JavaScript is required
Accueil
Claude Mangin, en marche pour la liberté des prisonniers sahraouis

Claude Mangin, en marche pour la liberté des prisonniers sahraouis

Un article rédigé par Baptiste Imbert - RCF Poitou Deux-Sèvres, le 8 avril 2025 - Modifié le 11 avril 2025

De passage à Poitiers dans le cadre d’une marche militante de 2 000 kilomètres, Claude Mangin dénonce la détention de son mari, Naâma Asfari, emprisonné au Maroc depuis 2010. Sa venue dans la Vienne, soutenue par la Ligue des droits de l’Homme, a suscité une vive contestation de la part de membres de la communauté marocaine locale.

Claude Mangin, dont le mari est enfermé au Maroc, de passage à Poitiers.Claude Mangin, dont le mari est enfermé au Maroc, de passage à Poitiers.

À Poitiers, la venue de Claude Mangin n’est pas passée inaperçue. Le 7 avril, la militante engagée pour la cause sahraouie a fait escale à la maison de la Gibauderie. Elle y a installé une exposition et animé une rencontre avec le public autour de son combat pour la libération des prisonniers politiques sahraouis. Une étape parmi les nombreuses prévues dans sa “Marche pour la liberté” débutée à Ivry-sur-Seine. Mais son passage a aussi ravivé les tensions autour de la question du Sahara occidental.

Un territoire disputé depuis près de cinquante ans

Le Sahara occidental, anciennement colonie espagnole, est un territoire situé au sud du Maroc, au nord de la Mauritanie. Depuis le départ de l’Espagne en 1975, il est considéré comme territoire non automne par l'ONU. Le Maroc contrôle 80% du territoire, tandis que le Front Polisario, soutenu notamment par l’Algérie, milite pour l’indépendance du territoire. En 1991, un cessez-le-feu a été signé sous l’égide de l’ONU, avec la promesse d’un référendum d’autodétermination qui n’a jamais eu lieu. Depuis, les tensions perdurent. Le conflit, souvent qualifié de « gelé », connaît des flambées de violence ponctuelles et maintient des milliers de Sahraouis dans une incertitude politique et sociale.

Une marche longue de 2 000 kilomètres

Depuis le 4 mars dernier, Claude Mangin arpente les routes de France avec un objectif bien précis : rallier Kénitra, au Maroc, ville où son mari, Naâma Asfari, est détenu depuis 2010. Militants sahraoui et membre du Front Polisario, Naâma Asfari a été arrêté en marge du démantèlement du camp de Gdeim Izik, considéré par certains observateurs comme un des déclencheurs du Printemps arabe. Il a été condamné à trente ans de prison, à l’issue d’un procès contesté par plusieurs ONG internationales.

« Il a été torturé, jugé sur la base d’aveux extorqués, dans un tribunal militaire qui n’avait pas à le juger, dénonce Claude Mangin. Cela fait quatorze ans qu’il est enfermé. » Au fil des années, elle a multiplié les mobilisations pour dénoncer les conditions de détention de son mari et des autres prisonniers sahraouis. Mais cette marche revêt une dimension plus personnelle : « Je n’avais plus la force de rester passive. Je voulais transformer ma douleur en une action visible, puissante, pour briser le silence. »

Un combat pour les droits humains

Claude Mangin poursuit sa mission : « J’essaie d’expliquer pourquoi je marche, pourquoi la situation des prisonniers sahraouis mérite d’être connue. » Elle le fait notamment à travers une exposition installée sur place, qui retrace l’histoire du Sahara occidental, ses enjeux géopolitiques et la répression subie par certains militants.

« On parle très peu de cette région, regrette Claude Mangin. Pourtant, il y a là-bas des gens qui souffrent. Mon mari est l’un d’eux. Mais il y en a d’autres, comme Mohamed Bourial ou Sidahmed Lemjayed. Ce sont des noms qu’on n’entend jamais dans les médias.

Engagée de longue date, Claude Mangin n’en reste pas moins lucide sur l’impact de son action. « Je ne fais pas ça pour être applaudie. Je le fais parce que c’est mon mari, parce que c’est insupportable de le savoir en prison et de ne rien faire. Mais je ne veux pas devenir une icône. »

Poitiers était la quatrième ville-étape de cette marche, après Ivry, Orléans et Tours. Mais l’accueil y a été particulièrement tendu. Le lundi 7 avril, une vingtaine de manifestants se sont rassemblés devant la maison de la Gibauderie pour dénoncer la venue de la militante. Membres du collectif de la communauté marocaine et franco-marocaine de Poitiers, ils dénoncent une “instrumentalisation politique” d’une affaire judiciaire.

Elle dit aussi comprendre les réactions hostiles : « Je ne veux pas que les gens se sentent attaqués. Mais ce que je dénonce, ce sont des faits. Ce n’est pas contre le peuple marocain, c’est contre un système de répression. »

Les tensions se sont brièvement invitées à l’intérieur de l’établissement, avant que les membres du collectif ne soient invités à sortir, dans le calme, par les responsables de la maison de quartier et de la Ligue des droits de l’Homme. Quelques échanges houleux ont néanmoins eu lieu à travers la porte. Par précaution, celle-ci a même été verrouillée pendant plusieurs minutes. Claude Mangin tente également d’interpeller les élus sur le sujet. Elle a sollicité des rencontres avec les maires de Poitiers et de Tours, malheureusement sans réponses.

Un message au fil des pas

La marche doit durer environ trois mois. Après Poitiers, Claude Mangin a pris la direction d’Angoulême. Elle descend ensuite vers le sud de la France, avant de tenter de franchir la frontière marocaine  même si rien ne garantit qu’elle puisse y entrer. À plusieurs reprises ces dernières années, elle a été refoulée à l’aéroport de Rabat.

« Je marcherai jusqu’au bout, même si je ne peux pas voir Naâma, affirme-t-elle. Cette marche, c’est pour lui, mais aussi pour tous les Sahraouis emprisonnés, oubliés. Si je peux faire un peu de bruit, ouvrir quelques consciences, alors ce sera déjà ça. »

 

À la suite de la parution de cet article, le consulat général du Royaume du Maroc en France a souhaité faire valoir un droit de réponse. Dans un courriel adressé à notre rédaction, nous vous le proposons dans son intégralité : 

Droit de réponse Droit de réponse Droit de réponse Droit de réponse

Cet article vous a plu ?
partager le lien ...

RCF vit grâce à vos dons

RCF est une radio associative et professionnelle.
Pour préserver la qualité de ses programmes et son indépendance, RCF compte sur la mobilisation  de tous ses auditeurs. Vous aussi participez à son financement !

Faire un don
Qui sommes-nous ?

RCF est créée en 1982, à l'initiative de l'archevêque de Lyon, Monseigneur Decourtray, et du Père Emmanuel Payen. Dès l'origine, RCF porte l'ambition de diffuser un message d'espérance et de proposer au plus grand nombre une lecture chrétienne de la société et de l'actualité.

Forte de 600.000 auditeurs chaque jour, RCF compte désormais 64 radios locales et 270 fréquences en France et en Belgique. Ces 64 radios associatives reconnues d'intérêt général vivent essentiellement des dons de leurs auditeurs.

Information, culture, spiritualité, vie quotidienne : RCF propose un programme grand public, généraliste, de proximité.Le réseau RCF compte 300 salariés et 3.000 bénévoles.

RCF
toujours dans
ma poche !
Téléchargez l'app RCF
Google PlayApp Store
logo RCFv2.14.0 (21796db) - ©2024 RCF Radio. Tous droits réservés. Images non libres de droits.