Faux produits, vrais dangers, la Côte d’Azur en première ligne contre la contrefaçon
Lundi, à Cannes, l’Union des fabricants (Unifab) a lancé sa nouvelle campagne nationale contre la contrefaçon. Loin de se limiter au luxe, le phénomène touche les produits du quotidien et gangrène l’économie locale comme nationale. Sur la Côte d’Azur, où les saisies explosent, élus, douaniers et industriels sonnent l’alerte.
Objets contrefaits exposés à la mairie de Cannes – RCFÀ la mairie de Cannes, des cartons remplis de produits illégaux, parfums de marque, jouets pour enfants, faux billets, lunettes et composants automobiles, sont exposés pour illustrer l’ampleur du phénomène. Selon Roger Combe, directeur régional des douanes à Menton, "230 000 articles ont été saisis dans les Alpes‑Maritimes en 2024, et déjà 300 000 pour le premier semestre 2025 ". Ces chiffres s’inscrivent dans un contexte où la contrefaçon représente désormais 4 à 5 % du commerce mondial.
Le maire David Lisnard rappelle que Cannes, du fait de son port accueillant régulièrement des paquebots, constitue " un carrefour commercial, avec le plus gros ratio de vitrines dans le département ", ce qui attire chaque semaine des vendeurs à la sauvette : "Chaque paquebot qui arrive, il y a une dizaine de vendeurs de contrefaçon qui arrivent aussi ", souligne‑t‑il. L’impact va bien au‑delà des pertes de chiffre d’affaires, la France perd plus de 15 milliards d’euros chaque année en recettes fiscales, tandis que des dizaines de milliers d’emplois sont menacés dans le luxe, l’industrie pharmaceutique et l’automobile.
Des impacts sanitaires, sociaux et environnementaux
Delphine Sarfati‑Sobreira, directrice générale de l’Unifab, alerte sur les conséquences qui dépassent largement le cadre économique. Elle rappelle que "les conséquences de la contrefaçon ne sont pas uniquement économiques, elles sont aussi environnementales, sociétales, elles sont sanitaires". Les produits issues de circuits clandestins peuvent présenter des risques de toxicité ou de défaillance mécaniques, des cosmétiques contaminés, des plaquettes de frein défectueuses ou des jouets contenant des substances interdites.
"Les usines qui fabriquent de la contrefaçon font fi de tout ce qui est environnement… Les déchets sont reversés dans les rivières, les déchets toxiques", explique Sarfati‑Sobreira. Elle insiste également sur la dimension humaine, conditions de travail indignes, recours au travail des enfants et des bénéfices qui alimentent parfois des réseaux de criminalité organisée, voire terroristes.
Déconstruire le lexique des dupes et coordonner la riposte
Face aux stratégies marketing des contrefacteurs, Unifab dénonce l’usage de termes édulcorés " dupe ", " clone ", "générique " destinés à banaliser l’illégalité. Entre avril et juin, plus de dix millions d’impressions ont été générées par les 11 visuels de la campagne, chacun renvoyant à un QR code vers un mini‑lexique en ligne expliquant que, peu importe le vocabulaire, tous sont des contrefaçons punies jusqu’à 750 000 € d’amende et sept ans de prison.
Parallèlement, Unifab a renforcé la formation des forces de l’ordre : depuis 2019, 1 200 gendarmes du littoral ont suivi un module dédié à l’identification des produits contrefaits. Les quatre axes de la riposte consistent à renforcer la coopération entre marques et douanes, développer la proximité avec les commerçants, multiplier les actions de sensibilisation et assurer une répression continue. La police municipale de Cannes a déjà dressé plus de cent procès‑verbaux et participe à des opérations coordonnées avec la douane de Menton et la direction régionale de la police aux frontières.

