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Franck Zeltz "Le mode de vie des gens du voyage évolue"

Franck Zeltz "Le mode de vie des gens du voyage évolue"

Un article rédigé par Florian PERRAY - RCF Anjou, le 10 juillet 2025 - Modifié le 10 juillet 2025
L'invité de RCF Anjou"Abandonner la caravane ? C'est extrêmement difficile"

Hier, mercredi 9 juillet, le nouveau schéma départemental d’accueil et d’habitat des gens du voyage (2025-2031) a été officiellement signé. Préfecture et collectivités se sont engagées à construire cinq nouvelles aires permanentes, 11 aires de petits passage et pas moins de 81 terrains familiaux locatifs en Anjou. Des aménagements qui vont permettre, pour les familles qui le souhaitent, de s’implanter plus durablement sur un territoire. Car aujourd’hui, le mode de vie des gens du voyage évolue. C’est ce que nous a confié Franck Zeltz, représentant de la communauté des gens du voyage, qui est également pasteur évangélique Vie et Lumière à Angers.

 

Franck Zeltz (à gauche) et les cosignataires du schéma départemental d'accueil et d'habitat des gens du voyage ©Préfecture de Maine-et-LoireFranck Zeltz (à gauche) et les cosignataires du schéma départemental d'accueil et d'habitat des gens du voyage ©Préfecture de Maine-et-Loire

RCF : En quoi consiste ce schéma départemental d'accueil et d'habitat des Gens du voyage dans le département ?

Frank Zeltz : Il s'agit avant tout de nous apporter une meilleure stabilité, notamment des aires d'accueil bien conçues avec des emplacements individuels et des blocs sanitaires, ainsi que des terrains familiaux pour les regroupements. Le schéma prévoit également un accès à la propriété avec des maisons en dur, ce qui est important car nos modes de vie évoluent. Si par le passé nous étions sur des déplacements nationaux toute l'année, aujourd'hui nous nous déplaçons principalement sur une échelle régionale en hiver et nationale l'été. Nous avons besoin de ces "attaches" pour éviter de nous retrouver dans des situations illicites ou dans des lieux inadaptés, qui peuvent malheureusement provoquer des désagréments.

 

On souffre encore des clichés de « voleur de poule ou d'enfant » .... 

 

RCF : Justement, l'arrivée des Gens du voyage provoque parfois des tensions avec les sédentaires. Ce genre de schéma peut-il apaiser la situation ?

FZ : Je pense que oui, ça va apaiser la situation. Les désagréments surviennent souvent à cause d'une stigmatisation ancienne, avec des clichés comme « voleur de poule, voleur d'enfant ». Aujourd'hui, il faut dépasser cela et privilégier le dialogue. Il est important que les élus viennent à notre rencontre lorsque nous arrivons, afin de trouver des solutions concrètes. En général, les choses se passent plutôt bien.

 

RCF : Qu'est-ce qui va changer concrètement avec ce nouveau schéma départemental ?

FZ : C’est l'espérance est d'avoir plus de terrains pour nous accueillir, afin que nous soyons moins dans des zones ou situations illicites, d'être plus tranquille et de pouvoir passer l'hiver sur place au lieu de seulement 8 à 10 jours, ce qui signifie aussi moins bouger. Cela, c'est très important.

 

RCF : Les attentes des Gens du voyage ont évolué. C’est tout votre mode de vie qui change ?

FZ : Oui, c'est un peu ça. Aujourd'hui, nos enfants sont scolarisés toute l'année, ce qui est beaucoup plus simple pour eux. Notre mode de vie change aussi via le travail. Pour la plupart d'entre nous, nous avons désormais des entreprises individuelles qui fonctionnent par clientèle, ce qui nous pousse à rester de plus en plus souvent dans les mêmes régions. La plupart d'entre nous ont des métiers stables : certains travaillent en intérim, d'autres en CDI, d'autres encore ont leur propre entreprise déclarée. À part quelques-uns qui font encore du démarchage ou travaillent de leurs mains, nous essayons au maximum de nous « rentrer dans les cases », tout en conservant notre mode de vie, car c'est ce qui fait notre identité.

 

RCF : Ces changements, vous les incarnez personnellement puisque vous n’habitez plus en caravane…

FZ : En effet, je n'ai plus de caravane depuis une dizaine d'années. J'ai eu accès à la propriété, je suis logé sur un terrain familial qui m'est loué. Mais cela a été mon choix personnel. Je ne vous cache pas que dans un premier temps, il a été difficile pour moi de me séparer de la caravane. Nos anciens, qui ont passé une vie complète dans 16 m², se retrouver dans une maison de 80-100 m² et être « isolé du monde » – parce que quand on est en caravane, on entend les bruits extérieurs comme la pluie ou le vent, alors qu'en maison, on ne les entend plus – c'est quelque chose qui manque un peu. On se lève le matin en se disant « il y a eu du vent cette nuit » ou « il a plu », mais on n'a rien entendu, on est complètement isolé. Après, c'est vrai que pour beaucoup, c'est très difficile et je pense que notre mode de vie ne changera pas pour la plupart d'entre nous.

 

RCF : Vous avez donné l'exemple des terrains familiaux. Cela peut être une solution de compromis ?

FZ : C'est une solution, parce que cela reste un mode de vie en caravane, en famille. Les aires d'accueil sont très bien et heureusement que nous les avons, mais cela reste une vie en communauté où l'on n'est pas forcément avec de la famille, et on peut se retrouver avec des personnes qui causent des nuisances. Cependant, ce n'est pas facile de mettre ces projets sur pied. Je me mets à la place des communes, cela coûte malheureusement beaucoup d'argent et ce n'est pas évident à réaliser.

© RCF Anjou
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
L'invité de RCF Anjou
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