Petit à petit, c’est toute l’Europe qui est touchée. L’inquiétude grandit, les habitants restent confinés, font des réserves, craignent de ne jamais en sortir… Non, je ne vous parle pas de l’épreuve que nous traversons avec l’épidémie du covid19, mais d’un roman d’anticipation, d’une dystopie, c’est-à-dire une fiction d’un monde utopique et sombre. Il ne s’agit pas ici d’une pandémie, d’une invasion de virus malins, mais d’une gigantesque panne d’électricité qui plonge les pays occidentaux dans le noir, d’où le titre du livre, L’obscur. Toute la vie quotidienne est bouleversée, les magasins pillés, les déplacements sont difficiles… Un naufrage qui pousse le narrateur à s’interroger sur ce monde qui fonçait droit dans le mur : « Il m’arrive de me dire, pendant les black-out, que notre mode de vie est effectivement menacé. L’heure de gloire du bonheur matérialisé est peut-être derrière nous », confie-t-il, aspirant à une vie plus simple, détachée du matérialisme ambiant.
Notre monde aujourd’hui confronté à l’épreuve n’est heureusement pas si… noir que celui décrit par Philippe Testa. Dans son roman, les inégalités sociales ont atteint un niveau effrayant, les catastrophes naturelles nombreuses, les espoirs de conquête spatiale déçus. « Depuis des années, je ne suis capable que d’une chose, nous dit le héros : regarder s’écouler le flot de ceux qui s’agitent et croient ainsi exister. » Dans cet univers individualiste, on a peur des autres et peur de la solitude, on peine à croire à l’amour, on se réfugie chez soi, « confinés – je cite - dans des apparts transformés en minuscules cavernes individuelles, obligés de nous terrer comme des être primitifs. (…) Les humains guettent. Les vitres de leurs apparts sont le dernier contact qu’ils ont avec l’extérieur ». Je vous ai prévenu, c’est une dystopie, donc un livre sombre, un monde hostile, inquiétant, et pourtant, je persiste et vous le conseille…
Plusieurs bonnes raisons de lire L’obscur : le style tout d’abord, une écriture maîtrisée et imaginative avec des mots construits à partir de plusieurs langues : un bon moment de lecture. Ensuite, dans un monde en feu, le narrateur ne s’enferme pas dans l’égoïsme : « On tient plus à quelqu’un d’autre qu’à soi-même. S’occuper d’une personne qu’on aime est plus facile que se maintenir soi-même en vie. » Et puis enfin, ce que nous vivons aujourd’hui, avec la pandémie du coronavirus, est à contrecourant de l’ambiance de ce livre : non, face à l’épreuve, l’humanité ne sombre pas dans la violence, le vol, le meurtre. La réalité est faite de solidarité, de mobilisation, d’espoir. Tout n’est pas si noir.
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