Le TDAH comme miroir de notre société
Mais Petit manuel du chaos dépasse largement le seul témoignage. C’est aussi un livre-document, nourri d’une recherche quasi journalistique sur la variété des points de vue scientifiques et pédagogiques autour du TDAH. Il interroge surtout la façon dont nos institutions réagissent face à cette neurodiversité.
Système scolaire rigide, normes sociales peu flexibles, mégapoles étouffantes : tout semble accentuer les difficultés des personnes TDAH. Pour Badoux, c’est une véritable « question de civilisation ». Elle appelle à imaginer une société qui offre plus d’espace, plus de liens humains, plus de sens dans l’apprentissage et le travail. « J’ai l’impression que le capitalisme, en général, ne fait pas de sens », confie-t-elle, soulignant combien l’organisation actuelle du monde est en friction avec les modes de fonctionnement des personnes neuroatypiques.
Avec ce livre, l’autrice espère donc non seulement mieux faire connaître le TDAH, mais aussi participer à un changement de regard. En mettant en lumière les parcours souvent chaotiques qu’il entraîne, elle plaide pour un mieux vivre ensemble, en diversité, loin des stigmates et des exclusions.


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Ce nom provient de la contraction de "la famille c'est fantastique".
L'émission abordera des thèmes en lien avec la famille, l'éducation, ... la parole sera donnée tantôt à des experts, tantôt à des familles.
