Agnès Ledig: "cette pandémie met le doigt sur tout ce qui ne va pas dans notre monde"
Coronavirus: "On était en première ligne en Alsace"
Avant d'être auteure, Agnès Ledit était sage-femme. Il y a quelques jours, elle a renfilé sa blouse. "Je ne pouvais pas ne rien faire en voyant ce qui se passait à l'hôpital. J'ai fait quelques gardes, en essayant d'accompagner quelques mamans dans le démarrage de leur vie avec leur bébés" explique Agnès Ledig, auteur de "Se le dire enfin" (éd. Flammarion).
Dans le Grand Est, le coronavirus a durement mis à mal les services hospitaliers. "Cela a été très dur. On était en première ligne en Alsace. Les choses se calment un peu. Les efforts portent leurs fruits maintenant. Quand on devient soignant, c'est pour prendre soin des autres. On ne se pose pas la question. Quand on est en garde, on s'occupe des autres avant de s'occuper de soi. On court pendant douze heures. C'es ce que j'ai ressenti pour y revenir" ajoute l'auteure.
Changer le récit du monde
Pas facile d'accoucher en pleine épidémie de Covid-19. "Les accouchements sont censés être un moment très heureux. Mais ce que j'ai ressenti, c'est de la stupeur et de l'interrogation chez les parents. Ils étaient un peu perdus, ils avaient peur. C'est difficile d'accoucher dans cette période. On se pose vraiment des questions sur l'avenir. Alors que quand on donne la vie, on donne l'espoir. Ce n'est pas évident mais il faut essayer de rester dans l'espoir. Ces jeunes parents feront de leur mieux" lance-t-elle.
Michel Bussi expliquait il y a quelques jours sur RCF que le confinement n'était pas une période propice à l'écriture. Un sentiment partagé par Agnès Ledig. "J'écris des petits textes. Pour écrire j'ai besoin de tranquillité, de longues plages horaires, ce que je n'ai pas. On est aussi dans cette espèce de stupeur et d'interrogation Mais on engrange pas mal de choses, et que cela nous aidera à réfléchir après. Dans nos sociétés, il faut que le récit change par rapport à notre vision du monde. Et les auteurs vont avoir leur rôle à jouer. C'est ce que j'écris depuis toujours : revenir aux valeurs humaines, prendre le temps, le retour du lien avec la nature" explique-t-elle.
Un temps pour prendre du recul
Le dernier roman d'Agnès Ledig se déroule dans le Morbihan, dans la forêt de Brocéliande. "J'adore la Bretagne. Quand j'y suis je suis heureuse. Je voulais faire un roman qui se passe dans une forêt puissante. J'y suis allé. J'ai pris une chambre d'hôte au hasard. Le propriétaire m'a fait visiter la forêt de façon contée. Je suis tombée amoureuse de la forêt. J'ai eu envie d'y envoyer Edouard. Il avait besoin de cette coupure violente. Il va aller chercher des réponses à ses questions auprès des arbres et de la nature" lance-t-elle.
Un séjour à Brocéliande vu comme une sorte de quarantaine. "Parfois on a besoin de ce temps-là pou réfléchir et prendre du recul. Cette quarantaine est l'inverse de ce que vivent les gens. Il n'est pas enfermé. Il va aller dans la forêt pour retrouver cette liberté dont il a besoin. J'ai des messages de lecteurs qui disent que le livre les aide à traverser ce confinement. Je pense qu'après il y aura un retour à la nature" analyse l'auteure.
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